La justification par la foi
La justification évangélique ou justification par la foi consiste en ceci, que nos péchés nous sont pardonnés et que nous devenons agréables à Dieu à cause de Jésus-Christ.
« Sachant que ce n'est pas par les œuvres de la loi que l'homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons cru en Jésus-Christ, afin d'être justifiés par la foi en Christ et non par les œuvres de la loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par les œuvres de la loi (Galates 2 v. 1) ».
Les mêmes vérités sont exprimées presque dans les mêmes termes au 3ème chapitre des Romains. Sous le nom de Justification par la foi, j'en fais le sujet de mon présent discours, et, je me propose de l'étudier en montrant successivement :
I. ce qu'est la justification par la loi.
II. qu'aucun homme ne peut être justifié par les œuvres de la loi.
III. ce qu'est la justification évangélique.
IV. quel est son résultat, c'est-à-dire quel est l'état de l'homme ainsi justifié.
V. que la justification évangélique a lieu par le moyeu de la foi.
VI. enfin, quelles sont les réponses à faire à différentes difficultés que soulève notre sujet.
I. En quoi consiste la justification légale.
1. D'une manière générale, elle consiste à déclarer un accusé non coupable. Elle prononce qu'il n'a pas violé la loi, qu'il n'a accompli aucun acte qualifié crime par elle, qu'il est par conséquent innocent.
2. Dans un sens plus spécial et plus technique, elle consiste. à admettre le fait qui est à la charge de l'accusé, mais en établissant qu'il avait le droit d'agir ainsi qu'il l'a fait. Si par exemple un homme est accusé de meurtre, le fait qu'il a tué est admis, mais on constate qu'il a agi en exerçant le droit de légitime défense, ou qu'il y a eu accident inévitable.
II. Je désire vous montrer que nul ne peut être justifié par les œuvres de la loi. Ce qui est vrai qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre forme de justification.
1. S'il s'agit de la justification sous sa forme la plus générale, c'est à l'accusateur à faire la preuve des faits dont il charge l'accusé ; il lui suffit, en ce cas, d'établir qu'un crime (un fait) a été commis. Cette preuve unique suffit à établir la culpabilité de l'accusé, et exclut pour lui la possibilité d'être justifié par la voie qui nous occupe en ce moment. Il ne servirait de rien, devant le tribunal de Dieu, que l'accusé démontrât qu'il a fait plus de bien que de mal, ou que le temps pendant lequel il a gardé la loi a été plus considérable que celui pendant lequel il violée ; il faudrait pour sa justification qu'il pût établir qu'il a accompli la loi tout entière jusqu'à un iota et jusqu'au moindre trait de lettre. Or qui peut être justifié de cette façon-là ? Personne assurément.
2. S'il s'agit de la seconde forme de justification que j'ai indiquée, celle où le fait est admis et la culpabilité niée, c'est à l'accusé à faire la preuve qu'il n'est pas coupable. Il reconnaît la réalité des faits qu'on lui impute ; si donc il ne peut alléguer qu'un vain prétexte, il est perdu.
Si l'excuse n'est qu'une apologie futile ou si elle ne s'applique pas au cas donné, elle ne peut justifier ; pour qu'elle justifie, il faut qu'elle réunisse deux conditions : il faut qu'elle soit vraie, et qu'elle soit suffisante. Si elle ne réunit pas ces deux conditions, et surtout si elle jette le blâme sur le tribunal ou sur le gouvernement, elle ne fait qu'augmenter la culpabilité de l'accusé ; elle est une aggravation infamante du crime. Nous aurons bientôt à revenir sur cette dernière remarque.
J'indiquerai maintenant quelques-unes des principales raisons que les pécheurs ont l'habitude d'alléguer pour leur justification ; je vous en montrerai la vraie nature, ainsi que la portée, et vous comprendrez ce qu'elles sont aux yeux de Dieu. Je n'ai pas le temps de les examiner toutes, Mais j'en citerai deux de chacune des catégories que je vous ai fait entrevoir. Deux de celles qui manquent de vérité et qui seraient bonnes si elles étaient vraies ; puis deux de celles qui sont vraies, mais insuffisantes.
1° Les pécheurs allèguent souvent leur nature pécheresse pour se justifier.
Et s'il est vrai, comme ils le prétendent, que Dieu leur ait donné une nature qui soit en elle-même pécheresse, une nature dont les actes soient nécessairement mauvais, ils ont là une bonne excuse pour leurs péchés ; au jour du Jugement, à la face du ciel et de la terre, le fait qu'ils allèguent les justifiera. Il faudrait, en effet, que Dieu faussât la raison de tous les êtres raisonnables, pour qu'ils pussent vous blâmer d'avoir péché, alors que Dieu vous ayant constitués pécheurs en vous créant, serait lui-même l'auteur de votre péché.
Mais comment votre nature pourrait-elle être elle-même péché ? Qu'est-ce que le péché ? Le péché est une transgression de la loi. Il n'y a aucun autre péché que celui-là. Or loi dit-elle que vous ne devez pas avoir la nature que nous avons tous en venant au monde ? Elle ne dit rien de semblable.
Cette doctrine, qui place le péché dans la nature même de l'homme, méconnaît la différence qu'il y a entre le péché et l'occasion du péché. Nos appétits physiques, nos besoins et nos penchants deviennent des occasions de péché, alors qu'ils sont fortement excités. Il en fut ainsi chez le premier homme ; personne cependant ne dira qu'il avait une nature pécheresse.
L'appétit physique qui recherche la nourriture du corps, ainsi que le désir de croître dans la connaissance faisaient partie de son être tel qu'il était sorti des mains de Dieu ; c'est tout ce que l'on peut dire. Il n'y avait là aucun péché. Mais ces penchants nécessaires à la créature appelée à vivre en ce monde sous le gouvernement, moral de Dieu, n'en devinrent pas moins, une fois excités, une occasion de pécher contre Dieu. Ils étaient innocents en eux-mêmes, mais le péché fut dans la manière dont le premier homme les satisfit.
