Le chemin du royaume

Le chemin du royaume

Si tu crois, le royaume de Dieu est à toi, par la foi tu obtiens l'effet de la promesse. Le Seigneur pardonne quiconque se repent véritablement, et reçoit son saint Évangile.

« Le temps est accompli, et le royaume de Dieu est proche. Repentez-vous, et croyez à la bonne nouvelle »  (Marc 1 v. 15). Ces paroles nous conduisent naturellement à considérer : 1° la nature de la vraie religion, appelée ici par le Seigneur le royaume de Dieu, lequel, dit-il, est proche ; et 2° la voie qui y mène, et qu'il indique par ces mots : « Repentez-vous et croyez à l'Évangile ».

I. Nous considèrerons d'abord la nature de la vraie religion.

Il est appelée ici par le Seigneur : le royaume de Dieu. La même expression est employée par le grand apôtre dans l'Épître aux Romains, quand il dit, expliquant en même temps la parole du Maître : « Car le royaume de Dieu, ce n'est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie, par le Saint-Esprit » (Romains 14 v. 17).

Le royaume de Dieu, ou la vraie religion, n'est ni le manger ni le boire. On sait que non seulement les Juifs inconvertis, mais plusieurs de ceux mêmes qui avaient reçu la foi en Christ étaient zélés pour la loi, c'est-à-dire, pour la loi cérémonielle de Moïse. Tout ce qu'ils y trouvaient écrit concernant les viandes et breuvages des offrandes, ou la distinction de viandes impures ; non seulement ils l'observaient eux-mêmes, mais encore ils le recommandaient fortement à ceux d'entre les païens qui avaient été convertis à Dieu. Plusieurs allaient, dans cet enseignement, jusqu'à leur dire : « A moins que vous ne soyez circoncis, et que vous ne gardiez toute la loi (toute la loi des rites), vous ne pouvez être sauvés ». C'est par opposition à cette doctrine que l'apôtre déclare, tant ici que souvent ailleurs, que la vraie religion ne consiste ni dans le manger ou le boire, ni dans aucune observance rituelle, ni même en rien d'extérieur ou qui soit hors du cœur, étant renfermée tout entière dans la justice, la paix et la joie par le Saint-Esprit.

Elle ne consiste dans rien d'extérieur, dans aucune forme ou cérémonie, si excellente soit-elle. Quelque bien appropriées et significatives qu'on suppose ces formes, quelque parfaite que soit l'image qu'elles donnent des choses spirituelles, quelque utilité qu'elles aient, non seulement pour le vulgaire, dont les pensées ne s'étendent guère au-delà de la vue, mais encore, ainsi qu'il arrive sans doute quelquefois, pour des hommes d'intelligence et de savoir ; qu'elles soient de plus, si l'on veut, comme chez les Juifs, instituées de Dieu, toujours est-il que, même dans le temps où cette institution est en vigueur, loin d'être la chose essentielle dans la vraie religion, elles n'en font pas proprement partie.

Combien plus en est-il ainsi de rites établis par les hommes ! La religion de Christ s'élève infiniment au-dessus, et elle est d'une profondeur infiniment plus grande. Ces rites sont bons en temps et lieu, juste dans la mesure où ils servent à la vraie religion. Tant qu'on ne les applique qu'occasionnellement pour aider la faiblesse humaine, il y aurait superstition à s'y opposer. Mais que personne ne les exalte davantage ; que personne n'aille rêver qu'ils ont une valeur intrinsèque ou que la religion ne peut subsister sans eux. Ce serait en faire une abomination pour le Seigneur.

Bien loin que la religion, quant à sa nature, puisse consister ainsi dans des formes de culte, dans des rites et des cérémonies, elle ne consiste, à proprement parler, dans aucune sorte d'actions extérieures. Un homme, sans doute, ne peut avoir de religion, si ses actions sont vicieuses, immorales, ou s'il fait aux autres ce qu'il ne voudrait pas qu'on lui fit en pareille occasion ; un homme ne peut avoir une religion réelle qui sachant faire le bien ne le fait pas. Mais on peut aussi, quant au dehors, s'abstenir du mal et faire le bien, sans avoir de religion. Et de deux personnes lui font la même œuvre extérieure, qui, par exemple, nourrissent les affamés ou vêtent ceux qui sont nus, il se peut que l'une soit vraiment religieuse, et due l'autre n'ait pas du tout de religion ; car l'une peut agir par amour pour Dieu, et l'autre par amour de la louange. Tant il est vrai que, bien qu'elle conduise à toute bonne parole, à toute bonne œuvre, la religion réelle est plus profonde encore dans sa nature, et qu'il faut la chercher dans l'homme caché du cœur.

