La vie plus profonde.4
Comment être rempli de l’Esprit ? - Presque tous les chrétiens veulent être « pleins de l’Esprit ». Mais peu veulent se soumettre à l’action du remplissage.
Presque tous les chrétiens veulent être « pleins de l’Esprit ». Mais peu veulent se soumettre à l’action du remplissage. Mais comment un chrétien peut-il connaître la plénitude de l’Esprit, s’il n’a fait auparavant l’expérience d’être rempli ? Il serait cependant inutile de dire à quelqu’un comment il peut être rempli de l’Esprit, s’il n’admet d’abord qu’il peut l’être. Personne ne peut espérer recevoir une chose de Dieu, s’il n’est convaincu que c’est là ce que Dieu veut pour lui, et ceci dans le cadre des promesses bibliques.
Pour que la question : « Comment puis-je être rempli ? », ait quelque validité, celui qui soupire après Dieu doit être sûr que l’expérience de remplissage est réellement possible. L’homme qui n’en est pas sûr ne peut pas avoir de raison de s’attendre à cette bénédiction. Là où il n’y a pas d’attente, il ne peut y avoir de foi, et là où il n’y a pas de foi, la recherche est dénuée de sens.
La doctrine de l’Esprit dans sa relation avec le croyant, a été, au cours des cinquante dernières années, enveloppée dans un brouillard comme une montagne dans la tempête. Un monde de confusion a voilé cette vérité.
On a enseigné aux enfants de Dieu des doctrines contradictoires à partir des mêmes textes ; on les a tellement avertis, menacés, intimidés qu’ils reculent instinctivement devant toute mention de l’enseignement biblique sur le Saint-Esprit.
Cette confusion n’est pas survenue par hasard : « C'est un ennemi qui a fait cela » (Matthieu 13 v. 28). Satan sait que la doctrine évangélique sans l’Esprit est aussi mortelle que le « modernisme » ou l’hérésie, et il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour nous empêcher de jouir de notre véritable héritage chrétien.
Une église sans l’Esprit est aussi impuissante qu’Israël l’aurait été dans le désert, si la colonne de nuée l’avait abandonné. Le Saint-Esprit est notre colonne de nuée le jour, et notre colonne de feu la nuit. Sans lui, nous ne faisons qu’errer sans but dans le désert.
C’est exactement ce que nous faisons aujourd’hui. Nous nous sommes divisés en petits groupes disparates, chacun courant après un feu-follet ou un ver luisant, avec l’idée fallacieuse que nous suivons la manifestation glorieuse de la présence divine. Il n’est pas seulement désirable que la colonne de feu recommence à briller. C’est une nécessité.
L’Église ne peut avoir la lumière que dans la mesure où elle est pleine de l’Esprit, et elle ne peut être pleine de l’Esprit que si les membres qui la composent, le sont individuellement. De plus, personne ne peut être rempli s’il n’est convaincu que cela fait partie du plan total de la Rédemption ; que ce n’est rien d’ajouté, de supplémentaire, rien d’étranger ou de bizarre, mais une action normale et spirituelle de Dieu, dont la base et la source sont l’œuvre expiatoire du Christ.
Le chercheur doit en être sûr au point d’être convaincu. Il doit croire que tout cela est normal et bon. Il doit croire que Dieu veut qu’il soit oint de la corne d’huile fraîche, au-delà et en plus des dix mille bénédictions qu’il a pu déjà recevoir de la bonne main de Dieu.
Jusqu’à ce qu’il en soit convaincu, je lui recommande de prendre le temps de jeûner, de prier, et de méditer les Écritures. La foi vient de la Parole de Dieu. La suggestion, l’exhortation ou l’effet psychologique produit par le témoignage d’autres chrétiens ayant été remplis ne suffira pas.