Or, quand le pécheur essaie de se justifier en alléguant ce qu'il appelle sa nature pécheresse, il confond ces appétits et ces besoins innocents avec le péché lui-même ; en fait, il accuse Dieu follement de lui avoir donné une mauvaise nature, alors que tous les éléments de sa nature sont essentiels à la vie morale à laquelle il est appelé, et que Dieu l'a constitué aussi bien que cela, était possible, l'adaptant parfaitement à toutes les circonstances de la vie qu'il devait mener en ce monde. La vérité est donc que la nature de l'homme est parfaitement ce qu'elle doit être ; elle est aussi bien constituée pour aimer Dieu et lui obéir que pour le haïr et lui désobéir.
Pécheur ! Le jour n'est pas loin où tous verront si l'excuse que tu donnes est bonne ou non ; et tu verras toi-même si, alors que ton Créateur te reprochera, ton péché, tu pourras le couvrir de confusion en retournant l'accusation contre lui et en faisant retomber tout le blâme sur sa personne.
Mais, m'objecterez-vous peut-être, le péché d'Adam n’a-t-il donc pas contribué à produire ceux de ses descendants ? Oui, en ce sens qu'il les a exposés à des tentations plus puissantes et plus multipliées ; mais il est faux qu'il leur ait légué une nature qui en soi serait pécheresse.
2° Pour se justifier, les pécheurs allèguent souvent leur incapacité à faire le bien.
Raison semblable à la précédente et qui serait bonne si elle était vraie. En effet, si étant accusé de péché, vous pouviez prouver que vous êtes réellement incapable d'obéir à Dieu, que Dieu a par conséquent exigé de vous de qu'il vous était impossible de faire, tous les êtres intelligents de l'Univers n'auraient qu'une voix pour vous déclarer non coupable il faudrait ou qu'ils rendissent ce verdict ou qu'ils cessassent d'être raisonnables ; car une des vérités les plus élémentaires qu'enseigne la raison, c'est que nul être ne peut être tenu de faire ce qui lui est impossible.
Supposez qu'on vous demande d'annuler les péchés que vous avez commis ; chacun reconnaîtra que c'est là une impossibilité et que vous ne pouvez être blâmé parce que vous ne le faites pas. Mais ce que Dieu vous demande, ce n'est pas d'annuler les péchés que vous avez commis, c'est de vous en repentir. Je suppose que le premier jour de cette année votre devoir ait été d'avertir un pécheur ; vous ne l'avez pas fait, et maintenant ce pécheur est mort. Êtes-vous aujourd'hui dans l'obligation de l'avertir ? Non ! La chose est impossible ; tout ce que Dieu peut vous demander, c'est de vous repentir de votre négligence. Dieu ne peut vous rendre responsable que de l'accomplissement d'un devoir qu'il était en votre pouvoir d'accomplir ; mais il est absurde de penser qu'il puisse vous faire un devoir d'accomplir ce qui n'est pas en votre pouvoir.
Encore ici, l'excuse que nous examinons accuse Dieu de tyrannie, aussi constitue-t-elle une aggravation infamante du crime. Il est clair, en effet, que si Dieu exige de vous ce que vous ne pouvez pas faire, c'est de la tyrannie. Et comme son commandement est sous peine de mort éternelle, sa tyrannie est sans bornes. Bien loin donc que l'excuse en question justifie le pécheur, elle est une sérieuse aggravation de sa culpabilité, vu qu'elle accuse Dieu d'une tyrannie sans mesure aucune.
Supposez encore que Dieu vous ordonne de vous repentir pour n'avoir pas fait ce qu'il n'a jamais été en votre pouvoir de faire, et vous condamne à l'enfer si vous n'obéissez pas. Ce commandement-là ne serait pas plus raisonnable que le précédent, car dans un cas pareil vous ne pouvez-vous repentir, et Dieu lui-même ne peut faire que vous vous repentiez. Qu'est-ce que la repentance ? C'est se blâmer soi-même et justifier Dieu. Or, pour un être raisonnable, c'est une impossibilité que de se blâmer pour n'avoir pas fait une chose qu'il a conscience de n'avoir pu faire. Dans ce cas, aucun être raisonnable ne pourrait non plus justifier Dieu.
Si Dieu vous appelait en jugement et vous sommait de vous repentir de ce que vous ne volez pas au plus haut des airs, par quel procédé pourrait-il faire que vous vous blâmiez pour cela, alors que vous êtes parfaitement conscient de n'avoir ni ailes, ni rien de ce qu'il faut pour voler ? Pour que le repentir vous fût possible, il faudrait que Dieu vous trompât et vous inspirât la fausse persuasion que vous aviez le pouvoir de voler. Mais quel Dieu que celui qui agirait de la sorte à l'égard de ses créatures !
Que prétendez-vous donc, pécheur, en alléguant votre incapacité ? Pensez-vous faire croire que vous n'avez jamais péché ? Vous tombez dans une étrange contradiction quand vous admettez que vous devez vous repentir et qu'aussitôt après vous prétendez avoir été incapable d'obéir à Dieu. Choisissez le terrain sur lequel vous voulez vous placer et restez-y. Si vous pensez vous appuyer sur l'excuse qui nous occupe, faites-la valoir hardiment, présentez-vous devant, le tribunal de Dieu et dites : « Seigneur, je ne puis ni ne veux me repentir du tout, je n'y suis pas obligé, car je n'ai pas le pouvoir d'obéir à la loi ; je maintiens donc que je ne suis absolument pas coupable, car je n'ai jamais péché ».
Pouvez-vous réellement vous flatter de vous justifier de la sorte ? Osez-vous vous prévaloir d'une excuse pareille et rejeter sur Dieu toute la responsabilité de votre péché ?
3° Une autre excuse qu'allèguent les pécheurs pour rester dans leur impénitence, c'est leur mauvais cœur.
Cette excuse est vraie, mais elle est insuffisante. Qu'est-ce qu'un mauvais cœur ? Ce n'est pas l'organe qui bat dans notre poitrine, ce sont les affections, les mauvais sentiments, les mauvaises pensées, les actions de l'âme. Si c'est là ce qui doit vous justifier, le diable lui-même sera justifié. N’a-t-il pas un aussi mauvais cœur que vous ?
