La vie de Job.2
Remarquons ici, pour notre consolation, le contrôle que Dieu exerce sur Satan. Celui-ci ne pouvait toucher ni à Job, ni à ses propriétés, ni à sa famille, sans y être autorisé par Dieu.
➲ L'intégrité de Job. Ses amis
(Chapitre 2 v. 13 à 3).
« Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point (Luc 22 v. 31 et 32) ». Or, les fils de Dieu vinrent un jour se présenter devant l’Éternel, et Satan vint aussi (2 v. 1) C'est à nouveau jour d'audience au ciel, et parmi les princes, les fils de Dieu, Satan se présente. Le dialogue s'engage comme au chapitre premier. Dieu ajoute ceci à la description du caractère de Job : « Il demeure ferme dans son intégrité bien que tu m'excite à le perdre sans motif (v. 3) ».
Devant le conseil, l’Éternel déclare que toutes les épreuves qui ont frappé Job l'ont frappé sans motif. Job a justifié la confiance que Dieu mettait en son intégrité et sa fidélité. Les insinuations du diable ne reposent donc sur rien. Mais, Satan proteste : « Tout ce qu'un homme possède, il le cède volontiers pour sa vie ; mais étend ta main, touche à ses os et à sa chair et je suis sûr qu'il te maudira en face (v. 5) ».
Remarquons ici, pour notre consolation, le contrôle que Dieu exerce sur Satan. Celui-ci ne pouvait toucher ni à Job, ni à ses propriétés, ni à sa famille, sans y être autorisé par Dieu. Ceci nous est confirmé par les paroles du Fils de Dieu à Pierre : « Satan a demandé à vous cribler... mais j'ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas ». Et Paul écrit aux Corinthiens : « Dieu est fidèle, il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de ce que vous pouvez supporter; mais avec la tentation, il donnera aussi l'issue (1 Corinthiens 10 v. 13) ».
Il est donc clair que Satan ne peut toucher à un serviteur de Dieu sans y avoir été autorisé. Son attaque est limité par celui qui est la Sagesse suprême, à ce qui débarrassera le froment de la paille, l'or des scories.
Satan frappa Job d'un ulcère malin de la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête : Sorte d’inflammation de tout le corps qu'on a surnommé lèpre noire. Job prit un tesson pour se gratter, et s'assit sur la cendre. Hors du village, sur la cendre Job est assis. A l'entrée de tous les villages du Hauran, il y a un endroit où on dépose les immondices enlevées de l'étable. On les brûle de temps en temps. Les cendres restent là, et s'y accumulent pendant des siècles. Le malheureux, frappé d'une maladie repoussante n'est plus supporté à l'intérieur du village. Il s'y retire (Bible Crampon). Lui qui avait siégé, comme prince, aux portes de la cité ! Lui, l'un des plus nobles fils d'Orient ! Sa femme lui dit alors : « Tu demeures ferme dans ton intégrité ? Maudis Dieu et meurs ! (ch. 2 v. 9) ».
Il semble que la femme de Job soit restée seule à ses côtés. Dans son angoisse, à la vue des horribles souffrances de son mari, elle dit ce que Satan voudrait que Job fit. Le diable peut emprunter les lèvres des plus fidèles amis pour nous conseiller, à l'heure de l'épreuve, la chose qu'il voudrait que nous fissions. Ainsi, Pierre essaya de détourner le Seigneur du Calvaire : « Aie pitié de toi Seigneur », dit-il. A quoi Jésus répond : « Retires-toi de moi, Satan ! » Il a aussitôt discerné l'inspirateur des paroles prononcées par le disciple.
« Renie Dieu et meurs ! » a dit la femme de Job. Il ne nous est pas dit qu'elle se soit lamentée lorsque le malheur a ravi tous les biens terrestres, ni qu'elle se rebella lorsqu'elle a appris la mort de ses enfants. Mais voir son mari dans ce état misérable dépasse tout ce qu'elle peut supporter. Est-ce ici le lot de celui qui a servi Dieu avec tant d'intégrité ?
Dieu ne peut pas être un Dieu d'amour ! Autrement il ne permettrait pas que souffrent ainsi ceux qui le servent ! Phrase souvent prononcée par des chers amis, au chevet de serviteurs de Dieu dans le creuset de l’épreuve et de la douleur physique. Mais Job répondit : « Tu parles comme une femme sans piété. Quoi ! Nous recevons de Dieu le bien, et nous ne recevrions pas le mal (version Septante) ».