Tant que les Écritures ne l’ont pas persuadé, il ne doit ni insister, ni se laisser séduire par des manipulateurs d’émotions, décidés à forcer le résultat. Dieu est merveilleusement patient et compréhensif, et il attendra que le cœur lent rejoigne la vérité. En attendant, le chercheur doit être calme et confiant. Au moment voulu, Dieu le guidera au travers du Jourdain. Qu’il ne s’échappe pas pour devancer le temps. Trop de chrétiens l’ont fait au détriment de leur vie chrétienne.
Dès qu’un homme est convaincu qu’il peut être rempli de l’Esprit, il doit ensuite désirer l’être : Alors, je pose ces questions au chercheur intéressé : « Êtes-vous sûr que vous voulez être possédé d’un Esprit qui, tout en étant pur, doux, sage et aimant, revendiquera cependant sa seigneurie sur votre vie ? Êtes-vous bien sûr de désirer que votre personnalité soit prise en charge par celui qui vous demandera l’obéissance à sa Parole écrite ? Qui ne tolérera dans votre vie aucun péché tel que l’amour de soi, l’indulgence envers soi-même ? Qui ne vous permettra ni de vous pavaner ni de vous vanter ? Qui vous ravira la direction de votre vie et se réservera le droit souverain de vous éprouver et de vous discipliner ? Qui vous dépouillera de beaucoup d’objets aimés qui nuisent secrètement à votre âme ? »
Si vous ne pouvez répondre un « oui » empressé à ces questions, vous ne voulez pas être rempli. Vous désirez peut-être l’agréable sensation que procure cette expérience, ou la victoire, ou la puissance, mais vous ne voulez pas vraiment être rempli de l’Esprit. Votre désir n’est guère plus qu’un faible souhait et il n’est pas assez pur pour plaire à Dieu qui exige tout ou rien.
Ensuite, je vous demande : « Êtes-vous sûr que vous avez besoin d’être rempli de l’Esprit ? » Des dizaines de milliers de chrétiens, laïcs, prédicateurs, missionnaires, parviennent à avancer tant bien que mal sans avoir expérimenté, d’une manière précise, le remplissage de l’Esprit. Que ce travail sans l’Esprit ne puisse conduire qu’à une tragédie au jour du Christ, voilà ce que le chrétien moyen semble avoir oublié. Mais qu’en est-il de vous ?
Il se peut que vos tendances doctrinales vous empêchent de croire à cette crise relative à la plénitude de l’Esprit. Très bien ! Regardez au fruit d’une telle doctrine. Que produit votre vie ? Vous accomplissez un travail religieux, vous prêchez, chantez, écrivez, faites de la propagande pour votre organisation, mais quelle est la qualité de votre travail ? C’est vrai, vous avez reçu l’Esprit au moment de votre conversion, mais est-il aussi vrai que vous êtes prêt, sans une nouvelle onction, à résister aux tentations, obéir aux Écritures, comprendre la vérité, vivre victorieusement, mourir en paix et rencontrer le Christ sans honte à sa venue ?
Si, en revanche, votre âme crie à Dieu, au Dieu vivant, et si votre cœur vide et desséché désespère de vivre une vie chrétienne normale sans une nouvelle onction, alors je vous demande : « Est-ce que votre désir vous absorbe entièrement ? Est-ce la plus grande affaire de votre vie ? Est-ce qu’il évacue toutes les activités religieuses ordinaires, et vous remplit d’une soif intense qui n’est rien moins qu’une souffrance ? Si votre cœur s’écrie « oui » à ces questions, vous pourriez alors vous acheminer vers une victoire spirituelle qui transformera toute votre vie ».
Recevoir l’onction de l’Esprit demande une préparation. C’est là que la plupart des chrétiens échouent. Personne n’a probablement jamais été rempli de l’Esprit sans avoir auparavant connu une période de profonde confusion dans son âme. Quand nous discernons que nous entrons dans cet état, nous sommes tentés de nous affoler et de reculer. Satan nous exhorte à ne pas prendre notre recherche trop au sérieux, de peur que nous ne fassions naufrage par rapport à la foi, et que nous ne déshonorions le Seigneur qui nous a rachetés.