Supposons que vous ayez commis un meurtre et que, comparaissant devant la cour d'assises, vous essayiez de vous justifier de la manière suivante : « C'est vrai, j'ai tué un homme, mais, j'ai une telle haine pour l'humanité, j'ai une telle soif de sang, que je ne puis m'empêcher de tuer quelqu'un chaque fois que j'en ai l’occasion ». « Horreur ! S'écrira le juge, dressez le gibet immédiatement et que cet homme soit pendu avant que je quitte la cour ; un pareil misérable ne mérite pas de vivre une heure. S'il a une telle soif de sang que personne ne soit en sûreté auprès de lui, c'est précisément pour cela qu'il faut le pendre à l'instant ». Les pécheurs qui allèguent leur mauvais cœur présentent une justification exactement semblable à celle que nous venons de supposer : « Méchant serviteur, je te jugerai par tes propres paroles ».
4° Une autre excuse fort commune est celle qui allègue la conduite des chrétiens.
Demandez à beaucoup de ceux qui vous entourent, pourquoi ils ne se donnent pas à Dieu. « Les chrétiens, vous répondront-ils, ne sont pas meilleurs que les autres ; quand nous les verrons se conduire conformément à leur profession de piété, nous penserons alors à nous convertir ». Ils montrent donc qu'ils savent comment les chrétiens devraient se conduire, et que par conséquent ils ne pèchent pas par ignorance.
Ensuite, en admettant, ainsi que je le fais, que beaucoup de chrétiens ont une conduite très répréhensible, et font bien de choses qui sont entièrement contraires à leur profession de piété, est-ce là une excuse pour ceux qui refusent de se donner à Dieu ? Au contraire, leur dirai-je, c'est une des plus fortes raisons qu'il y ait pour vous mettre à son service. Vous qui savez comment ceux qui professent la piété devraient se conduire, vous êtes tenus de donner l'exemple. Si vous aviez imité la conduite des chrétiens parce que vous ne saviez pas mieux faire, le cas serait tout autre ; mais maintenant vous êtes inexcusables.
Votre devoir est de reprendre ces chrétiens dont vous parlez, de prier pour eux et de les conduire dans un chemin meilleur, mais vous n'en faites rien. Votre excuse, bien que vraie, en fait, ne vous justifie nullement ; elle ne tait qu'ajouter à votre culpabilité. Belle justification que celle-là ! Vous cacher derrière quelque diacre ancien d'église pris en faute pour décocher contre le Très-Haut lui-même les traits de votre méchanceté.
Maintenant, mes chers auditeurs, y aurait-il encore quelqu'un parmi vous qui penserait pouvoir être justifié par la loi ? Qui d'entre vous l'a gardée ? Et qui d'entre-vous pourrait présenter une excuse valable pour sa désobéissance ?
III. Qu'est-ce que la justification évangélique ?
Disons d’abord ce qu'elle n'est pas.
1. La justification évangélique n'est pas l'imputation de la justice de Jésus-Christ.
La justification des pécheurs ne consiste pas en ce que l'obéissance de Jésus-Christ serait portée à leur compte, comme s'il avait obéi à la loi à leur place. C'est une erreur assez commune que d'interpréter la justification évangélique en ce sens que le pécheur serait tenu pour juste au point de vue de la loi parce que l'obéissance ou la justice de Christ lui serait imputée.
Je n'ai pas le temps maintenant d'entrer dans l'examen de cette question ; tout ce que je puis dire, c'est que cette idée est absurde, par la raison que Jésus-Christ était tenu d'obéir à la loi pour lui-même et qu'il ne pouvait pas plus faire des œuvres surérogatoires, ou obéir pour notre compte, que qui que ce soit d'autre. N'était-ce pas son devoir d'aimer le Seigneur son Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa pensée et de toute sa force et d'aimer son prochain comme lui-même ? Certainement ; et s'il n'avait pas fait cela, il aurait péché. La seule œuvre surérogatoire qu'il pouvait faire était d'accepter des souffrances qu'il n'avait pas méritées. C'est ce qui est appelé son obéissance jusqu'à la mort, et c'est de cette obéissance-là que nous recueillons le bénéfice.
Si son obéissance à la loi nous était imputée, comment pourrions-nous être appelés à nous repentir et à obéir nous-mêmes à la loi ? Dieu exige-t-il une double ou même une triple satisfaction ? D'abord l'obéissance que Jésus-Christ aurait offerte à notre place, puis les souffrances endurées en expiation de nos péchés, enfin notre repentance et notre obéissance personnelles ! Ce que Dieu demande de nous, c'est que nous obéissions toujours à la loi de l'amour ; et pour cela, il n'y a pas de substitution possible. Si nous manquons à cette obligation, nous devons ou subir le châtiment ou recevoir un pardon gratuit.
2. La justification par la foi ne consiste pas en ce que la foi nous tiendrait lieu de sainteté personnelle.
Quelques-uns pensent que la justification nous dispense d'être personnellement saints ; Dieu nous déchargerait donc arbitrairement du devoir d'obéir à la loi et il se contenterait de notre foi, qui serait ainsi substituée, à l'obéissance. Mais tout cela est faux. Dieu compte notre foi pour ce qu'elle est et non pour ce qu'elle n'est pas. La foi d'Abraham lui fut imputée à justice (1), parce qu'elle était elle-même un acte de justice et qu'elle opérait par l'amour et produisait la sainteté. La foi qui justifie est sainteté, quoiqu'elle ne soit pas toute la sainteté ; elle produit la sainteté du cœur et de la vie ; aussi est-elle imputée au croyant comme sainteté, mais non à la place de la sainteté.
(1) La loi est une, la justice est une, le cœur de l'homme est un. Quiconque viole un seul commandement les viole tous. Quiconque en accomplit un seul, les accomplit tous (Note du traducteur).
3. La justification par la foi n'implique donc pas que le pécheur soit justifié par la foi sans les bonnes œuvres, (c'est-à-dire sans la sainteté.)
Plusieurs pensent que « justification par la foi » signifie justification sans aucun égard aux bonnes œuvres ou à la sainteté ; ils tirent cette conséquence des paroles de l'apôtre Paul qui insiste avec une grande force sur la justification par la foi. Mais il faut remarquer que Paul polémique contre les Juifs qui pensaient être justifiés par leur obéissance à la loi. En opposition à cette erreur, il déclare que les œuvres de la loi ne peuvent nullement justifier, et insiste sur la justification « par la foi sans les œuvres de la loi. » Il ne veut pas dire que les bonnes œuvres ne soient pas nécessaires à la justification, mais bien que les œuvres de la loi ne sont pas de bonnes œuvres, vu qu'elles procèdent de considérations légales, telles que l'espoir de la récompense et la crainte du châtiment, et non de la foi qui opère par amour.
