Études sur la Parole.33
Juges chapitre 1 à 7 - Ce chapitre nous montre Josué employé à l’œuvre par l’Éternel, qui lui ordonne de passer le Jourdain pour entrer au pays qu’Il a donné aux enfants d’Israël.
Juges chapitres 1
Le livre des Juges est l’histoire de la décadence d’Israël. Josué nous montre l’énergie de Dieu agissant au milieu du peuple, qui néanmoins commet des fautes. Dans les Juges, nous voyons la misère du peuple devenu infidèle, et, en même temps, l’intervention du Dieu de miséricorde dans les circonstances où se trouvait Israël, par suite de son infidélité. C’est ce qui correspond à ce qu’on appelle des réveils, dans l’histoire de l’Église de Dieu.
Dans ce livre, on ne voit plus la bénédiction et la puissance signalant l’établissement du peuple de Dieu. Ce n’est pas non plus l’accomplissement des conseils de Dieu, après que le peuple a manifesté son impuissance à conserver la bénédiction qui lui avait été donnée, accomplissement qui est encore futur pour lui comme pour l’Assemblée ; ni les formes et le gouvernement, qui pouvaient, malgré la méchanceté et l’infidélité intérieure du peuple, maintenir son unité extérieure jusqu’à ce que Dieu le jugeât dans ses chefs. Dieu était encore seul chef reconnu en Israël ; en sorte que le peuple portait constamment lui-même la peine de son péché.
C’est à cause de cette infidélité, sans doute prévue de Dieu, qu’il a laissé quelques-unes des nations au milieu de son peuple, pour l’éprouver. La présence de ces nations était déjà une preuve du manque d’énergie et de confiance du peuple dans la puissance de Dieu qui, cependant, l’aurait garanti des désastres qui lui sont arrivés plus tard. Mais, dans ses sages conseils, Dieu, qui connaissait son peuple, a laissé ces nations au milieu de lui, comme moyen de l’éprouver. Israël ne sera béni pleinement que sous le Messie, qui introduira sa bénédiction par sa puissance, et par sa puissance la lui conservera.
Hélas ! cette histoire d’Israël en Canaan est aussi celle de l’Église ; plantée en bénédiction céleste sur la terre, elle a, dès le commencement, manqué à la réalisation de ce qui lui était donné, et le mal s’est développé en elle lors du départ des premiers et puissants instruments de bénédiction qui lui avaient été accordés. Cela est allé de mal en pis. Il y a eu des réveils, mais le fond d’incrédulité était toujours le même, et la décadence de chaque réveil a marqué un nouveau progrès dans le mal et l’incrédulité, en proportion du bien qu’on avait ainsi abandonné, en s’éloignant de la source primitive de bénédiction et de force. Le réveil n’est jamais dans des proportions tellement étendues, qu’on appréhende ce que Dieu est, ce qu’il a révélé au commencement pour son peuple, ou quelle fut alors la puissance de sa révélation, et l’action de l’Esprit. Une fois qu’on s’est éloigné de Dieu, on le perd de plus en plus. La partie de sa bénédiction, mise de nouveau en évidence, est négligée et abandonnée au point qu’il en résulte un oubli plus complet de Dieu ; la vieille nature et le monde reprennent leur place, avec cette différence qu’elle est maintenant reprise non seulement sans Dieu, mais à l’exclusion de Dieu et pour élever l’homme et sa propre nature, en s’éloignant de la source primitive de bénédiction et de force. Il y a un fait frappant dans l’histoire de l’homme : La première chose qu’il fait toujours est de gâter l’œuvre que Dieu vient d’établir sur la terre. L’homme mange du fruit défendu ; Noé s’enivre ; les fils d’Aaron offrent un feu étranger ; Israël fait le veau d’or ; Salomon tombe dans l’idolâtrie ; Nébucadnetsar érige son idole et devient persécuteur. Et tout du long la patience de Dieu continue à s’occuper des âmes malgré tout.