Naturellement, il ne se soucie aucunement de nous, ni de notre Seigneur. Son but est de nous garder faibles et désarmés quand un conflit surgit. Et des milliers de croyants acceptent ses mensonges hypocrites, comme paroles d’Évangile, et retournent dans leurs cavernes, comme les prophètes d’Abdias, pour se nourrir de pain et d’eau (1 Rois 18 v. 3). Pour que la plénitude soit possible, le croyant doit connaître le vide de l’âme. Pour que Dieu puisse nous remplir de lui-même, nous devons d’abord être vidés de nous-mêmes. C’est cette évacuation qui provoque la déception douloureuse, et le désespoir de soi, dont tant de personnes se sont plaintes juste avant leur nouvelle expérience si merveilleuse.
Il doit se produire tout à la fois une dépréciation de soi, une mort à toutes choses hors de nous et en nous, ou bien il ne peut jamais y avoir un vrai remplissage du Saint-Esprit.
« Brise l’idole et de ce cœur sois en le maître ».
Nous chantons ce cantique trop facilement et notre prière demeure sans effet, car nous ne voulons pas abandonner l’idole que nous demandons si légèrement à Dieu d’ôter de notre cœur. Abandonner notre dernière idole, c’est nous plonger dans un état de solitude intérieure, à laquelle aucune réunion d’évangélisation, ni aucune communion fraternelle avec d’autres chrétiens, ne peuvent jamais remédier. Pour cette raison, beaucoup de chrétiens ne prennent pas de risque et se contentent d’une vie de compromis. Ils ont un peu de Dieu, bien sûr, mais pas tout, et Dieu a un peu d’eux, mais pas tout. Et ils vivent ainsi des vies tièdes, en essayant de camoufler cette tiédeur par des sourires radieux ; et leur profonde indigence spirituelle, par des refrains entraînants.
Une chose devrait être claire comme du cristal : Le voyage de l’âme dans la nuit profonde n’est pas un voyage méritoire. La souffrance et la solitude ne rendent pas un homme cher au cœur de Dieu, ni ne lui méritent la corne d’huile après laquelle il soupire. Nous ne pouvons rien acheter de Dieu. Nous recevons tout de sa bonté, sur la base du sang expiatoire du Christ, et c’est un don gratuit, sans condition préalable.
Ce qui fait l’angoisse de l’âme, c’est de défoncer la terre en friche, vider le vase, détacher le cœur des intérêts terrestres et concentrer son attention sur Dieu. Tout ce qui s’est passé jusque-là ne fait que préparer l’âme pour l’acte divin de remplissage. Le remplissage lui-même n’est pas une chose compliquée. Bien que dans les choses spirituelles j’aie horreur des formules « comment faire », je crois qu’on peut répondre à la question : « Comment puis-je être rempli ? » Par quatre mots, quatre verbes actifs. Ce sont : capituler ; demander ; obéir ; croire.
Capituler : « Je vous exhorte, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait » (Romains 12 v. 1 et 2).
Demander : « Si, méchants comme vous l’êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent » (Luc 11 v. 13).
Obéir : « Nous sommes témoins de ces choses, de même que le Saint-Esprit que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent » (Actes 5 v. 32). Obéir, complètement et sans murmurer, à la volonté de Dieu est absolument indispensable à la réception de l’onction du Saint-Esprit.
Tandis que nous sommes dans l’attente devant Dieu, nous devons sonder respectueusement les Écritures, et être prêts à entendre la voix douce et subtile de notre Père Céleste, qui nous apprendra ce qu’il attend de nous. Alors, nous confiant en sa puissance, nous devons obéir au mieux de notre capacité et de notre compréhension.
Croire : « Voici seulement ce que je veux apprendre de vous : Est-ce par les œuvres de la loi que vous avez reçu l’Esprit ou par la prédication de la foi ? » (Galates 3 v. 2).
