Changer le vin en eau
Comment changer le vin en eau - Le « christianisme progressiste » veut élargir le champ du divin, et demande au christianisme traditionnel de cesser de prétendre détenir toute la vérité.
Né en 1996, le « christianisme progressiste » est un mouvement post-libéral de la pensée chrétienne qui compte aujourd’hui des millions d’adeptes notamment aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Nouvelle Zélande. On pourrait parler de « néo-christianisme », parce qu’il se veut un prolongement et une amélioration du christianisme des origines. Il se caractérise par une volonté de réformer le christianisme, pour redéfinir ses fondements et ses expressions, en relation avec l’époque moderne. Il pense que la théologie devrait être en constante évolution.
On se souvient à ce propos que plusieurs personnes avaient déclaré avoir reçu en 2002 une prophétie dans laquelle Jésus lui-même parlait et disait : « Je vais changer la compréhension et l’expression du christianisme en une seule génération » (aux États-Unis, Mike Bickle dans le mouvement de la NRA (Nouvelle Réforme Apostolique), ainsi que Heidi Baker, et dans la francophonie, sans rapport avec la NRA, Patrick Fontaine).
Ce que ces personnes ont déduit, c’est que quelque chose de grand allait se passer : on a beaucoup parlé d’un réveil mondial, avec un déploiement de puissance supérieure au réveil de Pentecôte, qui sonnerait la fin des structures religieuses sclérosées par l’humain. Devait s’ensuivre l’avènement d’une nouvelle église selon le cœur de Dieu.
Pour le moment, 20 ans après, il ne semble pas que cette espérance ait vraiment pris forme. La discussion est ouverte évidemment sur l’interprétation d’une génération (Hébreux 3 v. 10 semble plaider pour une durée de 40 ans). En revanche, durant ces 20 années, l’apostasie de l’Occident s’est accentuée. À sa manière, le néo-christianisme dont parle ce présent article, contribue assez bien à « une transformation de la compréhension et de l’expression du christianisme », dans le sens qu’il est moteur d’une dynamique qu’il prétend être un progrès. Selon un autre point de vue, il est plutôt le moteur d’un appauvrissement : l’original changeait l’eau en vin, et là, à force de dénaturer le modèle, on change le vin en eau.
Un produit religieux adapté à un nouveau public.
Le mouvement du « christianisme progressiste » s’adresse aux personnes qui considèrent la religion organisée comme inefficace, non pertinente ou répressive à l’égard des personnes qui ne connaissent pas le christianisme ou qui sont exclus et condamnés par leurs péchés. Les préoccupations du féminisme radical (= d’inspiration queer) ont par exemple une influence très forte sur le mouvement, qui se caractérise par une volonté de remettre en question la tradition, de pousser à l’acceptation de la diversité humaine (y compris les genres transformés), avec une forte emphase sur la justice sociale et la prise en charge des pauvres et des opprimés, ainsi que la gestion environnementale de la terre. Un fort accent est placé sur la promotion de valeurs telles que la compassion, la justice, la miséricorde et la tolérance, souvent à travers l’activisme politique.
Du point de vue des adeptes de ce néo-christianisme, il est nécessaire et urgent d’adapter le christianisme aux mutations modernes de la société : prendre le meilleur (constitué par des principes de tolérance, d’amour et de paix) et écarter, rejeter tout ce qui peut générer le rejet de qui que ce soit.
Le néo-christianisme aime le message d’amour de Jésus, pour une société unie, tout en estimant que cette belle vision ne peut pas devenir réalité si on n’accepte pas tout le monde, avec toutes les différences, afin que nouvelle société repose, selon lui, sur le fondement de l’amour.
Les 8 commandements du mouvement chrétien progressiste.
Extraits originaux.