Toutefois, Dieu a toujours eu les siens, et sa fidélité ne leur a jamais fait défaut, soit dans le secret, soit ouvertement, dans sa bonté, pour manifester sa grâce en puissance publique envers son Assemblée ; puissance dont elle aurait dû toujours jouir. Cette triste succession de chutes finira à la venue de Jésus, qui accomplira dans sa gloire céleste ses desseins à l’égard de cette Église qui aurait dû toujours en être le fidèle témoin ici-bas.
La puissance et la présence de Dieu n’avaient pas abandonné Israël lors du départ de Josué. On Le trouvait toujours là où il y avait de la foi pour en profiter. C’est la première vérité présentée dans ce livre. C’est ce que dit Paul aux Philippiens : « ...non seulement comme en ma présence, mais bien plus encore maintenant que je suis absent; 13car c'est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire, selon son bon plaisir » (Philippiens 2 v. 13).
Cette présence de Dieu en bénédiction pour la foi se vérifie, soit par la victoire remportée sur les ennemis les plus puissants (chap. 1 v. 1 à 7), soit par l’obtention de bénédictions spéciales, des sources jaillissantes, et dans tout le détail de la réalisation des promesses (vers. 13 à 15). Les Philistins même sont dépossédés (vers. 18). Mais, en même temps, la foi de Juda et de Siméon, d’Éphraïm et de Manassé, et de toutes les tribus a manqué, et par conséquent leur énergie et le sentiment du prix de la présence de Dieu et de leur propre consécration à lui, et par conséquent aussi le sentiment dit mal qu’il y avait chez leurs adversaires ; sentiment qui aurait rendu leur présence au milieu d’eux insupportable.
Quel déshonneur fait à Dieu, quel péché de laisser là, de supporter de telles gens ; quelle infidélité envers Dieu, quelle source infaillible de mal et de corruption pour Israël, que cette indifférence ! Mais il n’était guère sensible à tout cela. Le discernement spirituel lui manquait aussi bien que la foi, et les sources de mal et de misères demeuraient à côté du peuple dans le pays même, le pays de Dieu et d’Israël !
Chapitre 2
Hélas ! puisque tel était l’état du peuple et qu’il s’en contentait, il ne s’agissait plus de châtier, comme à Aï. Mais l’Ange de l’Éternel (la présence agissante de Dieu au milieu du peuple) quitte Guilgal (cette circoncision spirituelle du cœur qui précède les victoires et retrempe l’âme, pour qu’on soit victorieux dans les combats), et vient s’établir à Bokim, dans la place des pleurs, au milieu du peuple, en déclarant qu’il ne chasserait plus les ennemis qu’Israël avait épargnés.
Dieu était donc allé à Guilgal ! Quelle grâce dans ces exercices et ces combats intérieurs du cœur, où s’accomplit la vraie circoncision pratique, où la source et l’influence du péché se font sentir pour être jugés devant Dieu, afin que, le péché étant mortifié, on puisse dans les combats (et aussi dans la communion), jouir de la force de Dieu, qui ne saurait l’accorder à la chair et au péché.
Cette mortification intérieure est une œuvre sans éclat et sans apparence, petite et mesquine aux yeux des hommes ; elle nous rend petits à nos propres yeux, mais exalte Dieu et sa grâce, et associe notre cœur avec lui, en nous donnant moralement conscience de sa présence. Ce n’est pas que nous soyons forts ; nous avons, au contraire, le sentiment d’entière dépendance (cf. 2 Corinthiens 12), mais d’une dépendance de la force divine qui, en réalité, accomplit toutes choses, bien que Dieu puisse, pour cela, se servir d’instruments s’il le juge bon. Dans ce cas, la responsabilité de l’homme intervient. À Jéricho, Dieu fait tout lui-même pour montrer, entièrement en dehors de l’homme, qui est l’Auteur. À Aï, nous trouvons la responsabilité. À Guilgal, nous ne voyons pas la force ; elle est manifestée à Gabaon contre les Amoréens de la montagne (Josué 10), mais le peuple l’avait acquise à Guilgal. Historiquement il ne paraissait pas que la force de Dieu fût à Guilgal, la manifestation de cette force aurait détruit l’œuvre proprement dite de Guilgal, c’est-à-dire le jugement, en humiliation à cause de Dieu, de tout ce qui pourrait être une occasion d’agir pour la chair.