Alors que le remplissage de l’Esprit est reçu par la foi, et seulement par la foi, prenons garde à cette contrefaçon de la foi qui n’est qu’une adhésion intellectuelle à la vérité.
Elle a été une source de grande déception pour des multiples d’âmes en quête de l’Esprit. La foi véritable conduit immanquablement à un témoignage.
Mais quel est ce témoignage ? Ce n’est rien de physique ni d’audible ni de psychique.
L’Esprit ne se confie jamais en la chair. Le seul témoignage qu’il donne est un témoignage subjectif, connu seulement du sujet. Le Saint-Esprit se manifeste dans le for intérieur de l’homme. La chair ne sert de rien, mais le cœur croyant le reconnaît et s’exclame : Saint, Saint, Saint.
Une dernière chose : Ni dans l’Ancien Testament ni dans le Nouveau, ni dans le témoignage chrétien consigné dans les écrits des Saints, à ma connaissance, aucun croyant n’a jamais été rempli du Saint-Esprit sans savoir qu’il l’avait été. Et personne n’a jamais été rempli du Saint-Esprit sans savoir quand il l’a été. Et personne ne l’a jamais été graduellement.
Derrière ces trois arbres, beaucoup de cœurs partagés ont essayé de se cacher, comme Adam, de la présence du Seigneur, mais ce ne sont pas d’assez bonnes cachettes. Le croyant qui ne sait pas quand il a été rempli l’a-t-il jamais été (bien que, naturellement, il soit possible d’en oublier la date) et l’homme qui espère l’être graduellement le sera-t-il jamais ?
J’ai la ferme conviction que la relation du Saint-Esprit au croyant est la question la plus vitale que l’Église affronte aujourd’hui. Les problèmes suscités par l’existentialisme chrétien ou la Néo Orthodoxie ne sont rien en comparaison de ce problème crucial.
L’œcuménisme, les théories eschatologiques, aucune de ces choses ne mérite d’être prise en considération par le croyant, tant qu’il ne s’est pas soumis à cet impératif de la Parole de Dieu : « Soyez remplis de l’Esprit » (Éphésiens 5 v. 18). Alors, il se pourrait bien qu’après avoir été remplis de l’Esprit, nous trouvions, à notre grande joie, que cette plénitude même a résolu pour nous les autres problèmes.
J’ai été crucifié.
« J’ai été crucifié avec Christ ; et si je vis, ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi ; si je vis maintenant dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (Galates 2 v. 20).
C’est le témoignage de Paul, un petit joyau de théologie personnelle au milieu d’une épître qui, elle, n’est pas si magnifique parce que ses correspondants, les Galates, étaient rétrogrades. Mais dans ce verset, Paul dépose un petit diamant.
Remarquez que ce court passage contient un tas de contradictions : « J’ai été crucifié ». Il y a là une contradiction. Celui qui aurait été crucifié ne serait pas là pour le dire. Ou bien il n’a pas été crucifié et il peut parler, ou bien il a été crucifié et il ne peut pas en parler. Mais voici un homme qui disait : « J’ai été crucifié » et qui pourtant l’écrivait de sa main.
Personne n’a jamais dit : « J’ai été pendu », excepté naturellement s’il n’était pas dans son bon sens. Personne n’a jamais dit au docteur : « Docteur, envoyez chercher les pompes funèbres, je suis mort ». S’il n’était pas mort, il ne dirait pas qu’il est mort, et s’il était mort, il ne parlerait pas au docteur. Et cependant, voici un homme qui dit : « J’ai été crucifié ». C’est une contradiction.
Mais, admettons que, par quelque miracle, un homme ait pu dire : « J’ai été crucifié », comme s’il eut parlé depuis l’autre monde à celui-ci. Alors, il se contredit en disant : « et je vis ». S’il a été crucifié, comment pourrait-il vivre ? Le verset dit : « Je vis », et puis se contredit encore par la déclaration : « Ce n’est plus moi qui vis ».
