Lés réunions de prières.1
En considérant le sujet profondément important de la prière, deux choses retiennent notre attention : premièrement, la base morale de la prière ; deuxièmement, ses conditions morales.
« Faites en tout temps par l'Esprit toutes sortes de prières et de supplications. Veillez à cela avec une entière persévérance, et priez pour tous les saints » (Éphésiens 6 v. 18). L’Écriture nous présente la base morale de la prière dans des paroles comme celles-ci : « Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez, et cela vous sera accordé » (Jean 15 v. 7).
Et encore : « Bien-aimés, si notre cœur ne nous condamne pas, nous avons de l'assurance devant Dieu. Quoi que ce soit que nous demandions, nous le recevons de lui, parce que nous gardons ses commandements et que nous faisons ce qui lui est agréable » (1 Jean 3 v. 21 et 22). De même lorsque Paul réclame les prières des saints, il expose la base morale de sa demande, en disant : « Priez pour nous ; car nous croyons avoir une bonne conscience, voulant en toutes choses nous bien conduire » (Hébreux 13 v. 18).
L’état personnel de ceux qui prient.
De ces passages et de plusieurs autres de même importance, nous apprenons que, pour que la prière soit efficace, il faut que le cœur soit obéissant, l’esprit droit et avoir une bonne conscience. Si l’âme n’est pas en communion avec Dieu, si elle ne demeure pas en Christ, si elle n’est pas gouvernée par ses saints commandements, comment espérons-nous des réponses à nos prières ?
Nous serions de ces gens dont parle l’apôtre Jacques, qui demandent, et ne reçoivent pas, parce qu’ils demandent mal, afin de le dépenser pour leurs passions : « Vous convoitez, et vous ne possédez pas ; vous êtes meurtriers et envieux, et vous ne pouvez pas obtenir ; vous avez des querelles et des luttes, et vous ne possédez pas, parce que vous ne demandez pas. Vous demandez, et vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal, dans le but de satisfaire vos passions. Adultères que vous êtes ! ne savez-vous pas que l'amour du monde est inimitié contre Dieu ? » (Jacques 4 v. 2 à 4).
Comment Dieu pourrait-il, comme un Père saint, exaucer de telles requêtes ? Combien il est donc nécessaire de prendre sérieusement garde sur quelle base nous présentons nos prières. Comment l’apôtre aurait-il pu demander aux frères de prier pour lui, s’il n’avait pas eu une bonne conscience, un œil simple, un cœur droit et la conviction intérieure qu’en toutes choses, il désirait réellement vivre honnêtement ?
Cela eût été impossible. On dit volontiers : « Souvenez-vous de moi dans vos prières ! », et assurément, rien ne peut être plus précieux que d’être porté sur le cœur des chers enfants de Dieu, quand ils s’approchent du trône des miséricordes. Faisons quand même attention à la base morale de nos requêtes. Quand nous disons : « Frères, priez pour nous ! », pouvons-nous vraiment ajouter, comme en la présence de Christ qui sonde les cœurs : « Car nous croyons que nous avons une bonne conscience, désirant bien nous conduire en toutes choses selon les Écritures ? »
Lorsque nous nous prosternons devant le trône de la grâce, est-ce avec un cœur qui ne nous condamne pas, un cœur droit et un œil simple ; une âme qui demeure réellement en Christ et qui veut garder tous ses commandements ?
Ce sont là, cher lecteur, des questions sérieuses et qui sondent notre cœur. Elles descendent jusqu’aux racines et aux sources morales de notre être. Mais il est bon que nos cœurs soient sondés profondément à l’égard de toutes choses, et particulièrement pour ce qui a un rapport à la prière.
Il y a beaucoup de manque de réalité dans nos prières, une triste absence de la base morale, beaucoup de : « Vous demandez mal ». De là, le manque de puissance et d’efficacité dans nos prières ; de là aussi le formalisme, la routine et même l’hypocrisie positive. Le psalmiste dit : « Si j'avais conçu l'iniquité dans mon cœur, le Seigneur ne m'aurait pas exaucé » (Psaume 66 v. 18). Que cela est solennel !
Notre Dieu veut de la vérité. Lui-même, béni soit son saint nom, est vrai avec nous ; et il veut que nous soyons vrais avec lui. Il veut que nous venions devant lui, tels que nous sommes réellement, et avec nos besoins réels. Hélas, combien il en est souvent autrement. Combien souvent nos prières sont plus semblables à des discours qu’à de puissantes requêtes ; plus semblables à de petites prédications, qu’à de véritables expressions de besoin sérieux. Il semble quelquefois que nous nous proposons d’exposer des principes à Dieu, de lui expliquer les choses comme s’il ne les connaissait pas...