Lorsqu’on a abandonné Guilgal, on trouve que l’ange de l’Éternel y était allé ; on l’échange contre des pleurs, mais on pleure les bénédictions perdues. En Bokim, on peut adorer Dieu. Sa relation avec le peuple n’est pas changée. Il accepte ces pleurs. Mais quelle différence ! la force et la clarté de la face de l’Éternel n’y sont pas. Mais Dieu reste toujours le même et la foi peut compter sur lui, comme lorsque la mer Rouge s’enfuit de devant sa face et que le Jourdain retourna en arrière. La douleur de la position présente est sentie, mais allégée par le sentiment que sa grâce ne peut ni ne veut faire défaut. Ce changement de Guilgal à Bokim est la clef du livre ; ce n’est que trop souvent, hélas ! celle de l’état des enfants de Dieu.
Le Saint Esprit, ayant posé ces bases générales, en vient au développement historique de cette position d’Israël. Pendant les jours de Josué et des anciens qui lui ont survécu, Israël a marché devant l’Éternel. C’est l’histoire de l’Église : tant que les apôtres ont été là, elle était gardée ; mais Paul (Actes 20 v. 29) et Pierre (2 Pierre 2) ont également averti les fidèles, que leur départ amènerait les fâcheuses conséquences de l’infidélité, et de la révolte. Déjà, les principes en étaient là. Le mélange avec des personnes infidèles, œuvre de l’ennemi, allait devenir le moyen par lequel le mal se développerait et les envahirait.
Le Seigneur l’avait dit (Matthieu 13), et Jude en développe la marche et les conséquences avec une clarté et une précision solennelles. Mais lorsqu’il s’élève en Israël une génération qui n’a pas connu l’Éternel, qui n’a pas été témoin oculaire des œuvres de sa puissance, et qu’elle sert les dieux des nations qu’elle avait laissé subsister, Dieu ne veut plus la protéger. Infidèles au dedans. les Israélites tombent entre les mains des ennemis du dehors. Puis, comme nous avons dit, dans leur affliction, l’Éternel, touché de compassion, suscite des juges, qui, reconnaissant son nom, ramènent la manifestation de sa puissance au milieu du peuple.
Chapitre 3 et 4
Dieu, sachant ce qu’était ce peuple et quel était son état, avait laissé dans les limites du pays ce qui mettait l’obéissance à l’épreuve ; les Philistins, les Sidoniens, etc., afin qu’Israël apprît « ce que c’est que la guerre », et fît l’expérience des voies et du gouvernement de l’Éternel.
En ceci, la sagesse et la prescience de Dieu, qui connaît l’homme, faisaient tourner l’infidélité du peuple en bénédiction. La prospérité extérieure, sans épreuves, n’aurait pas ôté ce qu’il y avait d’infidélité dans le cœur, et aurait privé le peuple des exercices et des combats dans lesquels il a pu comprendre ce qui en était de son Dieu, de Ses voies et de Ses relations avec lui, et en même temps ce qu’était son propre cœur.
Nous faisons, et par les mêmes causes, les mêmes expériences.
Maintenant, je repasserai les principaux sujets présentés dans l’histoire de ce livre. Othniel, Éhud et Shamgar ont été successivement les instruments suscités de Dieu pour la délivrance de son peuple.
On remarque ici la chute du peuple, qui se met à servir des faux dieux ; puis sa servitude ; et alors, dans sa détresse, il crie à l’Éternel. C’est toujours ainsi que la délivrance arrive (3 v. 9, 15 ; 4 v. 3). Dans ce dernier cas l’Éternel sort de ses voies ordinaires. Tout Israël avait perdu sa force et son énergie, même dans les affaires intérieures. Voilà l’effet des rechutes ; on perd la conscience de la puissance de Dieu.