Plus loin, il dit : « Si je vis maintenant dans la chair », moi qui ai été crucifié et qui vis pourtant, mais qui ne suis pas vivant, « si je vis maintenant dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est donné lui-même pour moi ».
J’ai délibérément accentué les apparentes contradictions, non que je crois qu’il y ait des contradictions fondamentales, mais parce que je veux que vous compreniez que vous ne pouvez pas lire superficiellement ce verset comme vous le faites, avec la prière du Seigneur ou le Psaume 23.
Je crois non seulement qu’il signifie quelque chose, mais aussi que nous pouvons le mettre en pratique et le vivre chacun dans notre vie.
Paul dit : « J’ai été crucifié » et il utilise quatorze fois les pronoms personnels. Paul n’a pas peur de parler de son « moi ». « Le moi » est la somme de tout mon être. Le christianisme reconnaît et résout le problème du « moi ». La plupart des écoles de psychologie superficielle d’aujourd’hui, essaient de traiter le problème du « moi » par des tours de passe-passe. Mais le christianisme, lui, le traite en le liquidant définitivement.
Deux « moi » cohabitent dans chaque croyant. D’abord, il y a le « moi » naturel. C’est ce que Paul veut dire quand il écrit : « Moi, mon moi naturel, a été crucifié ». Puis, il y a un autre « moi ». C’est l’homme réel et c’est ce « moi » qui vit maintenant : « J’ai été crucifié, je vis et si je vis, ce n’est pas mon « moi » qui a été crucifié, mais le Christ qui vit en moi ».
Ici, la contradiction n’est qu’apparente. Ce « moi » naturel est l’objet de la juste colère de Dieu. Il est l’essence de tout ce qui est anti-Dieu, et laissez-moi dire simplement que tout ce qui ne passe pas par la crucifixion et la transformation et par une nouvelle création en Christ est anti-Christ. On essaie d’arranger les choses, mais tout ce qui n’est pas avec Christ est contre Christ : « Celui qui n’est pas avec moi est contre moi et celui qui n’est pas avec moi disperse » (Luc 11 v. 23).
On prêche beaucoup la tolérance de nos jours, mais le livre le plus intolérant qui soit dans le monde entier est la Bible, et le Maître le plus intolérant qui ait jamais enseigné publiquement a été le Seigneur Jésus-Christ lui-même. Il y a une différence énorme entre être tolérant et être charitable.
Jésus-Christ était si charitable que son amour embrassait le monde entier, et qu’il s’est donné lui-même pour ceux qui le haïssaient. Mais il était si intolérant qu’il a dit : « Celui qui n’est pas avec moi est contre moi » (Matthieu 12 v. 30). « Si vous ne croyez pas ce que je suis, vous mourrez dans vos péchés » (Jean 8 v. 21). La ligne de démarcation dans l’alternative est si fine et si précise qu’il faut, ou bien se mettre de son côté et vivre, ou bien se mettre de l’autre côté et périr. Il n’y a pas de moyen terme. Il n’y a pas d’équivoques dans l’enseignement de Jésus, pas de juste milieu.
À cet égard, le christianisme règle le problème de mon « moi » par une destruction intolérante et définitive. Dieu prononce une condamnation sévère sur lui. Il le désapprouve absolument et le rejette entièrement et dit que ce « moi » rebelle, ce « moi » anti-Dieu, est plein de péché et est une personnification de la révolte, de la désobéissance et de l’incrédulité. Avec ce « moi », Dieu n’a rien à faire.
Dans le cadre du christianisme, il y a deux positions, correspondant à deux sortes de religions. L’une est que le Seigneur est venu pour m’aider, pour aider mon « moi » et me débarrasser des complexes et des excentricités qui se sont manifestés en moi, parce que ma mère m’a « disputé » quand j’étais petit. L’autre position est que Jésus-Christ est venu en finir avec ce « moi ». Nous ne devons pas l’éduquer ni le polir, mais plutôt y mettre fin, non le cultiver en lui donnant un amour pour Bach, Beethoven ou Léonard de Vinci, mais le liquider. Dans la repentance et le renoncement à soi, et dans l’expulsion de moi-même, je tourne le dos à mon vieux moi et je refuse de faire plus longtemps route avec lui. Je déserte ses rangs et viens rallier le camp de Jésus-Christ. Et dorénavant, je marche sous la bannière de la croix. C’est ainsi que le compte du vieux « moi » est définitivement réglé.