En vérité la consécration de Job est profonde, réelle, complète : « En tout cela Job ne pécha point par ses lèvres (2 v. 10) ». Que d'enfants de Dieu, hélas ! Servent Dieu pour le bien qu'ils espèrent en retirer en ce monde et dans le monde à venir, plutôt que par un amour véritable et désintéressé. Les mondains aussi le font. Les uns et les autres trébuchent sur l'écueil de la souffrance : « Ils ne comprennent pas que la souffrance a une fonction plus haute que la punition, et que l'homme extérieur doit être sacrifié aux intérêts de l'homme intérieur, à ceux du monde alentours, et à ceux de l'invisible au-delà ».
« La souffrance du saint, saintement supportée, est pour le plus grand bien de celui qui est éprouvé. Elle est aussi un témoignage pour son entourage terrestre, et pour les êtres des sphères invisibles ». (W. W. Peyton)
Job est un véritable serviteur de Dieu. Épreuves sur épreuves tombent sur lui sans que sa foi chancelle, sans que soit ébranlée son intégrité. Par là, il montre que sa consécration est véritable, et qu'il ne sert pas Dieu pour ce qu'il reçoit. Sa foi en la fidélité de Dieu n'est pas ébranlée. Que Dieu donne ou que Dieu reprenne, Job bénit encore le nom du Seigneur.
Les mauvaises nouvelles vont vite. Apprenant la grande épreuve qui frappait Job, trois de ses intimes amis décidèrent d'aller le voir pour le consoler, et de faire le voyage ensemble. Tout en cheminant, ils devisent sur les malheurs qui ont frappé le patriarche : ils en supposent les raisons possibles...et arrivent à la même conclusion. En conséquence, ils décident de parler de telle et telle manière à celui que Dieu a mis à l'épreuve.
Aujourd'hui encore, les choses vont de même, le cœur humain n'a pas changé. Combien sont-ils ceux qui savent remettre les affligés entre les mains de Dieu ? Ceux qui savent les aider à croire et à demeurer ferme jusqu'au bout ? Moins nombreux encore sont ceux qui peuvent dévoiler aux cœurs affligés les desseins à la réalisation desquels Dieu travaille en eux, par l'épreuve. Ignorant les raisons profondes des tribulations qui atteignent l'enfant de Dieu, nous sommes enclins à juger d'après ce que nous voyons, ou d'après ce que nous entendons ; selon la mesure de notre développement personnel !
Voici les amis de Job, presque au terme de leur long voyage. De loin encore, ils aperçoivent un homme sur le tas de fumier, hors de la ville. Quoi ! Est-ce possible ? Serait-ce Job ? Job, le plus grand des fils de l'Orient ? Ce pauvre hère sur la cendre pourrait-il être le Job qu'ils ont connu ? « Ayant porté les regards sur lui, ils ne le reconnurent point. Ils élevèrent la voix et pleurèrent. Comment les puissants sont-ils tombés ! » Alors ils déchirèrent leurs manteaux et ils jetèrent de la poussière au-dessus de leurs têtes, car leur douleur était sincère et profonde. Puis, venus jusqu'à leur ami ils restèrent muets, assis à terre sept jours et sept nuits, sans parler, car ils voyaient combien la douleur de Job était grande ! (v. 13)
« Après cela, Job ouvrit la bouche et maudit le jour de sa naissance (3 v. 1) ». Le premier, il rompit le silence, pour répandre l'amertume de son âme, pour dire son horreur du jour qui l'a vu naître. Ces paroles nous révèlent quelques-unes des pensées qui ont bouillonné en son cœur pendant les jours de silence. Mais il ne renie pas Dieu. Il ne se révolte pas contre Lui. Pour ses amis, il n'a pas de paroles de bienvenue. En de semblables douleurs les formalités habituelles ne sont pas de saison.
Périsse le jour où je suis né.... ! Ce jour anniversaire de ma naissance, ordinairement temps de fête et de joie, qu'il soit jour de ténèbres et de deuil. Pourquoi ne suis-je pas mort ! « Maintenant je serai en paix, je dormirai, je me reposerai avec les rois et les grands de la terre (v. 11 à 13) ». Dans le sépulcre, ceux qui sont las se reposent : Les méchants n'exercent plus de violence, les captifs sont en paix, ils n'entendent plus la voix de l'exacteur...».
Étrange à dire, à l'heure des grandes afflictions, l'âme se tourne vers la mort comme pour y chercher un refuge. « C'est assez...prends ma vie », dit Elie à l’Éternel, alors qu'il tombait de fatigue, il s'est étendu sous le genêt. « Ce peuple est trop pesant pour moi... tue-moi, je te prie (Nombres 11 v. 15) », demande Moïse à l’Éternel, alors qu'il est, comme terrassé par l'amertume et la douleur.