1. « Nous croyons que suivre le chemin du maître Jésus peut conduire à la guérison et à la plénitude, à une connexion mystique avec « Dieu », ainsi qu’à une prise de conscience et une expérience non seulement du Sacré, mais aussi de l’Unité et de l’unicité de toute vie »
Commentaire du Sarment : au beau milieu d’une phrase faite pour ratisser large, dans une rhétorique typiquement New Age, le christianisme progressiste honore Jésus en faisant de lui un maître à penser, un enseignant, un conducteur, mais en occultant la dimension biblique du Fils de Dieu. On veut bien reconnaître que le Jésus des évangiles dit des choses très fortes, et prône des valeurs importantes, mais ce n’est pas/plus Celui qui est « le Dieu véritable, et la vie éternelle » (1 Jean 5 v. 20). Dans le néo-christianisme, Jésus est bien présent, mais il n’est pas divin : il n’est qu’un instrument pour l’élévation du croyant, pour l’accomplissement de l’humain. Il n’est ni l’alpha, ni l’omega.
Nous sommes donc davantage dans une mystique universaliste, dans laquelle « Dieu » n’a pas de nom et n’appartient à personne. On peut lui donner le nom qu’on veut. Le néo-christianisme inclut les autres religions comme détenant leur part de vérité, puisqu’elles ont toutes vocation à relier au divin (religio = relier). Des millions de chrétiens rejoignent cette vision.
2. « Nous affirmons que les enseignements de Jésus ne sont qu’une des nombreuses façons de faire l’expérience de « Dieu », du caractère sacré, de l’unité et de la vie, et que nous pouvons puiser dans diverses sources de sagesse, y compris la Terre, dans notre voyage spirituel »
Commentaire du Sarment : Le « christianisme progressiste » veut élargir le champ du divin, et demande au christianisme traditionnel de cesser de prétendre détenir toute la vérité — ce qui est très orgueilleux, comme l’affirme ici une charge contre les bibliolâtres — car le radicalisme biblique (ou fondamentalisme) marginalise tous les autres. La Bible ne peut donc plus être l’héritage de la révélation divine, et Jésus n’est forcément pas « le chemin, la vérité et la vie » (Jean 14 v. 6).
L’unité du monde selon le néo-christianisme impose la nécessité de rompre avec le christianisme des origines qui prétend contenir la vérité absolue, révéler le Dieu unique, et qui affirme que tous les autres dieux sont de faux dieux.
C’est donc bien une théologie universaliste qu’il cherche à construire (qui va englober toutes les sagesses, toutes les religions, toutes les vérités, toutes les voies : c’est sa vision de l’unité). « Dieu » est systématiquement entre guillemets, ce qui permet d’en faire un nom commun.
Le néo-chrétien n’est finalement pas si différent d’un adepte du New Age, qui aime le sacré, le surnaturel, la vie, la terre, le guide intérieur, l’harmonie avec le cosmos et avec les énergies qui y circulent, au-dessus desquelles plane une puissance éthérée et impersonnelle. Le néo-chrétien ne se reconnaît dans aucune religion.
3. « Nous recherchons et créons une communauté qui inclut TOUTES les personnes, sans restriction :
Les chrétiens conventionnels et les sceptiques interrogatifs,
Les croyants et les agnostiques,
Les personnes de toutes races, cultures et nationalités.
Ceux de toutes les orientations sexuelles et de toutes les identités de genre,
Ceux de toutes les classes et capacités,
Les personnes historiquement marginalisées,
Toutes les créatures et la vie végétale ; »
Commentaire du Sarment: Le grand mot de la société post-moderne, c’est « l’inclusion ». Que signifie-t-il ? Que c’est la société qui doit s’adapter aux individus, à toutes leurs lubies et leurs libertés, pour les légitimer (les normaliser) et non le contraire comme c’était le cas jusqu’alors, avec une Parole et une règle qui venait d’en-haut. Avec la déchristianisation qui opère dans les sociétés occidentales depuis plusieurs décennies, et qui accélère, nous sommes entrés dans « la société de la parole et de la règle qui vient d’en bas ». On notera au passage que l’étymologie du nom grec de « Laodicée » pourrait être « la justice vient du peuple », qui signifie que la vérité vient du peuple (et plus de Dieu). Pas étonnant d’assister à l’explosion du populisme qui consiste à parler le langage du peuple, à lui dire ce qu’il veut entendre, accompagné de l’incitation à la rébellion au travers du concept de la désobéissance civile.