Mais lorsqu'une erreur opposée se fut introduite dans l'église sous le couvert des paroles de Paul, Jacques reprit le sujet et montra qu'on n'avait pas compris Paul. Il se servit de l'exemple d'Abraham : « Abraham, notre père, dit-il, ne fut-il pas justifié par les œuvres, quand il offrit Isaac son fils sur l'autel ? Tu vois que sa foi opérait avec ses œuvres, et que, par les œuvres, la foi fut rendue parfaite. Ainsi fut accomplie l’Écriture qui dit : Abraham crut Dieu, et cela lui fut imputé à justice ; et il fut appelé ami de Dieu. Vous voyez donc que l'homme est justifié par les œuvres et non par la foi seulement (Jacques 2 v. 21 à 24) ».
On a vu une contradiction entre cet enseignement et celui de Paul, et plusieurs des anciennes églises rejetaient, pour ce motif, l'épître de Jacques ; on n'avait pas compris que Paul parlait d'une sorte d’œuvres et Jacques d'une autre. Paul parlait d’œuvres de loi, c'est-à-dire d’œuvres faites par des motifs légaux ; tandis que partout il insistait sur les bonnes œuvres provenant de la foi, ou sur la justice de la foi, montrant que cette justice-là est indispensable pour le salut. Ce qu'il niait, c'était uniquement que les œuvres légales eussent une part quelconque dans la justification. Jacques enseigne la même chose quand il montre que l'homme n'est justifié ni par les œuvres seules, ni par la foi seulement, mais par la foi agissant avec les œuvres.
Disons maintenant ce qu'est la justification évangélique.
La justification évangélique ou justification par la foi consiste en ceci, que nos péchés nous sont pardonnés et que nous devenons agréables à Dieu à cause de Jésus-Christ.
Quand nous disons que l'homme est justifié par la foi et la sainteté ; nous ne voulons pas dire qu'il soit accepté de Dieu sur le terrain de la loi (1) ; nous voulons dire qu'il est traité comme s'il était juste, à cause de sa foi et des œuvres de sa foi. Tel est, en effet, le principe d'après lequel Dieu justifie le pécheur ; ce n'est pas que la foi soit le fondement de sa justification ; ce fondement, c'est Christ. Si le pécheur se repent, croit et devient saint, ses péchés sont pardonnés pour l'amour de Christ.
(1) Le verdict non coupable ne peut être prononcé. Le pécheur est au contraire reconnu coupable, mais pardonné (Note du traducteur).
C'est ainsi que l'on voit par oui la justification évangélique diffère de la justification légale. Celle-ci est une déclaration d'innocence actuelle : celui qui en est l'objet est de droit exempt de tout blâme ; tandis que dans la justification évangélique l'homme est pardonné et accepté comme s'il était juste, mais sur une tout autre base que celle de son droit et de son obéissance à la loi.
IV. Je désire maintenant montrer le résultat de cette sorte de justification, c'est-à-dire l'état dans lequel elle transporte l'homme.
1. Le premier effet du pardon est de faire disparaître la pénalité.
Celle-ci est reconnue juste, méritée, mais elle est mise de côté, de sorte que celui qui est justifié n'a pas plus à craindre le châtiment que s'il n'avait jamais transgressé la loi. Celui qui a la vraie foi ne doit plus être influencé par la crainte de la punition.
2. Un second effet du pardon,
Quand il est octroyé par les souverains de ce monde, est de faire disparaître les conséquences infamantes de la transgression, telles que confiscation des biens, incapacité de tester, de remplir un emploi dans l'administration, etc. Un pardon réel réintègre l'individu dans la position qu'il avait avant sa transgression de la loi. De même en est-il dans le gouvernement de Dieu ; Celui qui est pardonné est traité par Dieu, quant à ce qui concerne la loi, comme s'il était innocent. Cela ne veut pas dire que Dieu le déclare innocent, cela signifie que le pardon le place dans la même position que s'il l'était.
3. Un troisième effet du pardon est de rendre à celui qui le reçoit sa qualité d'enfant de Dieu, pour être traité désormais comme tel.
Supposez que le fils d'un prince régnant ait commis un meurtre, qu'il soit jugé et condamné à mort. Le pardon ne le délivrera pas seulement de la mort, il lui rendra sa place au sein de sa famille. De même quant aux enfants de Dieu : ils se sont tous égarés et sont entrés au service du diable ; mais dès que le pardon leur est accordé, ils reçoivent l'esprit d'adoption, ils sont scellés comme héritiers de Dieu, et réintégrés dans tous les privilèges des enfants de Dieu.
4. Par la justification, nous est assurée toute la grâce nécessaire pour être pleinement gardés des pièges de Satan et pour sortir des innombrables liens dont le péché nous a enlacés.
Mes bien-aimés, si Dieu se bornait à nous pardonner, et qu'il nous laissât nous dégager du péché, comme nous le pourrions, par nos propres forces, à quoi nous servirait le pardon ? À rien. Si un enfant s'enfuit de la maison paternelle, s'égare dans la forêt, et tombe dans une fosse profonde, et que son père se trouvant là, lui pardonne sa fuite loin des siens, à quoi pourra lui servir ce pardon, à moins que son père ne le tire de la fosse et ne le ramène à la maison ? Dans le plan de la rédemption, toute aide, tout secours dont nous pouvons avoir besoin nous est garanti, si nous croyons.
Laissez-moi vous le répéter, si Dieu entreprend de vous sauver, il s'engage à vous donner toute la lumière, toute la force, toutes les grâces qui sont nécessaires pour rompre toutes les chaînes de Satan et tous les liens du péché ; il s'engage à vous conduire même jusqu'à la maison paternelle.