« La mort vaut mieux pour moi que la vie » dit Jonas à Dieu, parce que ses jugements ne frappent pas une Ninive repentante. Et depuis, combien de serviteurs du Très-Haut se sont écriés dans l'angoisse de leur âme : « Je voudrais être mort ».
Jusque là, Job ne s'était pas rebellé contre Dieu, mais son langage s'apparente presque à celui de la révolte. Soupirer après la mort, pour échapper à la souffrance, ce n'est point se soumettre à la volonté de Dieu. Satan inspire ces paroles comme il inspiré celles de sa femme « renie Dieu et meurs ».
Poussé à l'extrême par une maladie et sous une influence satanique, de pauvres âmes ont même recouru au suicide pour atteindre cette place de repos. Que les enfants de Dieu prennent garde, qu'ils se fortifient en Dieu et le bénissent pour le privilège de la vie. Qu'ils se détournent de la tentation du repos de la tombe et choisissent la vie, même si la leur est comme jetée dans la fournaise de l'affliction, car le but n'est pas la tombe mais le ciel.
« Pourquoi la vie est-elle donnée..., à ceux dont l'âme est remplie d'amertume ; à ceux qui espèrent la mort, et la mort ne vient pas... à ceux qui sont heureux , qui tressaillent d'aise et se réjouissent, quand ils ont trouvé le tombeau (3 v. 20 à 22) ». Job ne pèse plus ses paroles, il n'en discerne pas la lâcheté, et il compte parmi ses douleurs ce que le diable a nommé une bénédiction (l'homme que Dieu enferme de toutes parts). Il termine en disant : « Ce que je crains, c'est ce qui m'arrive (24 à 26) ».
Enseigné par Dieu, Job savait donc que l'heure de l'épreuve allait arriver tôt ou tard. Le trouble, l’appréhension avaient donc parfois projeté leurs ombres sur la paix des jours de bonheur. Il avait eu le pressentiment de l'épreuve dans laquelle il était à présent.
➲ Exhortation d'Eliphaz. Réponse de Job
(Chapitre 4 v. 4 à 7).
« Ce n'est pas un ennemi qui m'outrage... c'est toi, mon confident, mon ami (Psaume 55. v. 3 à 14) ».
En lisant ce que dit alors Eliphaz de Théman à son ami dans l'affliction, nous pensons à ces âmes candides qui s'imaginent qu'elles doivent dire toute leur pensée. « Si nous essayons de t'adresser un mot peut-être auras-tu peine à l'entendre, dit Eliphaz, mais qui pourrait retenir ses paroles ! » Et il continue en disant les choses les plus douloureuses, celles qui, probablement, ont déjà abordé la pensée de Job, exhalant sa peine :
« Tu as enseigné la sagesse à plusieurs.
Tu a fortifié les mains débiles.
Tes paroles ont relevé ceux qui chancelaient.
Tu as raffermi les genoux vacillants.
Et maintenant qu'il s'agit de toi, tu faiblis !
Maintenant que tu es atteint tu perd courage ! (version Crampon) ».
Tout cela, Job le savait par cœur, et Satan le lui a murmuré, sans doute, quand il a vu le patriarche sombrer sous la douleur. Mais c'était une souffrance ajoutée à tant d'autres, que d'entendre Eliphaz le dire : « Ta crainte de Dieu n'est-elle pas ton espoir ? » continue Eliphaz. « Si les autres hommes l'ignorent, toi Job, tu devrais savoir te confier en Dieu au jour de l'épreuve. Ce que tu sais de lui n'est-il pas suffisant pour te donner confiance maintenant ? »
Ami qui es dans la fournaise, ne sont-ce pas ici les paroles mêmes de ceux qui essaient de te consoler ? Ils parlent de la douleur de celui que Dieu a blessé, ils le consolent en lui rappelant qu'il a exhorté les autres à être forts et que lui-même maintenant, faiblit.
« Cherche dans ton souvenir : Quel est l'innocent qui a péri ? Mais ceux qui labourent l'iniquité et sèment l'injustice en rapportent les fruits (4 v. 7 à 11) ». Ainsi, d'après Eliphaz, l'homme récolte seulement ce qu'il a semé. Il y a, ici, une suggestion de péché dans la vie de Job. Eliphaz cherche à donner plus de poids à ce qu'il dit et évoque une vision nocturne. Mais les paroles de l'esprit qui l'a visité la nuit font songer au diable plutôt qu'à un ange de lumière, plutôt qu'au Saint-Esprit.