C’est ce que le baptême est censé signifier. Le baptême est un symbole, un signe extérieur, visible, de ce qui est supposé être une réalité intérieure, à savoir que le vieux moi a été répudié et détruit : « J’ai été crucifié avec Christ », plongé dans l’eau, « et maintenant je vis », sorti de l’eau.
Je ne crois pas que nous devions jamais essayer de concilier ces deux positions. Ou bien Jésus-Christ est venu mettre fin au « moi » pour commencer une vie nouvelle, ou bien il est venu rafistoler le vieux moi. Il n’est pas venu faire les deux. Il n’agira pas d’une manière avec les uns et d’une autre manière avec les autres. Il agit de la même manière avec tous les hommes.
Toute la substance de la théologie néo-testamentaire est que le vieux « moi » est complètement dégradé. Ses valeurs sont fausses et sa sagesse est sujette à caution.
En lui, il n’y a rien de bon. Mais en Jésus-Christ, il y a un nouveau « moi », un nouvel homme en Christ. Lui seul doit vivre. Et dorénavant, nous devons nous reconnaître comme morts au péché, et comme vivants pour Dieu en Jésus-Christ.
Le « moi » naturel dresse un inventaire de ce qu’il lui faut. Il espère trouver quelque chose qui le fera échapper à la colère de Dieu, et qui lui rendra Dieu propice, quelque chose qui lui permettra de faire l’œuvre de Dieu d’une manière satisfaisante, et de développer au maximum tout le potentiel de sa nature.
C’est Dieu qui a fait le plan. Nous commençons toute notre existence avec un plan de construction, et je suppose que très peu de gens le réalisent en entier. Nous construisons sur une petite partie du terrain et après quelques années de dur labeur, nous y ajoutons une pièce, mais le plan couvre les quatre coins du terrain.
C’est Dieu qui a fait le plan, et nous, en bâtissant, nous n’arrivons jamais à le réaliser jusqu’au bout, jamais jusqu’au point de l’enrouler pour le ranger en disant : « Ouf ! J’ai érigé le dernier mur, j’ai posé la dernière étagère, j’ai mis la dernière porte sur ses gonds ».
C’est que l’homme recherche en lui-même quelque chose qui le rendra capable de vivre une pleine vie humaine, et une pleine vie chrétienne qui satisfasse Dieu. Quand l’homme regarde dans son propre cœur, qu’y trouve-t-il, en fait ? Il trouve qu’il n’est rien, qu’il n’a rien et qu’il ne peut rien.
La différence entre l’homme instruit et l’homme qui ne l’est pas, est que l’homme instruit sait qu’il y a des choses qu’il ne sait pas. L’oracle déclara que Socrate était l’homme le plus sage de la Grèce, et Socrate expliqua que l’oracle a pu le dire parce qu’il était le seul homme, en Grèce, qui savait qu’il ne savait rien.
Ainsi, le « moi », votre « moi » naturel, dira : « Attention, je suis Suédois ». Bien sûr, c’est une réaction normale. Ou bien : « Je suis italien ». C’est bien, mais votre réaction est aussi normale. Moi, je suis un mélange d’anglais et d’allemand, et je réagis de la même façon. Nous sommes tous les mêmes, indépendamment de nos particularismes raciaux, que nous venions d’Afrique, de l’Inde ou de tout autre pays. Et moi-même, je ne sais rien, je ne peux rien faire.