Je dis du cœur, car la religion ne consiste pas non plus dans l'orthodoxie ou justesse des opinions, qui, pour n'être pas précisément une chose extérieure, n'en appartient pas moins à l'intelligence plutôt qu'au cœur. Un homme peut être en tout point orthodoxe, et non seulement adopter des opinions saines, mais les défendre avec zèle contre tout opposant ; il peut penser juste sur l'incarnation du Seigneur, sur la Sainte Trinité, et sur toute autre doctrine des oracles de Dieu ; il peut recevoir les trois symboles : celui qu'on nomme des apôtres, celui de Nicée, celui d'Athanase, et cependant n'avoir point du tout de religion ; n'en avoir pas plus qu'un Juif, un Turc ou un païen ! Il peut être presque aussi orthodoxe que le diable (je dis presque, car tout homme est sujet à se tromper sur quelque point, tandis qu'on ne peut guère admettre que le diable ait des opinions erronées) ; il peut être, dis-je, presque aussi orthodoxe que le démon, et néanmoins être aussi étranger que lui à la religion du cœur.

Celle-ci mérite seule le nom de religion ; seule elle est de grand prix devant Dieu. L'apôtre la résume tout entière par ces trois mots : justice, paix, joie par le Saint-Esprit ; et d'abord justice. Ici, rappelons-nous les paroles dans lesquelles le Seigneur nous donne le sommaire de la loi et des prophètes : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ta pensée, de toute ton âme et de toute ta force » (Marc 12 v. 30). C'est là le premier et le grand commandement ; c'est le principal point de la justice chrétienne ; tu te réjouiras en l'Éternel ton Dieu ; tu chercheras et trouveras en lui tout ton bonheur. Il faut qu'il soit, dans le temps et dans l'éternité, ton bouclier et ta grande récompense ; que tout ton être s'écrie : « Quel autre ai-je au ciel que toi ? Voici, je n'ai pris plaisir sur la terre qu'en toi ! » Il faut que tu entendes, que tu suives sa voix qui te dit : « Mon fils, donne-moi ton cœur » (Proverbes 23 v. 26). Et lui ayant donné ton cœur, afin qu'il y règne sans rival, tu pourras dire du plus profond de ton âme : « Je t'aime, ô Eternel, ma force ! Eternel, mon rocher, ma forteresse, mon libérateur ! Mon Dieu, mon rocher, où je trouve un abri ! Mon bouclier, la force qui me sauve, ma haute retraite ! » (Psaume 18 v. 1 et 2).

Et voici le second commandement, semblable au premier, qui complète la justice chrétienne : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Marc 12 v. 31). Tu l'aimeras, c'est-à-dire tu l'environneras de la plus tendre bienveillance, de l'affection la plus profonde et la plus cordiale ; tu mettras la plus grande ardeur à éloigner de lui tout mal, et à lui procurer tout bien en ton pouvoir. Tu aimeras ainsi, qui ? Ton ami ? Ton parent ? Celui que tu estimes ? Celui qui t'aime, qui prévient tes bons procédés ou qui te les rend ? Non, mais ton prochain, c'est-à-dire tout fils d'homme, toute créature humaine, toute âme que Dieu a faite, sans excepter celui que tu n'as jamais vu en chair, que tu ne connais ni de visage ni de nom, sans excepter celui que tu sais être méchant et ingrat, celui qui te persécute encore ou te traite avec mépris ; et c'est comme toi-même que tu dois l'aimer, ayant pour son bonheur, sous tous les rapports, une ardeur constante, et mettant un soin infatigable à le garantir de tout ce qui pourrait l'affliger en lui-même, dans son âme ou dans son corps.