Satan qui a accusé Job devant Dieu et dans l'assemblée des saints affirmant que dans l'épreuve Job renierait l’Éternel, Satan qui l'a frappé et dépouillé de tous ses biens, lui qui a attaqué le patriarche indirectement par les conseils de sa femme, et directement en le faisant soupirer après la mort, attaque Job à nouveau en se servant de ses amis, de ses consolateurs. Il n'abandonne jamais la partie. Il est toujours à l'arrière-plan de ce que vit Job. Par ses amis, il attaque directement l'intégrité de l'homme de Dieu, sa foi et son assurance de communion avec l’Éternel.
Eliphaz dit qu'il a appris dans une vision qu'aucun mortel n'est juste et pur devant Celui qui l'a créé. Ce qui équivaut de dire à Job qu'il peut abandonner la confiance mise en son intégrité. L'épreuve qu'il traverse, montre assez que son lot est identique à celui des autres hommes. Il croyait que Dieu le protégeait et le bénissait, en définitive, il moissonne les fruits du péché comme les autres : « Tu hais le mal et u as recherché la droiture ; mais personne n'est juste devant Dieu, aucune créature n'est pure devant le Créateur ».
« Voici Dieu n'as pas confiance en ses serviteurs, il trouve de la folie chez ses anges, combien plus chez ceux qui habitent des maisons d'argile ». Tels sont les propos que l'esprit a murmuré aux oreilles d'Eliphaz, sur l'homme en qui Dieu a placé sa confiance, sur Job dont Dieu a reconnu l'intégrité, devant l'assemblée des saints. L'Adversaire accuse sans cesse l'homme devant Dieu, et il accuse constamment Dieu auprès des hommes. Il le leur montre insensible, et il travestit ses pensée auprès de ses créatures.
« L'homme est comme la teigne (un vermisseau) ; du matin au soir il est brisé », dit encore l'esprit qui a visité Eliphaz.
Ils sont à plaindre ceux qui se confient dans des visions nocturnes pour la connaissance de Dieu. Ils se laisseront certainement égarer. Un esprit de mensonge fait errer Eliphaz. Il le conduit à l'erreur avec une demi-vérité. Assurément, l'homme mortel n'est pas pur devant le Dieu saint ; mais l'esprit nocturne a oublié de mentionner le sacrifice du Christ au Calvaire. A cause du sacrifice, l'homme a été rendu agréable à Dieu.
Enfin, s'il peut être dit que la vie de l'homme sur la terre est comparable à celle de la teigne, il est faux d'avancer que Dieu le laisse périr sans y prendre garde : « Les cheveux mêmes de votre tête sont tous comptés, dit le Seigneur à ses disciples. Et vous valez mieux que beaucoup de passereaux (Mathieu 10 v. 30 et 31) ».
« Appelle maintenant », dit Eliphaz à son ami affligé. « Auquel des saints t'adresseras-tu ? (5 v. 1) » (Paroles qui font supposer qu'Eliphaz croit avoir été visité par l'un des saints, au cours de la nuit.
« Quant à moi, j'aurai recours à Dieu, et c'est à Dieu que j'exposerai ma cause », dit-il (v. 8)
Il y a bien des Eliphaz, aujourd'hui, lesquels s'expriment comme lui, pour décrire les choses qu'ils ont apprises secrètement, dans le silence de la nuit, communications du monde des esprits qu'ils croient être des messages. Pour rien au monde, ils ne voudrait se détourner de Dieu. Mais par ces messages directs de l'au-delà, ils s'imaginent qu'ils le connaîtront mieux. Que Dieu daigne ouvrir leurs yeux sur les desseins du diable, et qu'il les délivre de ce piège !
« J'ai vu l’insensé étendre ses racines, mais soudain, j'ai maudit sa demeure. Ses fils sont loin de tout secours ; Ils sont écrasés à la porte et personne ne les délivre (5 v. 3 et 4) ». Que veut dire Eliphaz ? L'esprit qui lui a parlé au cours de la nuit, semble ignorer l'amour et la compassion, lesquels résultent de la communion avec le Dieu d'amour. « La souffrance ne sort pas de la poussière, dit-il et la peine ne germe pas du sol (v. 6) ». Voilà le pauvre raisonnement d'Eliphaz. Il vient de prononcer une malédiction contre l'insensé. Puis, il continue en disant qu'il doit y avoir quelque raison à l'épreuve de Job.
« Si j'étais à la place de Job, je remettrais ma cause à Dieu ; il fait de grandes choses et des merveilles sans nombre (v. 9) ». « Il élève ceux qui sont abaissés et ceux qui sont dans le deuil, il les met au faîte du bonheur (v. 11) ». « Il déjoue les desseins de l'homme pervers, et il prend les sages dans leurs propres ruse (v. 12 et 13) ». « Il sauve le pauvre de la main des puissants et il y a en Lui une espérance pour les malheureux (v. 15 et 16) ».