À l’époque dont nous parlons, une femme juge Israël. C’était un signe de la toute-puissance de Dieu, car elle était prophétesse. Mais c’était une voie extraordinaire de Dieu, et une honte pour l’homme. Débora appelle Barak (car là où l’Esprit de Dieu agit, il discerne et dirige) ; elle lui communique le commandement de Dieu. Il obéit, mais la foi lui manque pour aller comme celui qui jouit de communications directes avec Dieu, et par conséquent n’a pas besoin d’en avoir d’autres. Ces communications directes donnent la conscience que Dieu est là, qu’il intervient pour son peuple. Barak ne veut pas aller sans Débora. Mais ce manque de foi n’est pas à son honneur. Les hommes resteront à la place qui correspond au degré de leur foi, et ce sera encore par le moyen d’une femme que Dieu se glorifiera. Barak a assez de foi pour obéir, s’il a près de lui quelqu’un qui sache s’appuyer directement sur Dieu, mais non pour s’y appuyer ainsi lui-même. C’est ce qui arrive souvent. Dieu ne le repousse pas, mais il ne l’honore pas. En effet, ce n’est pas du tout la même foi en Dieu. Or, c’est par la foi que Dieu est honoré.
Ici aussi, nous avons, non la destruction immédiate de l’ennemi, mais l’exercice du peuple à la guerre, pour le faire sortir de l’état d’abattement moral dans lequel il était. Le commencement était petit. Une femme en était l’instrument, car la crainte n’honore pas Dieu, et Dieu ne peut pas faire reposer sa gloire sur un tel état ; mais peu à peu « la main des fils d’Israël avançait toujours et pesait durement sur Jabin, jusqu’à ce qu’ils l’eurent retranché » (Juges 4 v. 24).
Chapitre 5
En général, l’effet d’une œuvre pareille du Saint Esprit est de présenter le peuple comme étant de bonne volonté (chap. 5 v. 2). Toutefois, l’Esprit de Dieu nous a fait voir que l’effet de l’incrédulité dans le peuple a été que plusieurs se sont tenus en arrière ; ce qui les a fait manquer à la manifestation, et à l’expérience de la puissance de Dieu. Le jugement de Dieu va jusqu’à la malédiction, là où il y avait une réserve complète, un refus de s’associer au peuple dans sa faiblesse.
Chapitre 6
Mais de nouveau les Israélites firent ce qui déplaît à l’Éternel, et il les livra entre les mains des Madianites. Et les enfants d’Israël crièrent de nouveau à l’Éternel. Dieu révèle à la conscience du peuple la cause de sa détresse. C’était déjà une réponse ; mais, pour le moment, il les laisse dans leur état. Il n’agit pas au milieu d’eux en les délivrant aussitôt ; mais il agit pour eux dans l’instrument qu’il a choisi pour opérer leur délivrance. Dieu se glorifie en lui ; mais cette action, concentrée en Gédéon, montre dans le peuple un état plus bas qu’auparavant. Toutefois, dans ces circonstances humiliantes, Dieu choisit les moyens qui déploient sa gloire de toutes manières. Là où il agit, là est la force ; et aussi la foi qui agit selon cette force dans la sphère qui lui est propre.
Nous examinerons un peu l’histoire de Gédéon et les traits de l’œuvre de l’Esprit dans cette délivrance, ainsi que dans la foi de celui qu’il a suscité. Il est évident que bien des pensées et de sérieuses réflexions s’étaient présentées à Gédéon, avant que l’Ange lui eût parlé. Mais la visite de l’Ange a été l’occasion qui lui a fait formuler et exprimer les pensées dont son cœur était occupé. Gédéon souffrait avec les autres de l’oppression des ennemis de Dieu, mais cela l’a porté à penser à Dieu, au lieu de prendre son parti de subir le mal comme un esclavage nécessaire. L’Ange lui dit : « L’Éternel est avec toi, fort et vaillant homme » (v. 12).