Mais le nouveau « moi » prend le contrôle de ma vie. Qu’est-ce que le nouveau « moi » possède ? Ah ! mes amis, le nouveau « moi », la nouvelle personne possède le Christ et dit : « Ce n’est plus la vieille personne, l’ignorante, celle qui ne sait rien, ne fait rien, n’est rien. Elle est morte quand j’ai cru en Christ ».
Maintenant, c’est un nouvel homme en Christ Jésus, le Seigneur. Et maintenant, je n’ai pas honte ni peur de dire « moi », parce que quand je dis « moi », je ne veux pas dire « moi », mais le Christ qui vit en moi. Je veux dire le nouvel homme en Christ. Colossiens 1 v. 27 dit : « Christ en nous, l’espérance de la gloire ». Dans Éphésiens 1 v. 6 : « Dieu m’a accordé une grâce en Jésus-Christ » ; dans Colossiens 2 v. 10 : « J’ai tout pleinement en Christ ». Dans la première épître aux Corinthiens 1 v. 30, Paul écrit que « Jésus-Christ a été fait pour nous sagesse, justice, sanctification et rédemption ».
Ainsi, Jésus-Christ est ce qu’il nous faut. Il a ce qu’il nous faut. Il sait ce que nous avons besoin de savoir, ce qu’il peut faire en nous, produisant en nous ce qui est agréable à ses yeux.
Vous dites : « Cela m’exclut entièrement. Alors, où est mon ambition ? Où est ma réputation ? Où est ma renommée ? Que vais-je y gagner ? » Vous gagnez le Christ, la gloire, l’efficacité, le monde à venir et les esprits des justes parvenus à la perfection. Vous gagnez le Christ, l’alliance éternelle, les myriades qui forment les chœurs des anges, l’assemblée des premiers-nés, la nouvelle Jérusalem ; et auparavant, vous avez le privilège de servir les hommes ici-bas.
Voilà ce que vous y gagnez. Mais l’amour de Dieu est trop sage pour vous laisser vous pavaner et vous vanter et cultiver votre égoïsme et nourrir votre « moi ». Le Christ travaille en nous jusqu’à ce que sa stature soit devenue parfaite en nous. Quel grand christianisme est le nôtre, à nous évangéliques, aujourd’hui, mais quelle bande de gens indignes nous sommes, osant nous lever pour prêcher à des auditeurs intelligents que l’essence et le but suprême du Christ, est de sauver les hommes de l’enfer.
Le but essentiel de Dieu en sauvant les hommes n’est pas de les arracher à l’enfer, mais de les recréer à l’image du Christ, de les rendre comme Dieu. Et Dieu n’en aura jamais fini avec nous avant le jour où nous le verrons face à face et où son nom sera sur nos fronts. Nous serons comme lui, comme il est.
Quel christianisme bon marché, galvaudé, mercantile est celui qui dit : « J’étais endetté, mais Jésus est venu payer ma dette » ! C’est bien ce qu’il a fait, mais pourquoi insister là-dessus ? « J’allais en enfer, et Jésus m’a arrêté et m’a sauvé ». Il l’a fait, mais ce n’est pas la chose importante à souligner.
Sur quoi devons-nous insister ? Sur le fait que Dieu m’a sauvé pour me rendre semblable à son Fils. Lorsqu’il m’a saisi dans ma course effrénée vers l’enfer et m’a fait faire demi-tour, lorsqu’il m’a renouvelé, a mis fin au vieux « moi » et a créé en moi un homme nouveau, son but était de reproduire en moi la beauté de son Fils. Et aucun chrétien n’est où il doit être, avant que la beauté du Fils de Dieu n’ait été reproduite dans sa vie chrétienne.
C’est nécessairement une question de degré. Il n’y a certainement jamais un moment où l’on peut regarder à son cœur et dire : « Ça y est, maintenant je vois le travail achevé. Le Seigneur a signé la peinture. Le profil, la belle image est terminée. Je vois Jésus en moi ».