CONCLUSION D'ELIPHAZ : « Voici : Heureux l'homme que Dieu châtie. Ne méprise pas la correction d'El-Shaddaï. Car il fait la plaie et il la bande ; il blesse et ses mains guérissent (5 v. 17 et 18) ».
Eliphaz nous fait l'impression d'un personnage étrangement compliqué. Assurément, il a quelque connaissance de Dieu. Connaissance purement théorique, peut-être ? Nous ne savons. Après les premiers mots de sa réponse aux plaintes de Job, il lui a montré une certaine charité, suggérant seulement que l'homme moissonne ce qu'il a semé, et conseillant à Job de s'en remettre à Dieu. Que son ami s'estime d'être heureux de la correction divine et se garde de la mépriser. Si El-Shaddaï (celui qui donne la bénédiction) fait la plaie, il la guérit immanquablement aussi.
Puis voici Eliphaz qui se lance dans une description merveilleuse de ce qui se passerait si Job recherchait Dieu de tout son cœur et ne méprisait pas la correction. Alors, le Tout-Puissant serait comme désarmé et ses mains comme liées. « El-Shaddaï le délivrerait de toutes ses détresses, et aucun mal n'approcherait de lui (v. 19) », « en temps de famine, il serait gardé de l'épée (v. 20) ». « Le fléau de la langue ne le toucherait pas, la destruction ne l'effraierait pas (v. 21) ». « Il se rirait du danger et ne craindrait point les bêtes des champs (v. 22 et 23) ». « Sa maison, protégée par Dieu, jouirait de la paix (v. 24) ». « Sa postérité serait comme l'herbe,il descendrait dans la tombe, comme tombent les épis mûrs, en leur saison (v. 25 et 26) ».
« Voilà, nous avons examiné la chose, elle est ainsi, écoute cela et fais-en ton profit (v. 27) ».
C'est là un beau discours, Eliphaz, mais il sonne faux, et ce n'était pas le moment de parler des bénédictions de la délivrance. Les prémisses sont fausses. Tous les biens énumérés seraient pour Job s'il retournait vers Dieu, dis-tu. Or, Job ne s'est jamais détourné de lui ! Eliphaz n'a rien compris à l'épreuve qui a frappé le patriarche. Job a écouté, mais les paroles d'Eliphaz ne l'ont pas convaincu. D'ailleurs, elles n'ont pas pénétré en lui à cause de l'angoisse de son âme.
« Oh ! S’il était possible de peser ma douleur, et si toutes mes calamités étaient sur la balance, elles seraient plus pesantes que le sable de la mer...Car les flèches du Tout–Puissant m'ont percé, et mon âme en suce le venin ; les terreurs de Dieu se rangent en bataille contre moi ».
« Les bêtes des champs crient leur détresse quand elles ne trouvent point de nourriture. Ainsi j'ai besoin de crier ma douleur. C'est un soulagement dont mon âme a besoin. «Ce que je voudrais ne pas toucher, est là ma nourriture, si dégoûtante soit–elle ! » Eliphaz, tu dis que l’homme n'est qu'un vermisseau. « Oh ! Si Dieu voulait accorder ma demande, et m'écraser . Qu'il laisse aller sa main pour m'achever. Et j'aurai une consolation, et j'aurai des transports de joie au milieu des tourments qu'il ne m'épargne pas : c'est que je n'ai pas renié les paroles du Saint (6 v. 3,9,10) ».
Les forces me manquent pour atteindre la délivrance. Qu'attendrais-je encore qui m'incite à la patience. Ma chair n'est point d'airain. Ne suis-je pas sans secours ? Et le salut n'est-il pas loin de moi ?
« Celui qui souffre a droit à la compassion de son ami, même s'il abandonnait la crainte de l’Éternel, dit Job (6 v. 14) ». Or, ceux qui sont venus pour le consoler l'accablent et il les compare à des torrents sans eau. « Mes frères sont perfides...comme le lit des torrents qui disparaissent...Viennent les chaleurs et ils tarissent...Les voyageurs sont honteux d'avoir eu confiance. Ainsi vous êtes comme si vous n'existiez pas. Vous voyez mon angoisse et vous en avez horreur (6 v. 15 à 22) ». « Vous ai-je demandé quelque chose ? ou des présents avec vos biens ? ou de me délivrer de la main des méchants ? Instruisez-moi et je me tairai. Faites- moi comprendre en quoi j'ai péché (6 v. 24) ». Les paroles droites ont de la force. Les arguments d'Eliphaz en manquent totalement. « Que les paroles vraies sont dissuasives, dit Job Mais que prouvent vos remontrances ? Vous seriez capable d'écraser des orphelins, vous qui montrez tant de dureté de cœur avec votre ami !» Regardez-moi, je vous prie, vous mentirais-je en face ? Y a-t-il de l'iniquité sur ma langue ? (6 v. 28 à 30) ».