Voilà ce qui exerce trop souvent sur nos réunions de prières, une influence si desséchante, qui leur ôte leur fraîcheur spirituelle et leur intérêt. Ceux qui savent réellement ce qu’est la prière, perçoivent leur vraie valeur. Ils viennent à la réunion de prières afin de prier, non pour entendre des discours ou pour en faire.
S’ils ont besoin d’apprendre, ils peuvent assister aux réunions où l’on étudie la parole de Dieu, aux instructions ou aux prédications ; mais quand ils vont à la réunion de prières, c’est pour prier. Pour eux, la réunion de prières est le lieu où s’expriment les besoins et où l’on attend la bénédiction ; le lieu où l’on confesse sa faiblesse et où l’on attend la force et la lumière du Saint-Esprit.
Telle est leur idée, du lieu « où l’on avait coutume de faire la prière » (Actes 16 v. 13) ; et c’est pourquoi, quand ils s’assemblent là, ils ne sont ni disposés, ni préparés à entendre de longues prédications sous forme de prière à peine supportables.
Nous parlons ouvertement parce que nous ressentons un grand besoin de réalité, de sincérité et de vérité dans nos réunions de prières. Il arrive souvent que ce que nous appelons une prière, n’est pas une prière du tout, mais simplement une exposition de certaines vérités connues et reçues, dont la constante répétition devient très pénible et fatigante.
Que peut-il y avoir de plus affligeant que d’entendre un homme à genoux exposant des principes ou développant des doctrines ? Il est impossible de ne pas se demander : Cet homme parle-t-il à Dieu ou à nous ? Si c’est à Dieu, assurément rien ne peut être plus irrespectueux que d’essayer de lui expliquer les choses ; si c’est à nous, alors ce n’est pas prier du tout. Plus tôt, nous quitterons cette attitude de prière, mieux ce sera ; celui qui parle serait plus à sa place debout, et nous assis, pour écouter.
En parlant de l’attitude, nous voudrions avec tout notre amour, attirer l’attention des croyants sur une chose qui, à notre jugement, demande une sérieuse considération. Nous voulons parler de l’habitude qu’ont plusieurs de rester assis pendant le saint et solennel exercice de la prière. Nous sommes bien persuadés, nous n’avons pas besoin de le dire, que l’important, dans la prière, est d’avoir le cœur dans une disposition convenable.
En outre, nous savons et nous ne voulons pas oublier, que plusieurs de ceux qui assistent à nos réunions de prières sont des personnes âgées, infirmes, ou délicates, à qui il serait impossible de s’agenouiller pendant un certain temps. Il arrive aussi que, là même où il n’y a pas de faiblesse physique et où il y aurait un réel et sincère désir de s’agenouiller – dans le sentiment que c’est l’attitude qui nous convient devant Die – il est impossible, à cause du manque d’espace, de changer de position.
Toutes ces choses doivent être prises en considération. Mais, en accordant une aussi grande marge que possible à ces cas particuliers, nous sommes forcés néanmoins de reconnaître qu’il y a souvent un manque déplorable de révérence dans nos réunions publiques de prières.
Nous voyons souvent des jeunes gens et des jeunes filles qui ne peuvent invoquer ni la faiblesse physique, ni le manque d’espace, rester assis pendant toute la durée d’une réunion de prières. Ceci, nous devons le dire, est choquant et irrévérencieux, et ne peut, nous le croyons, que contrister l’Esprit du Seigneur. Nous devons nous mettre à genoux quand nous le pouvons. Cette attitude exprime le respect et la révérence. Le divin Maître se mit à genoux et pria : « Puis il s'éloigna d'eux à la distance d'environ un jet de pierre, et, s'étant mis à genoux, il pria » (Luc 22 v. 41).
L’apôtre Paul fit la même chose après s’être adressé à la communauté : « Et ayant dit ces choses, il se mit à genoux et pria avec eux tous » (Actes 20 v. 36).
Voyez encore 2 Chroniques 6 v. 13 ; Daniel 6 v. 10 ; Esdras 9 v. 5 ; Ésaïe 45 v. 23 ; Actes 9 v. 40 ; 21 v. 5 ; Romains 14 v. 11 ; Philippiens 2 v. 10 ; Éphésiens 3 v. 14 ; Apocalypse 4 v. 10 ; 5 v. 8 ; etc.