Cet amour n'est-il pas l'accomplissement de la loi, et ne renferme-t-il pas toute la justice chrétienne ? Oui, toute justice intérieure, car il suppose nécessairement des entrailles de miséricorde, l'humilité d'esprit (car l'amour ne s'enfle point d'orgueil), la douceur, l'affabilité, le support (l'amour ne s'aigrit point ; il croit tout, il espère tout, il supporte tout) ; et toute justice extérieure, car l'amour ne fait point de tort au prochain, ni en paroles, ni en actions. Il ne peut volontairement attrister ni blesser personne ; et il est zélé pour les bonnes œuvres. Quiconque aime les hommes fait, suivant l'occasion, du bien à tous, étant (sans partialité et sans hypocrisie) rempli de miséricorde et de bons fruits.

Mais la vraie religion (ou un cœur droit envers Dieu et envers les hommes), est inséparable du bonheur aussi bien que de la sainteté ; car elle n'est pas seulement justice, mais aussi paix et joie par le Saint-Esprit. Quelle est cette paix ? C'est la paix de Dieu, que Dieu seul peut donner, et que le monde ne peut ravir ; c'est la paix qui passe toute intelligence, toute conception purement rationnelle, étant une perception surnaturelle. C'est une paix qui bannit tout doute et toute pénible incertitude ; car le Saint-Esprit témoigne à l'esprit du chrétien qu'il est enfant de Dieu ; elle bannit toute crainte accompagnée d'angoisses : la crainte de la colère de Dieu, la crainte de l'enfer, la crainte du diable, et, en particulier, la crainte de la mort, car celui qui la possède, désire, si c'est la volonté de Dieu, « quitter ce corps pour être avec Christ ».

Cette paix de Dieu, dans toute âme on elle habite, s'accompagne de la joie du Saint-Esprit, c'est-à-dire de la joie qu'opère le Saint-Esprit de Dieu. C'est lui qui produit en nous une humble et calme allégresse en Dieu, par Jésus, par qui nous avons obtenu, dès à présent, la réconciliation avec Dieu ; c'est lui qui nous donne la hardiesse de nous appliquer la déclaration du roi-prophète : « Heureux celui à qui la transgression est remise, à qui le péché est pardonné » (Psaume 32 v. 1). C'est lui qui inspire au chrétien cette joie sereine et solide que lui donne le témoignage de son adoption ; c'est lui qui le porte à se réjouir d'une joie ineffable dans l'espérance de la gloire de Dieu, dans l'espérance de cette glorieuse image qu'il possède déjà en partie, et qui sera accomplie en lui, et dans l'espérance de cette couronne de gloire qui ne peut se flétrir, et qui est réservée pour lui dans les cieux.

Cette sainteté et cette félicité réunies sont appelées dans l'Écriture, tantôt le royaume, de Dieu (comme ici dans notre texte), et tantôt le royaume des cieux. C'est le royaume de Dieu, car c'est le fruit immédiat du règne de Dieu dans l'âme. Aussitôt qu'il manifeste sa puissance en établissant son trône dans les cœurs ils sont remplis de justice, de paix et de joie par le Saint-Esprit. C'est le royaume des cieux, c'est, en quelque degré, le ciel commencé dans l'âme ; car quiconque fait l'expérience de ce bonheur peut dire devant les hommes et les anges : « J'ai la vie éternelle dès ici-bas, pour moi, la gloire céleste commence sur la terre ».

Cette profession est d'accord avec les déclarations formelles de l'Ecriture qui partout témoigne que Dieu nous a donné la vie éternelle, et que cette vie est en son Fils : « La vie éternelle, c'est qu'ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ » (Jean 17 v. 3). Et ceux à qui il fait ce don, pourraient, du milieu même d'une fournaise ardente, lui dire avec assurance : « Seigneur, gardés en sûreté par ta puissance, nous t'adorons d'un cœur joyeux ; nous t'offrons nos chants comme le font autour de ton trône les saints et les anges, car le ciel est partout où l'on sent ta présence ».

C'est ce royaume de Dieu ou des cieux qui est proche. Lorsque ces paroles furent prononcées, elles signifiaient que le temps était dès lors accompli où « Dieu, manifesté en chair », allait établir son royaume parmi les hommes, et régner dans le cœur des siens. Et ce temps ne serait-il pas accompli maintenant ? Car « voici, nous dit-il, je suis avec vous », avec vous qui prêchez la rémission des péchés en mon nom, « jusqu'à la fin du monde ». Ainsi donc, en quelque lien que l'Évangile de Christ soit prêché, ce royaume de Dieu est proche et à la porte ; il est tout près de chacun de vous, vous pouvez y entrer dès cette heure, si seulement vous entendez sa voix qui vous dit : « Repentez-vous et croyez à l'Évangile » (Marc 1 v. 15).