« J'ai pour partage des nuits de souffrance... Je suis rassasié d'agitations jusqu'au point du jour...Ma peau se crevasse et se dissout ...Mes jours s'évanouissent, plus d'espérance! ...C'est pourquoi, je parlerai dans l'angoisse de mon cœur (7 v. 9 à 11) ».
Puis, se détournant de ses amis, Job s'adresse à Dieu : « Suis-je une mer ou un monstre marin que tu établisses des gardes autour de moi... Laisse-moi, car ma vie n'est qu'un souffle...Qu'est-ce que l'homme...pour que tu l'éprouves à touts les instants...Si j'ai péché, qu'ai-je pu te faire Gardien des hommes ?... Que ne pardonnes-tu mon péché ?...Car je vais ma coucher dans la poussière, tu me chercheras et je ne serai plus (7 v. 20 et 21) ».
➲ Bildad et ses raisonnements, Job en appelle à Dieu
(Chapitre 5 v. 8 à 10)
« Je t'ai choisi dans la fournaise de l'affliction (Esaïe 48 v. 10) ».
Les différentes réponses des amis de Job révèlent leurs caractères respectifs. Eliphaz était peut-être considéré comme ayant le plus de maturité spirituelle, à cause de son assurance d'avoir été enseigné de Dieu dans les visions de la nuit. C'est pourquoi, probablement, il a été désigné pour parler le premier à Job. C'est aussi lui qui l’accuse le plus ouvertement d'avoir transgressé de quelque manière la loi de Dieu.
On peut décrire Bildad comme l'humble ami. Il parle moins que les deux autres, et il le fait avec une certaine douceur. Il n'est guère que leur écho amoindri. Il a entendu Eliphaz et le cri de Job vers Dieu : « Si j'ai péché...que ne pardonnes-tu ma transgression ? » Il essaie, lui, d'une douce persuasion : « Jusqu’à quand parlera-tu ainsi, Job ? El-Shaddaï (le Tout-Puissant) fera-t-il fléchir la justice ? S'il n'y a pas d'iniquité dans ta vie, tes enfants ont probablement péché, eux, et il les a livrés aux conséquence du péché (v. 2 à 4) ».
« Mais si toi tu cherches Dieu, si tu demandes grâce au Tout-Puissant, si tu es pur et droit, il veillera certainement sur toi (il se réveillera pour toi) et rendra le bonheur à la maison du juste (v. 5 et 6) ».
Encore l'aiguillon ! Encore ce terrible si, tellement douloureux et torturant, pour celui qui est dans le creuset. Le diable susurre : « Si tu étais droit devant Dieu, il te délivrerait ». L'ami venu pour le consoler suggère à peu près la même chose : « Si tout était en règle avec Dieu, il interviendrait et te délivrerait. Même toi, Job, tu as crié à Dieu, disant : Si j'ai péché contre toi ».
La perte de toutes les possessions terrestres, être mal jugé par ses amis, la souffrance physique, tout cela n'éveille pas dans le cœur de Job une douleur aussi vive aussi aiguë que ce si, car il marché avec Dieu dans l'intégrité. Bildad avoue son ignorance (v. 9) et il s'en réfère aux expériences et à l'autorité des ancêtres. Il a un grand respect pour la tradition. Or, il est évident d'après les ancêtres, que Dieu bénit ceux qui sont intègres et il punit les incrédules, les impies. Que Job accepte donc leur enseignement. S'imaginerait-il connaître Dieu mieux que les anciens ne l'on connu ? (v. 10)
Bildad n'est qu'un écho. D'autres, plus grands, plus sages que lui ont parlé de la sorte. Il est heureux d'accepter leurs conclusions. Cette connaissance de seconde main lui suffit. Cela parait être de l'humilité. Ensuite, il se met à décrire la vie de quiconque oublie Dieu. Ses comparaisons indiquent la sphère assez limitée de ses pensées, de son horizon : Le roseau qui se flétrit, la toile d'araignée, la maison, le jardin, la poussière (v. 12 à 19).
Puis, il ajoute : « Voici, Dieu ne rejettera pas l'homme intègre. Il rendra le rire à ta bouche et les chants d'allégresse à tes lèvres (v. 20 et 21) ». Bildad est un brave homme. Il plaint Job. Il désire lui donner un petit encouragement. Tout ce qu'il a dit sur le sort des méchants est vrai. Mais, si, après tout, Job était bien intègre devant Dieu ? Eh bien Dieu le réjouira, il remplira sa bouche de rire et d'allégresse. Bildad est comme ces braves gens qui vous disent, quand vous êtes dans la douleur : « Allons, bon courage ! Le jour de la joie luira de nouveau pour vous ».