Honnêtement, n’est-il pas bienséant et convenable de faire ainsi ? Peut-il y avoir quelque chose de plus inconvenant que de voir dans une assemblée des personnes demeurer assises, se mettant à leur aise, discutant entre elles, distraites, dans des tenues inconvenables, pendant que la prière est offerte à un Dieu trois fois saint? Nous considérons cela comme tout à fait irrévérencieux, et nous supplions instamment tous les enfants de Dieu, de prêter à ce sujet leur très sérieuse attention, en s’efforçant de toute manière, soit par leur conseil, soit par leur exemple, à encourager la pieuse et scripturaire coutume de s’agenouiller pour la prière dans nos assemblées.
Ceux qui prennent part à la réunion rendraient tout cela bien plus facile à tous égards par des prières courtes et ferventes. Mais nous parlerons plus loin de ce sujet.
Être d’accord, pas de fatalisme et avoir des besoins…
Nous allons considérer maintenant, à la lumière des saintes Écritures, les conditions morales ou les attributs de la prière. Rien n’est plus précieux que d’avoir l’autorité de la Parole de Dieu pour tout acte pratique de notre vie chrétienne. L’Écriture doit être notre seul, grand et suprême arbitre dans toutes nos discussions et dans toutes nos interrogations ; ne l’oublions jamais.
Que dit donc l’Écriture quant aux conditions morales nécessaires de la prière en commun, car c’est le sujet qui nous occupe spécialement ici ? Lisez Matthieu 18 v. 19 : « Je vous dis encore que, si deux d'entre vous s'accordent sur la terre pour demander une chose quelconque, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cieux ».
Nous apprenons ici qu’une des conditions nécessaires de la prière est l’accord unanime, l’accord du cœur, la parfaite unité de sentiment ; toute note discordante apporte du trouble. Si, par exemple, nous nous réunissons afin de prier pour les progrès de l’Évangile, la conversion des âmes, il faut que nous soyons d’un même sentiment sur ce sujet, que nous soyons toutes et tous « d’accord » devant Dieu.
Il ne faut pas que chacun apporte une pensée particulière et personnelle, autrement nous ne pouvons pas nous attendre à un exaucement sur le fondement de la Parole du Seigneur citée plus haut. Ceci est un point d’une immense portée morale, et qui influe beaucoup sur le ton et le caractère de nos prières en commun et de nos réunions de prières. Nous ne donnons pas sans doute à ce sujet une attention assez sérieuse.N’avons-nous pas, en effet, souvent à déplorer le caractère sans objet de nos réunions de prières, alors que nous devrions être concentrés ensemble, sur un sujet précis pour lequel nous implorons le Seigneur ? Nous lisons dans le chapitre premier des Actes et au verset 14 : « Tous d'un commun accord persévéraient dans la prière, avec les femmes, et Marie, mère de Jésus, et avec les frères de Jésus » (*).
(*) Il est intéressant de voir « Marie, la mère de Jésus », nommée ici comme étant à la réunion de prières. Qu’aurait-elle pensé si quelqu’un lui avait dit que, plus tard, des millions de chrétiens professants lui adresseraient à elle des milliers de prières ?
Dans le second chapitre : « Et comme le jour de la Pentecôte s’accomplissait, ils étaient tous ensemble dans un même lieu » (Actes 2 v. 1). Ils attendaient, selon le commandement du Seigneur, la promesse du Père, le don du Saint-Esprit. Ils avaient la Parole assurée de la promesse. Le Consolateur devait venir infailliblement ; mais ceci, bien loin de les dispenser de la prière, était le fondement de ce moment.
Ils étaient dans un même lieu, ils priaient d’un commun accord : Ils attendaient l’Esprit promis. Hommes et femmes étaient absorbés par un seul objet, attendaient dans un saint accord, jour après jour, ardemment, avec ferveur, qu’ils fussent revêtus de la puissance d’en haut. Ne devrions-nous pas, nous aussi, nous rassembler comme eux dans cette même pensée ?
Sans doute, Dieu en soit béni, nous n’avons pas à demander la venue du Saint-Esprit, car il a déjà été répandu ; mais nous avons à rechercher la plénitude de sa puissance bénie dans nos vies. Supposons que nous nous trouvions placés dans un lieu où la mort et les ténèbres spirituelles règnent, où il n’y a pas un souffle de vie, pas une feuille qui remue. Le ciel semble d’airain, la terre de fer, un formalisme desséchant domine partout ; la routine, une profession sans puissance, la superstition sont à l’ordre du jour.