Le concept de l’inclusion va plus loin que celui de la tolérance : il contraint d’intégrer toutes les sortes de personnes citées dans la liste de l’article 3, devenant un appui et un canal LGBTQ- pour s’insinuer dans le christianisme, au moyen de « son » Jésus, et le pousser à la réforme morale, selon les critères de l’esprit du monde. La doctrine de l’inclusion veut une société (et une église, un christianisme) qui se contraint lui-même de ne plus exclure au motif du péché.
Le « christianisme progressiste » inclusif obéit à l’injonction de l’esprit du siècle, qui exige que le péché disparaisse, ou alors qu’il puisse se tenir sur le même pied d’égalité que la sainteté. Tout ça est effectivement de nature à changer le compréhension et l’expression du christianisme, et on comprend que ça ne prend pas la bonne direction. Dans sa redéfinition de l’humain, le néo-christianisme considère que par défaut, chaque homme et chaque femme est un enfant de Dieu, qui a Dieu en lui : il suffit d’apprendre à communiquer avec lui (ce qui est faux et fera l’objet d’un article suivant). Dans la conception néo-chrétienne du monde, il n’y a pas besoin d’un Sauveur, puisque personne n’est perdu.
Mark Sayers décrit la vision chrétienne-progressiste du monde comme « le royaume sans le roi » : nous voulons toutes les bénédictions de Dieu, sans nous soumettre à son autorité et à son règne d’amour. Nous voulons le progrès — sans sa présence. Nous voulons la justice — sans sa justification. Nous voulons les implications horizontales de l’évangile pour la société, sans la réconciliation verticale des pécheurs avec Dieu. Nous voulons que la société se conforme à notre norme morale — sans la norme divine de sainteté personnelle.
4. « Nous savons que la façon dont nous nous comportons les uns envers les autres et envers la Terre est l’expression la plus complète de ce que nous croyons, par conséquent, nous nous engageons à marcher comme Jésus aurait pu marcher dans ce monde avec une compassion radicale, l’inclusion et le courage de confronter et de changer positivement les injustices que nous vivons ainsi que celles que nous voyons les autres expérimenter »
Commentaire du Sarment : L’article 4 parle au plus grand nombre. Ce qu’il faut néanmoins comprendre par « changer les injustices », c’est de combattre contre tout ce qui s’oppose aux libertés individuelles, y compris en faveur des enfants qui veulent changer de sexe, afin que leur désir et leur volonté ne puisse même pas être contredite par leurs parents. L’ensemble de l’article 4 concerne un certain nombre de combats qui sont justes, mais nous devons garder présent à l’esprit que la puissance et l’inspiration du néo-christianisme, c’est l’esprit du siècle.
5. « Nous trouvons la grâce dans la recherche de la compréhension et croyons qu’il y a plus de valeur dans le questionnement avec un esprit et un cœur ouvert, que dans les absolus ou les dogmes »
Commentaire du Sarment : Ici, c’est l’autorité des Écritures et la théologie du christianisme des origines qui sont remis en cause. Ceux qui défendent une vision et une compréhension biblique originelles sont qualifiés de bibliolâtres, croyants fossilisés dans une compréhension d’un autre âge. De la même manière que ceux qui défendent la soumission aux autorités sont considérés comme des complices des gouvernements corrompus, et parfois, des agents de la Bête.
6. Travaillent à la paix et à la justice entre tous les peuples et toutes les formes de vie sur Terre ;
7. Protègent et restaurent l’intégrité de notre Terre et de toute la Création ;
8. S’engagent sur la voie de l’apprentissage tout au long de la vie, de la compassion et de l’amour désintéressé sur ce chemin vers une foi personnellement authentique et significative.