C’est ici que nous voyons ce qui préoccupait le cœur de Gédéon : ce n’était pas sa position à lui, mais la relation entre l’Éternel et Israël. Peut-être ne trouve-t-on pas ici la hauteur des promesses faites à Abraham, mais c’est le pouvoir rédempteur de l’Éternel se manifestant en faveur d’Israël. C’est un peu le cas de Moïse auquel l’Éternel dit : « Ton peuple » et qui répond toujours à l’Éternel : « Ton peuple » (Exode 32 v. 7 à 13). Gédéon, de même, ne peut se séparer de tout Israël, le peuple de Dieu. « L’Éternel est avec toi », dit l’ange. « Si l’Éternel est avec nous », répond Gédéon, « pourquoi donc toutes ces choses nous sont-elles arrivées ? Et où sont toutes ses merveilles que nos pères nous ont racontées, en disant : L’Éternel ne nous a-t-il pas fait monter hors d’Égypte ? Et maintenant l’Éternel nous a abandonnés, et nous a livrés en la main de Madian ».
C’était en effet la foi qui faisait jaillir tous ces raisonnements, ces exercices du cœur. L’Éternel avait fait toutes ces merveilles. Il avait fait monter le peuple du pays d’Égypte. Si l’Éternel était avec Israël, si telle était la relation de l’Éternel avec son peuple, comment le peuple pouvait-il être dans ce triste état ? (Oh ! comme un semblable raisonnement peut s’appliquer à l’Église !)
Gédéon reconnaît aussi que c’est l’Éternel qui a livré le peuple entre les mains des Madianites. Comme la pensée de Dieu élève l’âme au-dessus des misères où l’on est ! En pensant à lui on reconnaît, dans ces misères mêmes, la main et tout le caractère de celui qui les a envoyées. C’est là ce qui relevait ce pauvre Israélite travaillant sous le poids de l’oppression. « L’Éternel le regarda et lui dit : Va avec cette force que tu as, et tu sauveras Israël » (v. 14). La visite et le commandement de l’Éternel prêtaient leur forme et leur force à ce qui auparavant n’était qu’un exercice de cœur.
Néanmoins, c’était cet exercice de cœur qui était sa force ; car c’était un lien intérieur de foi avec tout ce que l’Éternel était pour son peuple opprimé, dans la conscience de la relation qui subsistait entre eux.
Voyons maintenant le développement et la mise à exécution de cette foi, pour la délivrance du peuple de Dieu. Gédéon éprouve d’abord le sentiment de sa propre petitesse, quelle qu’ait été la relation entre l’Éternel et le peuple (v. 15). La réponse de l’Éternel lui montre le seul moyen, si simple : « Moi je serai avec toi ». Précieuse condescendance, doux et puissant encouragement pour l’âme ! La foi de Gédéon était faible. L’état présent du peuple tendait par sa durée à effacer le souvenir des merveilles opérées par l’Éternel à la sortie d’Égypte, et à affaiblir la conscience de sa présence. Maintenant l’Ange de l’Éternel daigne s’arrêter auprès de lui pour affermir sa foi.
Gédéon qui s’était adressé à lui, dans la conscience secrète que c’était le Seigneur, sait actuellement qu’il a vu l’Ange de l’Éternel — d’Élohim, face à face. C’était une révélation positive, propre à l’anéantir en lui-même, ainsi que cela eut lieu, mais aussi à le fortifier, d’une manière puissante, dans sa marche au milieu des autres qui n’avaient pas connu de la même manière l’Éternel. Quoique ce ne soit pas avec de telles visions, il en est toujours ainsi lorsque Dieu suscite un instrument spécial pour la délivrance de son peuple.
L’Éternel s’était manifesté, et maintenant il rassure Gédéon. « Paix te soit, dit-il ; ne crains point, tu ne mourras pas ». L’homme, anéanti par la présence de Dieu, jouit de sa force si cette présence est en bénédiction. C’est ce que Gédéon saisit et reconnaît pour lui-même : l’Éternel est avec lui en paix et en bénédiction. Le mot (Shalom) « Paix te soit » est le même que celui de l’autel : « L’Éternel de paix ».
Lorsque Dieu agit puissamment sur le cœur, le premier effet se montre toujours dans les relations avec lui. Gédéon est préoccupé de l’Éternel, il l’était avant cette manifestation. Mais étant rempli de l’Éternel, c’est par l’adoration (*) qu’il exprime les sentiments de son cœur, lorsqu’il reçoit de Lui la réponse à tout ce qui s’y passait (**). Il élève un autel à l’Éternel de paix. Ainsi, les relations de paix sont établies entre Dieu et son serviteur ; mais tout ceci est entre Gédéon et l’Éternel.