Même dites avec la meilleure des intentions, ce ne sont pas ces paroles qui peuvent alléger la douleur où Job est plongé. A peine s'y trouve-t-il un mot juste pour celui qui a été le chef digne et respecté de son peuple. Ce n'est pas cela qui peut soulager l'angoisse de son âme. Les courtes pensées de Bildad ne peuvent sonder les profondeurs d'un homme comme Job.
« Ceux qui te haïssent seront couverts de honte », ajoute cet étrange consolateur (v. 22). Comme s'il pouvait y avoir quelque réconfort pour l'intégrité de Job, à voir les autres humiliés. Pour ceux qui sont de la trempe de Bildad, il pourrait y en avoir peut-être ? Mais pour celui qui marche dans la communion avec Dieu, jamais !
Job a probablement senti chez Bildad ce désir de ne point faire de peine. Il lui en est reconnaissant. Et il est tout prêt à reconnaître que Dieu punit les méchants. Cependant les mots d'Eliphaz sont toujours en son cœur : « Comment l'homme mortel serait-il juste devant Dieu ? » Et il les répète maintenant. Peut-être n'avait-il jamais pensé à cela auparavant ? Il savait seulement qu'il avait marché avec Dieu dans l'intégrité, et que Dieu l'avait honoré de son amitié. Dans une espèce d'obéissance, il avait offert des sacrifices pour le péché. Mais était-il justifié de ce chef ? Il n'en savait plus rien. Maintenant, les questions d'Eliphaz, avec leurs dards empoisonnés, ont pénétré dans le cœur de Job, ce qui tend à briser sa communion avec Dieu. Dès que la pensée se laisse absorber par les « comment ? » , l'expérience faite de la communion avec Dieu s'évanouit, se dissipe.
Pourquoi certaines gens veulent-il voir défini, expliqué, ce qui est indéfinissable ? Ne leur suffit-il pas d'accepter la parole de Dieu ? Et n'est-il pas douloureux de rencontrer cet élément de doute chez ceux qui sont chrétiens de profession ? Ne peuvent-ils pas laisser en paix ceux qui marchent avec Dieu, sans venir les troubler avec leurs questions ? C'est ici l'un des éléments de l'épreuve, de la souffrance permise pour purifier. Dans la douleur, l'âme va apprendre à donner raison de son espérance, avec humilité et douceur.
« Si l'homme voulait discuter avec Dieu, il ne lui répondrait pas une fois sur mille. Dieu est souverainement sage. Qui a osé lui résister et s'en être bien trouvé », dit Job en réponse à Bildad. « Il peut transporter les montagnes, faire trembler la terre sur sa base, donner des ordres au soleil, étendre les cieux, marcher sur la mer, créer les étoiles. Il accomplit des merveilles qu'on ne peut ni sonder, ni compter (v. 5-10). Qui pourrait s’opposer à lui ? Ou lui dire : Que fais-tu ? (v. 11 et 12) ».
« Alors comment comment pourrais-je, moi Job, lui parler ou raisonner avec lui ? Quand même j'aurais raison, je n'oserais pas lui répondre. Car il est Dieu, et je ne suis qu'un homme...Quand même il se rendrait à mon appel, je ne croirais pas qu'il ait daigné entendre ma voix, lui qui fond sur moi comme une tempête, et multiplie mes blessures sans motif. Il ne me permet point de reprendre haleine, et me rassasie d'amertume (v. 14 à 18) ».
D'après les paroles de Job, il semblerait qu'il ne connaissait pas encore Dieu comme celui qui parlait avec lui. Mais, il avait le sentiment intime de la présence de Celui devant lequel il marchait dans l'intégrité de son cœur, fuyant le mal, craignant Dieu. Job ne pressentait pas que le chemin de la douleur allait aboutir à une révélation de Dieu, à une communion qui dépasseraient en intimité, en profondeur, tout ce qu'il avait jamais pu concevoir au temps de son bonheur.
Pour l'instant, il est comme écrasé par le parallèle qu'il essaie d'établir entre Dieu et lui : « S'il s'agit de force, point d'espérance pour moi, s'il s'agit de droit, qui oserai- l’assigner ? Quand même je serai innocent, il prouverait ma culpabilité. Non ! point d'espérance pour moi, inutile d'essayer de me justifier, mon cas est désespéré. Aussi, je ne tiens pas à l’existence, je fais aucun cas de ma vie (v. 19 à 22) ».