II. « C'est ici le chemin, marchez-y  » (Esaie 30 v. 21) ; et d'abord repentez-vous, c'est-à-dire connaissez-vous vous vous-mêmes. C'est là la première repentance, la conviction de péché qui précède la foi. « Réveille-toi donc ; toi qui dors, reconnais que tu es pécheur, et quelle sorte de pécheur tu es. Reconnais cette corruption foncière de ta nature, par laquelle tu te trouves si loin de la justice primitive ; par laquelle ta chair convoite sans cesse contre l'esprit, tes affections étant inimitié contre Dieu, ne se soumettant pas à la loi de Dieu, et ne pouvant s'y soumettre. Reconnais que tu es corrompu dans toutes les puissances de ton âme ; que tu es totalement corrompu dans chacune de ses facultés, et que tout ton être moral est bouleversé. Les yeux de ton entendement sont si obscurcis qu'ils ne peuvent discerner Dieu ni les choses de Dieu. L'ignorance et l'erreur sont comme un nuage qui t'enveloppe et te couvre d'une ombre de mort. Tu ne connais encore rien comme il faut, ni Dieu, ni le monde, ni toi-même. Ta volonté n'est plus celle de Dieu ; mais, dénaturée et pervertie, elle abhorre le bien que Dieu aime, elle aime toutes les abominations que Dieu hait. Tes affections aliénées de Dieu se prodiguent à tout sur la terre. Tes désirs et tes répugnances, tes joies et tes chagrins, tes espérances et tes craintes, en un mot, tous les mouvements de ton âme sont désordonnés, soit quant à leur degré, soit quant à leur objet. En sorte qu'il n'y a en toi rien d'entier ; mais depuis la plante des pieds jusqu'à la tête, ce n'est, comme dit énergiquement le prophète, « que blessures, meurtrissures et plaies purulentes ».

Telle est la corruption naturelle de ton cœur, du plus profond de ton âme. Et quel arbre, quels rameaux peux-tu attendre d'une telle racine ? C'est d'abord l'incrédulité qui rejette le Dieu vivant, et qui dit : « Qui est l'Éternel pour que j'obéisse à sa voix ? » (Exode 5 v. 2) ; ou bien : « Le Seigneur ne s'inquiète point de ces choses ! ». C'est l'indépendance qui présume de s'égaler au Très-Haut. C'est l'orgueil, sous toutes ses formes, t'enseignant à dire : « …tu dis: Je suis riche, je me suis enrichi, et je n'ai besoin de rien… » (Apocalypse 3 v. 17). De cette source impure jaillissent les flots amers de la vanité, de la soif de louanges, de la cupidité, de la convoitise de la chair, de la convoitise des yeux, de l'orgueil de la vie. De là naissent la colère, la haine, la malice, la vengeance, l'envie, la jalousie, les mauvais soupçons ; de là tous les désirs vains et pernicieux qui t'embarrassent maintenant dans bien du tourment, et qui, si tu ne préviens à temps ce malheur, entraîneront enfin ton âme dans la perdition éternelle.

Et quels fruits peuvent croître sur de tels rameaux ? Ceux-là seuls qui sont amers et mauvais en tout temps. De l'orgueil viennent les contentions, les vanteries qui cherchent et obtiennent les louanges des hommes, et privent Dieu de cette gloire qu'il ne donnera point à autrui. De la convoitise de la chair vient la gourmandise, l'ivrognerie, la sensualité, la fornication, l'impureté, qui souillent de mille manières ce corps qui devait être le temple du Saint-Esprit. De l'incrédulité, toutes sortes de paroles et d'œuvres mauvaises. Mais le temps manquerait pour faire le compte de tout, de toutes les paroles vaines par lesquelles tu as bravé le Très-haut, contristé le Saint d'Israël, de toutes les œuvres mauvaises que tu as faites ; mauvaises en elles-mêmes, ou mauvaises en ce qu'elles ne se proposent pas la gloire de Dieu, car tes actes coupables sont en plus grand nombre que les cheveux de ta tête. Qui pourra compter le sable de la mer, ou les gouttes de pluie, ou tes iniquités.