La révélation qui est notre héritage.
Parmi les sept églises pagano-chrétiennes auxquelles sont adressées les lettres d’Apocalypse 2-3, cinq sont menacées, plus ou moins fortement, de perdre leur identité chrétienne. Pourquoi ? parce qu’elles s’éloignaient du christianisme des origines, qui se dénaturait sous la pression de leur époque et de leur contexte socio-culturel.
La révélation-socle du christianisme (l’Ancien Testament) rappelle à de nombreuses reprises au peuple de Dieu de conserver et de transmettre la Parole de Dieu reçue à la génération suivante, ce qui est parfois interprété aujourd’hui comme un abus d’autorité, un conditionnement religieux.
« Mettez dans votre coeur et dans votre âme ces paroles que je vous dis. Vous les lierez comme un signe sur vos mains, et elles seront comme des fronteaux entre vos yeux. Vous les enseignerez à vos enfants, et vous leur en parlerez quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras. Tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes » (Deutéronome 11 v. 18 à 20).
« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n’en retrancherez rien ; mais vous observerez les commandements de l’Éternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris » (Deutéronome 4 v. 2).
« Vous observerez et vous mettrez en pratique toutes les choses que je vous ordonne; vous n’y ajouterez rien, et vous n’en retrancherez rien » (Deutéronome 12 v. 32).
On critique la rigidité de la théologie, et son cadre étroit, mais Dieu n’est pas complètement étranger au phénomène.
Le Nouveau Testament est encore plus clair :
« Bien-aimés, comme je désirais vivement vous écrire au sujet de notre salut commun, je me suis senti obligé de le faire afin de vous exhorter à combattre pour la foi qui a été transmise aux saints une fois pour toutes. Car il s’est glissé parmi vous certains hommes, dont la condamnation est écrite depuis longtemps, des impies, qui changent la grâce de notre Dieu en dissolution, et qui renient notre seul maître et Seigneur Jésus-Christ » (Jude 1 v. 3 et 4).
« Ne vous conformez pas au siècle présent » (Romains 12 v. 2)
« Car nous ne falsifions point la parole de Dieu, comme font plusieurs ; mais c’est avec sincérité, mais c’est de la part de Dieu, que nous parlons en Christ devant Dieu » (2 Corinthiens 2 v. 17).
« Je le déclare à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre: Si quelqu’un y ajoute quelque chose, Dieu le frappera des fléaux décrits dans ce livre; et si quelqu’un retranche quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l’arbre de la vie et de la ville sainte, décrits dans ce livre » (Apocalypse 22 v. 18 et 19).
Cet avertissement concerne le livre de l’Apocalypse. Mais le fait que cette menace existe prouve que Dieu protégera et défendra la révélation contenue dans sa Parole, dans un positionnement très éloigné de la vision d’un Dieu hyper-tolérant, et qui a accompli sa pleine maturation en laissant derrière lui (et derrière l’humanité) son époque légaliste. Ça, c’est le Dieu du « christianisme progressiste ».
« Je m’étonne de ce que vous vous détourniez si promptement de celui qui vous a appelés par la Grâce de Christ, pour passer à un autre évangile ; non pas qu’il existe un autre évangile, mais il y a des gens qui vous troublent, et qui veulent altérer l’évangile de Christ » (Galates 1 v. 6 et 7). Paul annonçait une vérité révélée de la perdition et du salut : la vérité absolue.
Aujourd’hui, des millions de chrétiens se revendiquent d’un christianisme honorant Jésus d’une certaine manière, mais en lui retirant son statut divin : c’est « un autre évangile », sans le Dieu véritable et la vie éternelle. C’est le résultat d’un exploit spirituel aussi grand que celui accompli en Eden, et qui provoqua la chute de l’humanité. Quelque chose de très proche.
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