(*) On voit un sentiment analogue chez Éliézer. (Genèse 24 v. 27). Il est très intéressant d’étudier les diverses circonstances dans lesquelles on a bâti des autels à l’Éternel. Je cite ici quelques passages. (Genèse 8 v. 20, et 12 v. 7 ; comp. 13 v. 4 ; voyez 21 v. 33 ; 22 v. 9 ; 26 v. 25 ; 33 v. 20 ; 35 v. 7. On peut remarquer encore Exode 24 v. 4 ; Josué 8 v. 30. Ici, Juges 6). Il paraît même que Gédéon en a bâti deux : l’un pour lui-même en adoration, et l’autre par commandement en témoignage. (1 Samuel 7 v. 17 ; 14 v. 35 ; 1 Rois 18 v. 32. On peut ajouter 2 Samuel 24 v. 25 ; Esdras 3 v. 2).
(**) Il est instructif de remarquer ici la différence entre les exercices de cœur qui résultent de la foi, et la réponse de Dieu aux besoins et aux difficultés que produisent ces exercices. Au verset 13, nous avons l’expression de ces exercices dans une âme sous le poids de la même oppression que ses frères, mais qui la sent, parce que sa foi en l’Éternel était réelle. Ici, nous avons la réponse qui produit la paix, et, avec la paix, l’adoration. Il en est de même lorsque, après avoir subi la mort, Jésus, ressuscité, se révèle à ses disciples avec les mêmes mots dont Dieu se sert ici, et pose les bases de l’Église réunie pour le culte. En Luc 7, nous retrouvons les mêmes expériences chez la femme de mauvaise vie. Elle croyait en la personne de Jésus. Il était son tout par sa grâce ; mais elle ne savait pas encore qu’une femme comme elle était pardonnée et sauvée, et pouvait s’en aller en paix. Cette assurance fut la réponse donnée à sa foi. Or, cette réponse est ce qu’annonce l’Évangile à tout croyant.
Le Saint Esprit annonce Jésus. Cela produit la conviction de péché. La connaissance de Dieu en Christ et la connaissance de soi-même atterre (car le péché est là, et l’on est charnel, vendu au péché) ; mais elle produit des combats, peut-être des angoisses. Souvent l’âme se débat avec le péché et ne peut se tirer d’affaire ; elle demeure au même point (la plupart des sermons dont elle attend la lumière ne vont pas plus loin). Mais l’Évangile annonce les ressources de Dieu lui-même pour sortir de cet état. Paix te soit, tes péchés te sont pardonnés. Ta foi (car elle existait), dit Jésus à la femme pécheresse, t’a sauvée. Voilà ce qu’elle ne savait pas encore. (Comp. Actes 2 v. 37 et 38).
Maintenant vient son service public, qui aussi s’accomplit en rétablissant premièrement au sein de sa famille et de sa ville les relations entre Dieu et son peuple. Il faut que Baal soit ôté d’Israël avant que Dieu chasse les Madianites. Pourquoi le ferait-il, si la bénédiction pouvait être attribuée à Baal ?
Il est donc commandé à Gédéon de rendre un témoignage éclatant, qui attire l’attention de tout le peuple sur la nécessité de rejeter Baal, afin que Dieu puisse intervenir. La fidélité au dedans précède la force au dehors : le mal doit être ôté d’Israël avant que les ennemis soient chassés. L’obéissance, puis la force : voilà l’ordre de Dieu.
Lorsque la puissance de Satan en superstition, manifestée extérieurement de quelque manière que ce soit, est méprisée, elle est détruite ; en supposant toujours que Dieu est avec celui qui la méprise, et que celui-ci est dans le chemin de l’obéissance.