Voici ce qui arrive très souvent, je le sais. Le pécheur est brisé par la conviction de péché, son cœur se fond à la pensée de sa vie passée et plus encore à la vue de la miséricorde divine, il se jette aux pieds du Seigneur, il fait abandon complet de sa personne à Jésus-Christ, puis il se réjouit de toute son âme à la pensée qu'il en a fini avec le péché. Mais peu après, il recommence à sentir le poids des vieilles habitudes et la puissance des influences qui l'ont subjugué si longtemps ; le combat à livrer lui apparaît alors si rude, la tâche à accomplir si grande, qu'il se décourage et s'écrie : « Que faire, que devenir, avec tant d'ennemis sur ma route et si peu de force, si peu de solidité et de résolution pour leur tenir tête ? »
Laissez-moi vous dire, mes bien-aimés, que si Dieu a commencé son œuvre en vous, vous n'avez qu'a vous tenir près de lui, dans la confiance, et il vous fera « sortir de tout ». Vous n'avez aucun ennemi à craindre. Que les cieux tonnent, que la terre s'ébranle, que les éléments s'embrasent et se dissolvent, vous n'avez pas à trembler ; ni ennemis du dehors, ni ennemis du dedans ne peuvent vous nuire : Dieu est pour vous, qui sera contre vous ? « Qui condamnera ? Christ est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, et il intercède pour vous (Romains 8 v. 34) ».
5. Aussitôt que nous sommes justifiés, tous les attributs divins concourent à notre salut, comme si nous n'avions jamais péché.
Voyez ce saint ange qui porte un message d'amour dans quelque partie éloignée de l'Univers ; l’œil de Dieu le suit, et si quelque danger le menace, tous les attributs divins le couvrent et le protègent. Il en est absolument de même pour vous si vous êtes justifiés. Tous les attributs divins concourent à vous défendre, à vous soutenir, à vous sauver. Bien que vous ne soyez pas encore nets de tout reste de péché et que vous soyez entièrement indignes de l'amour de Dieu, si vous êtes réellement justifiés, l’Éternel, le Dieu tout sage et tout puissant, est engagé à mener à bien l'ouvre de votre salut.
Comment donc pourriez-vous craindre encore et vous laisser aller au découragement ?
Si un gouvernement humain pardonne à un criminel, il est tenu dès lors de le protéger comme tout autre citoyen, exactement comme s'il n'avait jamais commis aucun crime. Il en est de même quand Dieu a justifié un pécheur. L'apôtre Paul dit : « Étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu (Romains 5 v. 1) ». Dieu est donc de notre côté, engagé envers nous, lié à nous comme notre fidèle et éternel Ami.
Si nous étions justifiés par la loi, cette justification ne durerait pas plus que notre innocence. Dès que nous aurions commis une seule transgression, notre précédente justification ne nous servirait plus de rien. Mais sous le régime de la justification évangélique, il n'en est pas ainsi : « Si nous avons péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste (1 Jean 2 v. 1) ».
Par cette justification nous sommes placés dans une relation avec Dieu qui est entièrement nouvelle. Le pécheur n'est plus sous l'alliance des œuvres (1), il est sous l'alliance de grâce. Ce n'est plus sous la condition d'une obéissance absolue qu'il conserve la faveur de Dieu ; s'il pèche, il n'est pas remis sous la loi, il reste au bénéfice de la Nouvelle Alliance. S'il est réellement justifié par la foi et devenu enfant de Dieu, il est traité comme un enfant ; il est corrigé, humilié, relevé ; car « les dons et l'appel de Dieu sont sans repentance (Romains 11 v. 29) ». Cela ne veut pas dire que Dieu appelle et sauve le pécheur sans qu'il se repente, mais que Dieu ne change jamais d'intention quand il a commencé l’œuvre du salut dans une âme.
(1) S'il y a été, c'est qu'il s'y est mis lui-même (Note du traducteur).
Je sais que cette doctrine est regardée par plusieurs comme très dangereuse. « Persuader aux pécheurs qu'ils sont justifiés définitivement et pour toujours, nous dit-on, mais c'est encourager les gens à pécher ! En vérité, quand un homme s'est repenti du péché, quand il y a renoncé de tout son cœur, quand il ne désire rien autant que d'en être affranchi, lui dire que Dieu l'aidera et lui donnera certainement la victoire sur le péché, c'est l'encourager à pécher ! Étrange logique que celle-là ! Si cette doctrine encourage un homme à pécher, cela montre seulement que cet homme-là ne s'est jamais repenti ; qu'il n'a jamais haï le péché, jamais aimé Dieu pour lui-même, que sa repentance a été fausse et que s'il a aimé Dieu ce n'a été que d'un amour égoïste, parce qu'il espérait recevoir de Dieu quelque faveur. En effet, si jamais il avait haï véritablement le péché, la pensée que malgré toute son indignité, Dieu le recevait comme son enfant et voulait le traiter comme tel, est précisément ce qui lui aurait transpercé le cœur. La vue de cette bonté paternelle si longtemps méconnue et outragée l'aurait humilié jusque dans la poussière et rempli de la tristesse la plus vive. Oh ! Combien souvent l'enfant de Dieu ne fond-il pas en larmes, en adorant cette bonté de Dieu qui, alors qu'il s'égarait, usait de tous les moyens pour le ramener au bien, au lieu de l'envoyer en enfer comme il le méritait !
6. La justification par la foi nous met au bénéfice de la discipline de l'alliance de grâce.
Dieu a promis d'user de cette discipline et de ramener à lui, par son moyen, ceux de ses enfants qui s'égareraient. Dans le Psaumes 89, parlant de la postérité de David, c'est-à-dire de celle de Christ, il dit : « Si ses fils abandonnent, ma loi et ne marchent pas selon mes ordonnances, s'ils violent mes préceptes et n'observent pas mes commandements, je punirai de la verge leurs transgressions, et par des coups leurs iniquités ; mais je ne lui retirerai point ma bonté et je ne trahirai ma fidélité, je ne violerai point mon alliance et je ne changerai pas ce qui est sorti de mes lèvres ».