Personne ne dira cela, personne, même s’il était comme le Christ : charitable, plein d’amour, de paix, de grâce, de miséricorde, de bonté et de foi. Il ne s’en doutera pas et il demandera aux gens de prier pour lui. Il lira sa Bible avec larmes et dira : « Oh Dieu ! Je veux être comme ton Fils ».
Dieu sait qu’il a quelque ressemblance avec son Fils, et son entourage aussi le sait, ainsi que les anges, je suppose, mais lui, il ne le sait pas. L’humilité ne regarde jamais à l’intérieur de soi. L’humilité regarde toujours à l’extérieur.
Maintenant, voici l’opération pratique : « Il faut qu’il croisse et que je diminue » (Jean 3 v. 30). Toujours davantage du Christ et toujours moins de moi. Voici la souffrance de la croix pour moi. J’étais crucifié avec le Christ et maintenant Dieu veut que cette crucifixion soit une réalité. Cette réalité se produit par degrés ; paix, puissance et efficacité, augmentent dans la mesure où ce n’est plus moi, mais le Christ qui vit en moi.
Qui l’emportera ? Moi ou le Christ ? Sera-ce ma justice ? Non, la justice du Christ. Sera-ce mon honneur et ma louange ? Non, l’honneur et la louange du Christ. Sera-ce mon choix ? Non, le choix du Christ. Mes plans ? Non, les plans du Christ.
Nous n’entendons plus cela que dans les cantiques. Nous chantons de belles paroles, mais nous ne les mettons pas en pratique. Nous sommes comme l’homme qui se regarde dans un miroir et qui oublie ensuite ce qu’il est. Nous chantons : « Et maintenant, et pour jamais, sous ton joug je me plie. Je ne puis vivre désormais, Jésus que de ta vie ! » Et nous fermons le recueil.
Il faut que cela devienne pratique, opérant. Il faut que cette riche vérité objective devienne une expérience subjective, sinon le christianisme est une farce, une illusion. Quand c’est moi au lieu du Christ, c’est une horreur !
Un des plus beaux versets de la Bible se trouve dans le psaume 90 : « Que la grâce du Seigneur soit sur nous ! » L’auteur anonyme de la « Théologie germanique » dit que rien ne brûle en enfer que « je, moi, mon, mien ». Voilà le carburant de l’enfer. Comme c’est affreux, indiciblement affreux ! Comme Néron était affreux ! Comme il est laid cet homme qui tue, le gangster. Vous dites : « Je ne suis pas un Néron, je ne suis pas un assassin ». Non. Mais la Bible dit : « Que celui qui est souillé se souille encore » (Apocalypse 22 v. 11).
La culture, l’éducation, la civilisation moderne, empêchent le monde d’aller en enfer plus vite qu’il ne le ferait autrement. Mais nous portons tous en nous le germe de la destruction. Il n’y a pas de péché commis dont nous n’ayons la semence en nous. Que Dieu enlève le sel de la préservation et nous pourrirons du jour au lendemain. Comme le « moi » est laid et comme le Seigneur notre Dieu est beau !
Aldous Huxley a dit (évidemment, je ne le cite pas comme un auteur évangélique, mais il a dit quelque chose que j’ai apprécié) : « Que mon règne disparaisse » est le corollaire nécessaire de : « Que ton règne vienne ! » Et cependant, nous osons prier chaque dimanche : « Que ton règne vienne, que ta volonté soit faite ! »
Pourquoi prions-nous ? Son royaume ne peut jamais venir avant que le mien ne s’en aille. Quand je ne serai plus roi de ma vie, alors Christ en deviendra le Roi. « J’ai été crucifié avec Christ », dit le cher apôtre. « Et si je vis, ce n’est plus moi qui vis, mais Christ qui vit en moi. Et si je vis maintenant dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est donné lui-même pour moi ».
Nous ne devons pas seulement nous contenter de citer ces mots. Ils doivent devenir vivante réalité.
Voulez-vous que Dieu fasse quelque chose pour vous, de sorte que ce ne soit plus vous qui viviez, mais le Christ qui vive en vous ?