Mais ne sais-tu pas que « le salaire du péché c'est la mort » (Romains 6 v. 23), la mort non pas seulement temporelle mais éternelle ? « L'âme qui aura péché sera celle qui mourra » (Ézéchiel 18 v. 20), car la bouche de l'Éternel a parlé. Elle mourra de la mort seconde. « Ils seront punis d'une perdition éternelle par la présence du Seigneur et par sa puissance glorieuse ». Telle est la sentence. Ne sais-tu pas que tout pécheur doit être puni « par la géhenne du feu ? ». L'expression du texte ne signifie pas seulement qu'il a lieu de craindre le feu de l'enfer, cette version serait beaucoup trop faible ; mais qu'il est déjà sous la sentence du feu de l'enfer, déjà condamné, et que déjà se prépare l'exécution. Tu as mérité la mort éternelle, c'est le juste salaire de la méchanceté de ton cœur et de tes actions. Il serait juste que la sentence s'exécutât dès cette heure. Le vois-tu, le sens-tu ? Crois-tu réellement mériter la colère de Dieu, la damnation éternelle ? Es-tu convaincu que Dieu ne te ferait aucun tort si maintenant il commandait à la terre de s'entrouvrir pour t'engloutir, s'il te précipitait maintenant dans l'abîme, dans le feu qui ne s'éteint point ? Si Dieu t'a déjà donné la repentante, tu sens vivement qu'il en est ainsi, et que c'est par sa pure grâce que tu n'as point encore été consumé et balayé de la face de la terre.

Et que feras-tu pour apaiser la colère de Dieu, pour expier tous tes péchés, et pour échapper à la peine que tu as si justement méritée ? Hélas tu ne peux rien faire, rien qui puisse expier devant Dieu une seule œuvre, une seule parole, une seule pensée mauvaise. S'il t'était possible de ne faire que le bien désormais, si dès cette heure jusqu'au jour du jugement, il t'était possible de vivre dans une parfaite et constante obéissance, cela même n'expierait point le passé. Pour ne pas avoir augmenté ta dette, tu n'en serais pas déchargé ; elle resterait aussi grande que jamais. Que dis-je ? Toute l'obéissance présente ou future des hommes et des anges serait insuffisante pour couvrir devant la justice divine un seul péché. Quelle était donc ton erreur si tu pensais expier toi-même tes péchés, par quelque chose que tu puisses faire ? Il en coûte plus pour le rachat d'une seule âme que ne pourrait payer l'humanité tout entière ; en sorte que s'il n'y avait pas eu d'autre secours pour l'homme coupable, il aurait certainement été perdu pour toute l'éternité.

Mais supposons qu'une obéissance parfaite pour l'avenir pût expier les péchés passés, cela même ne te servirait de rien, car tu n'es pas capable de garder une telle obéissance, non pas même en un seul point. Fais-en l'épreuve ; essaie de secouer ce péché extérieur qui t'enveloppe si aisément. Tu ne le peut, à moins qu'auparavant ton cœur ne soit changé, car aussi longtemps que l'arbre demeure mauvais, il ne saurait porter de bons fruits. Mais es-tu capable de changer ton cœur souillé en un cœur saint ? Vivifierais-tu une âme qui est morte dans le péché, morte à Dieu, et ne vivant que pour le monde ? Essaie plutôt de ressusciter un cadavre, de rendre la vie à celui qui gît dans le tombeau ! Et même tu ne peux, en aucun degré, vivifier ton âme, pas plus que donner le moindre degré de vie à un corps mort. Tu ne peux rien en cette affaire, ni le plus ni le moins : tu es complètement privé de force. Être profondément convaincu de ton incapacité, de ta culpabilité et de ta méchanceté, c'est là cette repentante dont on ne se repent point, et qui est l'avant-courrière du royaume de Dieu.