Vous voyez donc que, lorsqu'ils s'écartent du droit chemin, les chrétiens peuvent toujours s'attendre à être visités plus promptement par les jugements de Dieu que les impénitents. Ceux-ci peuvent s'engraisser dans les richesses, être exempts d'angoisse jusqu'à leur mort, et cela conformément aux principes du gouvernement divin. Mais qu'un enfant de Dieu oublie son Père céleste, qu'il recherche les richesses ou tout autre bien de ce monde, Dieu le frappera de sa verge, c'est aussi certain qu'il est certain que Dieu est son Père. Et quand il aura été frappé, il dira comme le Psalmiste :
« Il est bon pour moi d'avoir été affligé, afin que j'apprisse statuts. Avant que je fusse affligé, je m'égarais ; mais maintenant j'observe ta parole (Psaumes 119 v. 71 et 72) ». Quelques-uns d'entre vous peut-être, mes bien-aimés, savent ce que c'est que d'être affligés de cette façon, et ils savent que c'est pour leur bien qu'ils l'ont été.
7. La justification évangélique assure la sanctification.
Elle assure non seulement les moyens de la sanctification, mais encore son accomplissement actuel, de sorte que celui qui est véritablement converti, persévérera certainement dans l'obéissance jusqu'à ce qu'il soit actuellement sauvé et prêt, pour le ciel.
V. La justification évangélique, dont je viens de décrire les effets, s'obtient par la foi.
La foi est le moyen par lequel elle nous est communiquée. La preuve en est dans la Bible. Notre texte le déclare expressément : « Sachant que ce n'est pas par les œuvres de la loi que l'homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons cru en Jésus-Christ, afin d'être justifiés par la foi en Christ et non par les œuvres de la loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par les œuvres de la loi (Galates 2 v. 16) ». Ce sujet revient trop souvent dans le Nouveau Testament pour qu'il soit nécessaire d'en parler davantage.
VI. Je désire maintenant répondre à quelques questions que notre sujet peut faire naître dans vos esprits.
1. Pourquoi la justification est-elle dite « par la foi, », plutôt que par la repentance, l'amour ou quelque autre grâce ?
Il n'est dit nulle part que le croyant est justifié ou sauvé pour sa foi qui deviendrait ainsi le fondement de son pardon ; il est dit seulement qu'il est justifié par la foi, la foi étant le moyen ou l'instrument de la justification. Si l'on demande pourquoi c'est la foi qui est désignée comme le moyen de la justification plutôt que toute autre activité de notre esprit, il faut répondre que c'est à cause de la nature et des effets de la foi. Aucune autre opération de l'esprit ne peut être désignée ici.
Qu'est-ce que la foi ? C'est cette confiance en Dieu qui nous conduit à l'aimer et à lui obéir. Nous sommes donc justifiés par la foi parce que nous sommes sanctifiés par la foi. La foi est l'instrument désigné de notre justification parce qu'elle est l'instrument naturel de notre sanctification. Elle est le moyen par lequel nous revenons à l'obéissance, c'est pourquoi elle est aussi le moyen par lequel nous obtenons les bénédictions assurées à quiconque revient à Dieu.
Elle nous est imputée, non arbitrairement pour ce qu'elle n'est pas, mais pour ce qu'elle est, à savoir le principe de toute véritable obéissance. Elle est la condition du pardon, parce que seule elle nous rend capables d'offrir à Dieu l'obéissance de l'amour. Nos péchés sont pardonnés à cause de Christ. Mais c'est notre devoir de nous repentir et, d'obéir à Dieu ; et, si nous le faisons, cette repentance et cette obéissance nous sont imputées pour ce qu'elles sont véritablement.
Quant au pardon de nos péchés passés, nous devons placer en Jésus-Christ toute notre confiance, c'est pour cela que la justification est dite par la foi en Jésus-Christ.
2. Une question qui a une grande importance est celle-ci : « Qu'est-ce que la foi justifiante ? » ou : « Que dois-je croire pour être sauvé ? »
La foi justifiante ne consiste pas à croire que vos péchés sont pardonnés. S'il vous était nécessaire de croire cela pour être justifié, il vous faudrait le croire avant que cela fût vrai, c'est-à-dire qu'il vous faudrait croire une fausseté. Rappelez-vous que vos péchés restent non pardonnés jusqu'à ce que vous croyiez. Et vous ne pouvez pas croire qu'ils sont pardonnés avant d'en avoir la preuve. Or cette preuve ne peut être acquise que lorsque la chose est vraie, c'est-à-dire lorsque vous avez la foi qui sauve. Cette foi qui sauve consiste donc à croire autre chose que le fait du pardon de vos péchés.
De même, la foi qui sauve ne consiste pas du tout à croire que vous serez sauvés. Vous n'avez aucun droit de croire que vous serez sauvés jusqu'à ce que vous ayez fait l'acte de foi qui sauve.
Cet acte consiste à croire l'expiation de Jésus-Christ, ou le témoignage que Dieu a rendu de son Fils. On a mis en doute l'exactitude de cette définition ; et je confesse qu'ici mes vues ont subi un changement.
Il est dit qu'Abraham « crut Dieu » et que cela lui fut imputé à justice. Or, que crut Abraham ? Il crut qu'il aurait un fils. Mais, ne crut-il que cela ? Nullement ! Sa foi embrassait la grande bénédiction qui devait résulter du don de ce fils ; il crut que le Messie, le Sauveur du monde, le Désiré des nations, naîtrait dans sa postérité. C'était là l'objet principal de l'alliance conclue, entre Dieu et lui. La foi d'Abraham était donc la foi en Christ. L'apôtre Paul montre dans le 3ème chapitre de l'épître aux Galates que le résumé de la promesse faite à Abraham est compris dans cette parole : « En toi seront bénies toutes les nations ». Et, au v. 16 de ce même chapitre, il dit : « Les promesses ont été faites à Abraham et à sa postérité ». Il ne dit pas : « ...et à tes postérités », comme s'il parlait de plusieurs, mais comme parlant d'une seule : « Et à ta postérité, qui est le Christ (Galates 3 v. 16) ».
On dit que dans le chapitre XIe de l'épître aux Hébreux les saints ne sont pas tous présentés comme ayant eu la foi en Christ. Mais si vous voulez examiner avec soin ce qui en est, vous verrez que cette foi a toujours été impliquée dans la leur. Voyez, par exemple, ce qui est dit d'Abel : « C'est par la foi qu'Abel offrit à Dieu un sacrifice plus excellent que celui de Caïn ; c'est par elle qu'il fut déclaré juste, Dieu approuvant ses offrandes ; et c'est par elle qu'il parle encore, quoique mort (Hébreux 11 v. 4) ».