«Tu as dit, Bildad, que Dieu ne renverse pas l'homme intègre. Or, quand je songe à sa toute puissance, et quand je vois comment il me réduit en pièces, je dis que c'est tout un. Puisqu'il n'y a point de justes devant Dieu, innocents et impies sont dans la même situation. En fait, il semble bien que Dieu se rie des épreuves qui atteignent l'innocent, et qu'il abandonne celui-ci au méchant. Si ce n'est pas lui, qui est-ce donc ? (v. 23 et 24) ».
Tu me dis : « Bon courage ! » Mais si je veux oublier ma plainte...et reprendre ma sérénité, je suis effrayé de toutes mes douleurs, et la pensée que Dieu ne me tiendra pas pour innocent. (v. 28) Tu me dis que si je suis pur et droit, il agira en ma faveur. Mais que faire ? J'ai crié à lui pour qu'il me pardonne. Pourquoi me fatiguer en vain ? Quand je purifierais mes mains avec de la potasse, il me plongerait à nouveau dans la fange (v. 30 et 31).
Il n'est pas un homme comme moi... pour que nous allions ensemble en justice. Il n'y a pas d'arbitre entre nous. (Job sent de plus en plus sa misère devant Dieu, la distance entre le créateur et lui). « Oh ! S'il y avait un arbitre entre nous, qui pose la main sur nous deux » s'écrit-il.
Le besoin du cœur humain reste le même. Job, qui avait offert des holocaustes à Dieu et compris qu'ainsi, il lui était agréable, souhaite à l'heure de l'épreuve, un arbitre, un médiateur à qui il parlerait de Dieu et qui lui parlerait de Dieu.
Quand la vie et l'immortalité furent manifestées par l’Évangile, l'homme comprit que Dieu avait déjà répondu à ce cri par le don de son Fils unique, venant en une chair semblable à la nôtre, lui, le médiateur entre Dieu et l'homme, le Christ Jésus. Il convenait qu'il fut semblable à ses frères en toutes choses, afin qu'il fut un souverain sacrificateur miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour faire l'expiation des péchés du peuple (Hébreux 11 v. 17).
A nouveau, Job proteste : « Qu'il retire sa verge de dessus moi...alors je parlerai et ne le craindrai pas ; autrement, je ne suis point à moi-même (v. 34 et 35) ». Mon cœur ne redoute pas Dieu, dit Job, mais ses plaies m'accablent au point que j'en suis écrasé : « Mon âme est dégoûtée de la vie, il faut que je donne libre cours à ma plainte, je parlerai dans l'amertume de mon âme ».
« Je dis à Dieu, ne me condamne pas ! Fais-moi savoir pourquoi tu me prends à partie. Te paraît-il bien de maltraiter, de repousser l'ouvrage de tes mains ? (10 v. 2 et 3) ». On pourrait donner à ce chapitre dix du livre de Job, ce titre : « Prière d'un malheureux lorsqu'il est abattu et qu'il répand sa plainte devant Dieu ». (voir psaume 102 v. 1)
Combien touchante est la plainte de Job : « Montre-moi pourquoi tu me prends à partie. Se pourrait-il faire que tu prisses plaisir à opprimer et à dédaigner l'ouvrage de tes mains. Vois-tu comme voient les hommes ? (v. 4) Essaierais-tu comme le font ces hommes, mes amis, de trouver en moi le péché, sachant que je ne suis pas coupable ? (v. 5 à 7) ».
Je suis entre tes mains, Seigneur ! Elles m'ont formé et tu me détruis...! Vas-tu, de nouveau me réduire en poussière ? (8 et 9) Tu m'as conservé par tes soins et sous ta garde. Cependant toutes ces souffrances les avais-tu en ton cœur pour moi ? (v. 11 à 13)
« Je te connais Seigneur, et je sais que tu prends garde à l'iniquité. Si je pèche, malheur à moi! tu me traiterais avec rigueur. Suis-je innocent ? Je n'ose lever la tête, tant je suis rassasié de honte et absorbé dans ma misère. Si j'ose lever la tête, tu bondis sur moi comme le lion sur sa proie, et tu montre en moi ta merveilleuse puissance (v. 14 à 16) ».
O Dieu, ton indignation augmente...légion après légion se dressent contre moi. Pourquoi suis-je né ? Aucun œil ne m'aurait vu dans l’état où je suis (v. 17 à 19). Mes jours ne sont-ils pas en petit nombre ? Ne me laisseras-tu pas respirer un peu, avant que je m'en aille dans le pays des ténèbres et de l'ombre de la mort, pays d'une obscurité profonde (v. 20 à 22).
Un message de Jessie Penn-Lewis
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