Si à cette conviction vivante de tes péchés extérieurs et intérieurs, de ta culpabilité extrême et de ton incapacité totale quant au bien, se joignent des sentiments qui y répondent ; un profond chagrin d'avoir méprisé les grâces que Dieu t'offrait, des remords, des reproches intérieurs qui te ferment la bouche, une confusion qui t'empêche de lever les yeux au ciel, la crainte de la colère de Dieu qui pèse sur toi, de sa malédiction qui plane sur ta tête, et de l'ardente indignation qui va dévorer ceux qui oublient Dieu et qui n'obéissent pas à Notre Seigneur Jésus-Christ ; si tu as le désir sérieux d'échapper à cette indignation, de fuir le mal et de t'attacher au bien, alors, je te le dis, au a nom du Seigneur, tu n'es pas loin du royaume de Dieu ; encore un pas et tu y entreras ; tu te repens déjà, maintenant crois à l'Evangile.

L'Evangile, c'est-à-dire la bonne nouvelle pour les pécheurs perdus, signifie, dans le sens le plus large, toute la révélation faite aux hommes par Jésus-Christ, et quelquefois tout le récit de ce que notre Seigneur a fait et souffert tandis qu'il habitait parmi les hommes. Mais en voici le résumé : « Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs » (1 Timothée 1 v. 15). « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en Lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle » (Jean 3 v. 16). « Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris » (Ésaïe 53 v. 5).

Crois cela, et le royaume de Dieu est à toi. Par la foi tu obtiens l'effet de la promesse. Le Seigneur absout et pardonne quiconque se repent véritablement, et reçoit, d'une foi non feinte, son saint Évangile. Dès l'instant où Dieu te dira : « aie bon courage, tes péchés te sont pardonnés, son royaume sera à toi ; tu auras la justice, la paix et la joie par le Saint-Esprit ».

Prends seulement garde de ne pas t'abuser sur la nature de cette foi. Elle n'est pas, comme quelques-uns l'ont rêvé, un simple assentiment à la vérité de la Bible, ou à tout ce que renferment l'Ancien et le Nouveau Testament ; les démons croient ces choses tout aussi bien que toi ou moi, et ils n'en sont pas moins démons. Mais cette foi est, par-dessus tout cela, une ferme confiance en la miséricorde de Dieu par Jésus-Christ ; c'est la confiance en un Dieu qui pardonne ; c'est une divine certitude que « Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n'imputant point aux hommes leurs offenses » (2 Corinthiens 5 v. 19 ). C'est, en particulier, la confiance par laquelle le croyant peut dire : « Le Fils de Dieu m'a aimé et s'est donné lui-même pour moi » (Galates 1 v. 4) , et moi, oui moi-même, je suis réconcilié maintenant avec Dieu par le sang de la croix.

As-tu cette foi ? Alors la paix de Dieu est dans ton cœur ; les soupirs, le chagrin ont disparu ; tu ne doutes plus de l'amour de Dieu ; il t'est aussi clair que le soleil en plein midi. Tu t'écris : « Je chanterai toujours les bontés de l'Eternel ; ma bouche fera connaître à jamais ta fidélité » (Psaume 89 v. 1). Tu ne crains plus l'enfer de la mort, ni celui qui avait l'empire de la mort, c'est-à-dire du diable ; tu ne crains plus Dieu, tu as seulement une crainte filiale de l'offenser. As-tu cette foi ? Alors ton âme magnifie le Seigneur et ton esprit se réjouit en Dieu ton Sauveur. Tu te réjouis de ce que tu as la rédemption par le sang de Christ, le pardon des péchés. Tu te réjouis par cet esprit d'adoption qui crie en ton cœur : Abba ! Père ! Tu te réjouis dans une pleine espérance d'immortalité, en t'avançant vers le but, le prix de ta vocation céleste ; tu es joyeux dans une vive attente de tous les biens que Dieu a préparés pour ceux qui l'aiment.

As-tu cette foi ? Alors l'amour de Dieu est maintenant répandu dans ton cœur. Tu l'aimes, parce qu'il nous a aimés le premier ; et parce que tu aimes Dieu, tu aimes aussi ton frère, et étant rempli d'amour, de paix et de joie, tu es aussi plein de long support de douceur, de fidélité, de bonté, d'humilité, de tempérance, et de tous les autres fruits de l'Esprit ; en un mot, de toutes les affections saintes et célestes ; car le voile est ôté, et contemplant à visage découvert la gloire du Seigneur, tu es transformé en la même image, de gloire en gloire, par l'Esprit du Seigneur.

Viens donc te jeter aux pieds de l'Agneau de Dieu avec tous tes péchés, quel qu'en soit le nombre, et l'entrée te sera maintenant donnée dans le royaume de Notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ !

 

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