Pourquoi son sacrifice fut-il plus excellent que celui de Caïn ? Parce qu'en offrant des premiers nés de son troupeau, il reconnut la nécessité de l'expiation et que « sans effusion de sang, il n'y a pas de rémission des péchés (Hébreux 9 v. 22) ». Caïn ne fut qu'un orgueilleux incrédule offrant des fruits de la terre comme pur sacrifice d'actions de grâces pour les bienfaits de la Providence, n'admettant pas qu'il soit un pécheur et qu'il eût besoin d'un sacrifice expiatoire pour lui acquérir le pardon de Dieu.
Quelques-uns pensent que l'on peut avoir la foi qui justifie, tout en niant la divinité et l'expiation de Jésus-Christ. Il n'en est rien. Tout dans la révélation converge vers Jésus-Christ, tout s'y résume en lui, en sa divinité, en son expiation. Tout ce que les prophètes et les autres écrivains de l'Ancien Testament nous disent du salut se rapporte à lui ; tous les types de l'Ancien et du Nouveau Testament n'ont d'autre signification que lui.
La foi des saints de l'Ancienne Alliance était la foi au Messie à venir, celle des saints de la Nouvelle Alliance est la foi au Messie déjà venu : Dans le 15ème chapitre de la première épître aux Corinthiens, l'apôtre Paul montre quelle place il assignait à l'expiation de Christ : « Je vous ai enseigné avant tout, dit-il, comme je l'avais aussi reçu, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures ; qu'il a été enseveli, et qu'il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures ». Remarquez cette expression : «... je vous ai enseigné avant tout » ; elle montre que Paul prêchait Christ mort pour les pécheurs, comme la principale doctrine de l’Évangile. Et d'un bout de la Bible à l'autre, nous voyons que l'attention du lecteur est dirigée vers ce chemin vivant qui seul conduit au salut. Christ mort pour les pécheurs est la seule vérité qui puisse sanctifier ; l'on peut croire mille autres choses ; mais la foi en Christ dans lequel Dieu a réconcilié le monde avec soi, est seule la foi qui justifie.
3. Une troisième question fréquemment soulevée est : « À quel moment est-on justifié ? »
Je réponds : On est justifié au moment même où l'on croit en Christ d'une foi qui opère par l'amour. Vous qui n'êtes pas réconciliés avec Dieu, vous n'êtes pas obligés de rester sous la colère de Dieu un seul instant de plus ; vous pouvez être justifiés ici, immédiatement, si seulement vous voulez vous confier en Christ. Votre pardon est déjà prêt, scellé du grand sceau de Dieu ; le nom seul est en blanc ; pour écrire votre nom à cette place, pour vous accorder un gracieux pardon, Dieu attend seulement que par un acte de foi vous receviez Jésus-Christ tel qu'il vous est présenté dans l’Évangile.
4. Une quatrième question est celle-ci : « Comment savoir si je suis justifié ? »
Je réponds : Vous ne pouvez le savoir que par voie d'induction. Dieu n'a pas révélé dans les Écritures que vous ou tel autre individu étiez justifié ; il a indiqué les caractères du chrétien, et il a déclaré que tous ceux qui portent ces caractères-là sont justifiés.
A. Avez-vous le témoignage du Saint-Esprit ? Tous ceux qui sont justifiés l'ont ; ils ont reçu le Saint-Esprit qui leur donne le vrai sens des Écritures et qui les conduit au Fils et au Père, leur révélant l'un et l'autre. Si vous avez ce témoignage, vous êtes justifié ; si vous ne l'avez pas, vous êtes encore dans vos péchés.
B. Avez-vous les fruits de l'Esprit ? « Ces fruits sont l'amour, la joie, la paix, » etc. Quand on les a, on en a conscience. Si vous les avez, vous êtes justifié.
C. Avez-vous la paix avec Dieu ? L'apôtre Paul dit : « Étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu ». Jésus dit à ses disciples : « Je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne (Jean 14 v. 27) ». Et encore : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai le repos (Matthieu 11 v. 28) ». Avez-vous trouvé le repos en Christ ? Votre paix est-elle semblable à un fleuve qui coule doucement au travers de votre âme, vous remplissant d'un calme et d'une félicité célestes ? Ou avez-vous plutôt le sentiment de la condamnation de Dieu ?
Avez-vous conscience que vous êtes reçu en grâce, que vos péchés sont pardonnés et que vous avez communion avec Dieu ? Si cela est, cela doit être pour vous un fait, d'expérience. Ne vous imaginez pas que vous puissiez être dans l'état de justification sans en avoir le témoignage.
La paix, il est vrai, peut remplir votre âme sans que cependant vous tiriez la conclusion que vous êtes justifié. Je me rappelle le temps où mon cœur était rempli d'une paix si délicieuse que la nature entière me semblait faire silence pour écouter la voix de Dieu ; je ne savais cependant pas que ce fût la paix de Dieu et que je fusse réellement justifié. Loin de là, car voyant que j'avais perdu ma conviction de péché, je cherchais à la ramener en moi. Je n'eus l'idée que j'étais justifié que lorsque l'amour de Dieu fut répandu dans mon cœur par le Saint-Esprit en une telle abondance que je fus obligé de m'écrier : « Assez, Seigneur, je n'en puis porter davantage ». Je ne crois pas que le sentiment de la condamnation puisse subsister là où le pardon de Dieu est réel.
D. Avez-vous l'esprit d'adoption ? Si vous êtes justifié, vous êtes adopté comme enfant de Dieu ; Dieu met son esprit dans votre cœur et vous vous écriez tout naturellement : « Abba ! Père ! » Dieu vous apparaît, en effet, comme un Père et vous avez besoin de l'appeler du nom de Père. Connaissez-vous quelque chose de cela ? Autre chose est d'appeler Dieu du nom de Père, autre chose d'avoir pour lui un sentiment vraiment Si vous avez l'esprit d'adoption, c'est une preuve que vous êtes actuellement justifié.