Que faire ? Nous laisser paralyser ou nous laisser gagner par cette atmosphère malsaine et mortelle ? Assurément non ! Que faut-il donc faire ? Réunissons-nous, même si nous n’étions que deux à sentir ce triste état de choses, et « d’un commun accord », répandons nos cœurs devant Dieu, et attendons-nous à lui, jusqu’à ce qu’il envoie une abondante pluie de bénédictions sur ce lieu aride.
Ne nous croisons pas les bras, en disant : « Le temps n’est pas encore venu ! » Ne nous laissons pas aller à ce funeste raisonnement d’une certaine théologie, justement appelée fatalisme, qui dit : « Dieu est souverain ; il agit selon sa volonté ; nous devons attendre le moment choisi par lui ; les efforts humains sont inutiles ; nous ne pouvons pas opérer un réveil ; il faut prendre garde de ne pas causer ce qui ne serait que de l’excitation ! »
Ces raisonnements sont d’autant plus dangereux qu’ils ont quelque chose de plausible. En effet, tout cela est très vrai en tous points ; mais c’est seulement un côté de la vérité. C’est la vérité et rien que la vérité, mais ce n’est pas toute la vérité. Là est le mal. Rien n’est plus à craindre que de ne considérer qu’un côté de la vérité. Combien de chrétiens fervents ont bronché et ont été complètement détournées du droit chemin, pour n’avoir vu qu’un côté d’une vérité ou avoir mal appliqué une vérité.
Plus d’un serviteur utile et dévoué, a été froissé et poussé hors du champ de travail par l’insistance peu judicieuse que l’on a mise dans la présentation de certaines doctrines, qui étaient vraies en partie, mais qui n’étaient pas la pleine vérité de Dieu.
Rien cependant ne peut atteindre ou affaiblir la force de la déclaration du Seigneur en Matthieu 18 v. 19. Elle subsiste dans toute sa divine plénitude, dans sa gratuité et sa valeur, devant l’œil de la foi ; ses termes sont clairs et non sujets à méprise : « Je vous dis encore que, si deux d'entre vous s'accordent sur la terre pour demander une chose quelconque, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cieux ».
Voilà notre principe et notre autorisation pour nous réunir afin de prier pour une chose quelconque qui serait placée devant nos cœurs. Si nous déplorons la froideur, la stérilité et la mort qui nous entourent. Si nous sommes abattus par le peu de fruits apparents de la prédication de l’Évangile, par le manque même de puissance dans la prédication et l’absence de résultats pratiques. Si nous sommes humiliés par la stérilité, la pesanteur et le ton peu élevé de nos réunions, autour de la table du Seigneur, ou devant le trône de la grâce, ou autour de la source rafraîchissante des Saintes Écritures, que devons-nous faire ? Nous croiserons-nous les bras dans une froide et incrédule indifférence ? Nous découragerons-nous et donnerons-nous cours aux plaintes, aux murmures, à l’irritation peut-être ? Non, à Dieu ne plaise !
Mais réunissons-nous « d’un commun accord, dans un même lieu », tombant sur nos faces devant notre Dieu, et répandant nos cœurs comme le cœur d’un seul homme devant lui ; en nous appuyant sur la fidèle parole du Seigneur en Matthieu.
Là est le grand remède, la ressource infaillible. Oui, « Dieu est souverain » ; mais c’est la raison même pour que l’on s’attende à lui. Sans doute, les efforts humains sont vains, et nous ne pouvons opérer un réveil par nous-même ; mais c’est pour cela même que nous devons chercher la puissance divine, et demander à Dieu qu’il sauve des âmes.
Sans doute encore, nous devons craindre ce qui ne serait que de l’excitation ; mais la froideur, la mort, l’indifférence de l’égoïsme, ne devons-nous pas les craindre tout autant ? Aussi longtemps que Christ est à la droite de Dieu, aussi longtemps que Dieu, le Saint-Esprit, est au milieu de nous et dans nos cœurs, aussi longtemps que nous avons la parole de Dieu et la déclaration de Matthieu 18 v. 19 ; il n’y a aucune excuse quelconque pour la stérilité, la froideur et l’indifférence.
Il n’y a aucune excuse pour accepter des réunions pesantes et sans profit spirituel ; aucune excuse pour le manque de fraîcheur dans nos assemblées ou de bénédiction dans notre service. Attendons-nous à Dieu dans un saint accord, et il bénira sûrement.