Gédéon renverse Baal ; et en réponse à la colère du peuple que la superstition remplit de terreur, celui-là même à qui l’autel appartenait leur dit : « S’il est dieu qu’il se défende lui-même ». La puissance de Dieu agissait sur les esprits, car il y avait la foi. Mais l’opposition de l’ennemi ne cesse pas pour cela : rien de plus méprisable qu’un Dieu méprisé. Si Satan ne peut pas être Dieu parmi les hommes, il n’est pas au bout de ses ressources : il suscitera les hommes en hostilité ouverte contre ceux qui renversent ses autels ; mais lorsqu’on agit de la part de Dieu, cette guerre de l’ennemi n’aura d’autre effet que de l’amener en présence de la puissance de Dieu, et de nous donner la victoire, la délivrance et la paix.
Les Madianites montent contre Israël. Tout est préparé pour que l’Éternel intervienne. L’Esprit de Dieu revêt Gédéon. Nouvelle phase dans cette histoire ; ce n’est pas seulement la fidélité, c’est la puissance. Gédéon sonne de la trompette, et ceux qui naguère avaient voulu le tuer, marchent maintenant à sa suite. Il envoie des messagers à toute sa tribu. Ceux de Zabulon, d’Aser et de Nephthali viennent aussi. La puissance de l’Esprit qui mène les esprits des hommes, est avec la foi qui reconnaît Dieu, qui le reconnaît dans sa relation avec son peuple, et rejette fidèlement le mal incompatible avec cette relation.
Dieu donne encore une preuve de sa grande condescendance en accordant un signe pour fortifier la foi, faible, mais réelle et sincère, de Gédéon, qui sent, lorsqu’il répète sa demande (v. 39), que Dieu pourrait bien le châtier pour son manque de foi. Cependant l’Éternel lui accorde ce qu’il demande.
Chapitre 7
Trente-deux mille hommes suivaient Gédéon. Mais l’Éternel ne veut pas un si grand nombre. Lui seul doit être glorifié dans cette délivrance. En effet, la foi était si faible, lors même que l’Esprit de Dieu agissait, qu’une fois en présence de l’ennemi vingt-deux mille hommes sont contents de se retirer, sur l’invitation de Gédéon. Le mouvement produit par la foi d’autrui est loin d’être une foi personnelle.
Mais dix mille hommes sont encore trop. Le nom de l’Éternel doit seul paraître, Ceux-là seuls doivent rester, qui ne s’arrêtent pas pour se désaltérer à leur aise, mais se rafraîchissent à la hâte, comme l’occasion se présente, plus occupés du combat que de leurs aises, pendant le chemin. Le peuple avait besoin de comprendre que l’Éternel devait avoir, par la foi, toute la place dans son cœur ; et il convenait au juste jugement de Dieu que ceux qui ne lui donnaient pas cette place fussent privés de la part qu’ils auraient pu avoir à cette œuvre glorieuse.
Ici, Gédéon déploie une entière confiance en Dieu. Précédemment, la faiblesse de sa foi faisait que son cœur se reportait trop sur lui-même, au lieu de regarder simplement à Dieu. Le profond sentiment qu’il avait de l’état d’Israël l’empêchait d’hésiter un instant, parce que le peuple n’était pas avec lui ; que faire de ce peuple ? Dans la défiance qui venait de cette disposition à se reporter sur lui-même, il avait senti le besoin de s’assurer que l’Éternel était avec lui ; mais maintenant qu’il a la certitude que l’Éternel veut délivrer Israël par son moyen, il s’en rapporte entièrement à lui.
L’Éternel jette l’effroi et l’épouvante au milieu des ennemis, et le fait connaître à Gédéon. Il est touchant de voir les soins que Dieu prend pour inspirer de la confiance à son serviteur, selon les besoins que l’état de choses avait créés. Aussi, le nom de Gédéon retentissait-il déjà avec effroi dans la nombreuse armée des Madianites. Saisis de terreur, ils se détruisent les uns les autres. La confiance des Madianites, basée seulement sur l’incapacité d’Israël, se fondait devant l’énergie de la foi ; car les instruments de l’œuvre de l’ennemi ont toujours une mauvaise conscience. C’est l’Éternel qui fait tout. Les trompettes et les flambeaux seuls annonçaient sa présence et celle de son serviteur Gédéon. La multitude d’Israël poursuit les ennemis, profitant de l’œuvre de la foi sans en avoir : résultat ordinaire d’un pareil mouvement.