Remarques
1. Mes chers auditeurs, je voudrais pouvoir demander à chacun de vous en particulier s'il est justifié. En avez-vous la preuve ? Oseriez-vous comparaître devant Dieu en cet instant ? Si les sons éclatants de la dernière trompette ébranlaient maintenant l'Univers, et que vous vissiez apparaître le Fils de Dieu venant pour juger les nations, seriez-vous prêt à comparaître devant Lui ? Pourriez-vous élever avec tranquillité vos regards vers le ciel et dire : « Ce moment est solennel, mais Jésus-Christ est mort pour moi, Dieu m'a justifié, qui me condamnera ? »
2. Si vous croyez avoir été justifié autrefois et qu'actuellement vous n'ayez pas le témoignage intérieur d'être en état de grâce, je vous ferai une question : « Êtes-vous sous la discipline de l'alliance de grâce ? » Si vous n'y êtes pas, quelle raison auriez-vous de croire que vous avez jamais été justifié ? Pour celui qui appartient à Christ, l'alliance que Dieu a traitée avec lui renferme cette condition : « S'il rétrograde, je punirai de la verge ses transgressions (Psaume 89 v. 32) ». Si donc vous ne marchez pas avec Dieu et que vous ne soyez pas châtié, vous n'avez aucune raison de croire que vous êtes enfant de Dieu.
Ceux d'entre vous qui ont la preuve qu'ils ont été justifiés doivent maintenir la relation avec Dieu dans laquelle leur justification les a placés ; ils doivent vivre à la hauteur des privilèges qu'elle leur a acquis. Ce point est d'une très grande importance. Il n'y a aucune vertu à être méfiant, craintif, plein de doutes. Une des raisons pour lesquelles beaucoup de chrétiens ne croissent pas dans la grâce, c'est qu'ils craignent de réclamer les privilèges d'enfants de Dieu qui leur appartiennent. Soyez-en certains, mes bien-aimés, il n'y a là aucune véritable humilité ; cette crainte n'est, au contraire qu'une criminelle incrédulité.
Si vous avez la preuve que vous êtes justifié, prévalez-vous en pour rechercher la pureté intérieure ; venez à Dieu avec toute la hardiesse que pourrait avoir un ange et comprenez combien vous êtes près de son cœur. C'est là votre devoir. Pourquoi vous tiendriez-vous en arrière ? Pourquoi craindriez-vous de reconnaître toute l'étendue de l'alliance de grâce ? Tous les biens de la maison paternelle sont à votre disposition. Convertis, justifiés, réintégrés dans la famille de Dieu, vous craindriez encore de vous asseoir à la table du Père ! N'alléguez pas que vous êtes « si indignes », une telle excuse n'est que propre justice et incrédulité.
C'est vrai, vous êtes très indignes ; mais si vous êtes justifiés, ce n'est plus une barrière entre vous et Dieu. Votre devoir est maintenant de saisir les promesses qui vous appartiennent. Prenez chacune des promesses bibliques qui vous concernent, portez-la à votre Père, réclamez-en l'accomplissement, et croyez que Dieu vous exauce. Pensez-vous que Dieu veuille méconnaître ses engagements ? « Les très grandes et précieuses promesses » vous ont été données dans le but exprès que vous « deveniez participants de la nature divine ». Pourquoi douter encore ? Venez donc, mes bien-aimés approchez-vous, saisissez l'amour, la paix, la joie que vous offre l’Évangile.
4. Si vous n'êtes pas dans l'état de justification, vous n'êtes rien, quels que soient les travaux que vous ayez pu accomplir et quelles qu'aient pu être vos prières et vos souffrances. Vous avez pu être des semaines, des mois, même des années, dans l'angoisse et la détresse, soupirant et gémissant, et cependant, si vous n'êtes pas actuellement justifiés, vous êtes toujours dans un fiel amer, sous la condamnation de la loi et sous la colère de Dieu.
Mes chers auditeurs, si vous êtes maintenant sous la colère de Dieu, croyez en Christ. Tous vos retards et vos gémissements ne vous approcheront pas d'une ligne plus près de Dieu. Me direz-vous que vous avez besoin d'une plus grande conviction de péché ? Je vous répondrai : « Venez à Christ maintenant ». Me direz-vous que vous devez attendre d'avoir prié, davantage ? Je vous demanderai à quoi peut servir de prier dans l'incrédulité.
La prière d'un rebelle condamné à mort, peut-elle avoir quelque efficacité, à moins que ce ne soit la prière de la repentance et de la foi ? Direz-vous que vous êtes « si indigne ? » Christ est mort pour ceux qui sont tels. Il vient droit à vous maintenant. Où êtes-vous assis ? Quel est ici le pécheur auquel s'adressent mes paroles ? Pécheurs, il n'y a pas de bonne raison pour attendre. Il n'est nullement nécessaire que vous rentriez dans votre demeure en gardant ce lourd fardeau sur votre cœur. C'est maintenant le jour de salut. Écoutez Parole de Dieu : « Si tu crois dans ton cœur au Seigneur Jésus-Christ et que tu confesses de ta bouche que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé (Romains 10 v. 9) ».
Demanderez-vous encore : Que dois-je croire ? Croyez ce que Dieu dit de son Fils. Attachez-vous à quelqu'une de ces vérités fondamentales que Dieu a révélées concernant la voie du salut ; appuyez votre âme sur elle, et vous serez sauvé. Ne voulez-vous pas vous abandonner maintenant au Seigneur Jésus-Christ ? N'avez-vous pas assez de confiance en lui pour vous remettre entre ses mains, afin qu'il dispose de votre corps et de votre âme comme il l'entendra, pour le temps et pour l'éternité ? Ne pouvez-vous pas lui dire : « Seigneur, je me donne à toi ».
« C'est tout ce que je puis faire ? »
Peut-être essayez-vous, avant d'aller au Sauveur, de vous tirer par vos prières des difficultés qui vous retiennent. Cela ne vous servira de rien. Jetez-vous maintenant aux pieds de Christ, remettez votre âme entre ses mains. Dites-lui « Seigneur, je me donne à toi ; dispose de moi comme tu voudras pour ta propre gloire ; je sais que tu feras tout parfaitement bien, et c'est tout ce que je désire ». Ne voulez-vous pas le lui dire en cet instant ?
Un message de Charles Finney
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