Comme Christ (jours 13, 14).
Comme Christ. Dans sa pitié (13). Un avec le Père (14).
Dans sa pitié (13).
« Alors Jésus dit : J'ai pitié de cette multitude (Matthieu 15 v. 32) ». - « Ne te fallait-il pas aussi avoir pitié de ton compagnon de service, comme j'avais eu pitié de toi ? (Matthieu 18 v. 33) ». Matthieu nous dit que notre Seigneur fut ému de pitié pour la multitude. Toute sa vie a témoigné de la compassion avec laquelle il avait dès l'éternité regardé le pécheur, aussi bien que de sa sympathie pour toutes les souffrances de l'humanité. Il était bien en ceci le reflet du Dieu des miséricordes, du Père qui, « touché de compassion pour son fils prodigue, se jette à son cou et le baise (Luc 15 v. 20) ».
Cette compassion du Seigneur Jésus nous montre bien que ce n'était pas seulement par devoir et par contrainte qu'il faisait la volonté de Dieu, mais que cette volonté divine était la sienne aussi, qu'elle était ainsi le mobile et la règle de tous ses sentiments, de toutes ses actions. Après avoir dit : « Je suis descendu du ciel pour faire non ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé », il ajoute aussitôt : « Or, c'est ici la volonté du Père qui m'a envoyé, que je ne perde aucun de ceux qu'il m'a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour. C'est ici la volonté de celui qui m'a envoyé, que quiconque contemple le Fils et croit en lui, ait la vie éternelle (Jean 6 v. 39) ».
Pour le Seigneur Jésus, la volonté de Dieu ne consistait, pas seulement en telle défense ou tel commandement. Non ; pénétrant le sens intime de la volonté de Dieu, il savait que son but était de donner la vie éternelle aux pécheurs perdus.
C'est parce que « Dieu est amour » que sa volonté a été de donner libre cours à son amour pour le salut des pécheurs ; et c'est pour accomplir cette volonté-là de notre Dieu que le Seigneur Jésus est descendu sur la terre. Il ne l'a pas fait dans un esprit servile et pour obéir à une volonté étrangère à la sienne, mais par sa vie individuelle, par tous les traits de son caractère, il a prouvé que cette volonté et cet amour du Père l'animaient lui aussi. Non seulement sa mort à Golgotha, mais sa pitié pour tous les malheureux, mais ses rapports d'affection avec eux prouvaient que la volonté du Père était Véritablement sa volonté à lui. De toute façon Il montrait que la vie n'avait de valeur pour lui qu'autant qu'elle lui donnait l'occasion d'accomplir la Volonté de Son Père.
Bien-aimés disciples de Christ, Vous qui Vous êtes consacrés à suivre l'exemple du Seigneur, que la volonté du Père vous soit ce qu'elle était pour le Fils. La volonté du Père, quant à la mission de son Fils, était de manifester et de faire triompher ses compassions divines en sauvant les pécheurs perdus. Jésus ne pouvait accomplir cette volonté qu'en ressentant lui-même cette compassion. À présent, la volonté de Dieu demande aussi de nous ce qu'elle demandait de Jésus, de sauver ceux qui périssent. Impossible à nous d'accomplir cette volonté, sans avoir aussi cette compassion de notre Dieu se manifestant dans l'ensemble et les détails de notre vie.
Ne nous bornons pas, pour faire la volonté de Dieu, à éviter ce qu'il défend, ou à faire ce qu'il commande, mais qu'elle consiste pour nous à avoir pour le pécheur les mêmes sentiments que Dieu a eu lui-même, à ne vivre que pour cela. En nous dévouant entièrement à chacun des pauvres pécheurs qui nous entourent, en allant à leur secours avec amour, nous prouverons que réellement la volonté de Dieu est devenue notre volonté à nous aussi.
Puisque nous avons pour Père le Dieu d’amour, et pour vie le Christ plein de compassion, rien de plus juste que l'ordre donné à tout chrétien, d'avoir une vie de dévouement à ses semblables.
La compassion est cet esprit de charité qu'éveille la vue de la misère, ou du péché. Que d'occasions chaque jour de pratiquer cette vertu céleste et qu'il en est besoin dans un monde si rempli de misère et de péché ! Il faut donc que, soit par la prière, soit par la pratique, le chrétien entretienne en lui ces sentiments de compassion qui sont un des plus beaux traits de sa ressemblance avec son Maître.
L'amour éternel cherche à se répandre pour sauver ceux qui périssent. Il demande des vaisseaux qu'il puisse remplir de cet amour divin et envoyer parmi ceux qui courent à leur mort, afin qu'ils vivent à jamais. Il demande des cœurs qu'Il puisse remplir de tendres compassions, des cœurs qui soient heureux de faire connaître les compassions de Dieu, heureux de vivre uniquement pour sauver les pécheurs.
O mon frère, la compassion divine qui a eu pitié de toi, t'appelle, toi aussi qui as trouvé grâce, à laisser remplir ton cœur de son amour. Elle veut faire de toi aussi un témoin de l'amour de Dieu par les compassions que tu auras pour tous ceux dont tu es entouré.
Que d'occasions tout à l'entour de nous d'exercer notre compassion ! Que de besoins matériels ! Les pauvres, les malades, les veuves, les orphelins, les âmes angoissées et découragées que rien ne console mieux qu'un cœur pitoyable. Tous ceux-là vivent au milieu de chrétiens, et pourtant, à les entendre, ils trouvent souvent plus de sympathie à leurs maux chez les enfants du monde que chez les gens trop uniquement préoccupés de leur propre salut.
O frères, demandez à Dieu un cœur d’amour, toujours prêt à être l'instrument de la compassion de Dieu. C'est la tendre sympathie de Jésus qui lui attirait les foules sur la terre, et, encore à présent, c'est cette même tendre sympathie qui, plus que toute autre chose, amènera des âmes à vous et à votre Maître. Que de misères spirituelles de tous côtés ! Ici, c'est un riche, pauvre des biens spirituels ; là, un jeune homme qui se perd, ou bien quelque ivrogne, quelque malheureux au désespoir. Peut-être aussi n'est-ce rien de tout cela ; ce sont seulement des mondains enlacés par les folies et les vanités du monde.
Que de fois on entend parler d'eux avec une froide indifférence, ou porter sur leur compte des jugements sévères. Il manque là un cœur compatissant. La compassion sait que sa place est auprès des plus profondes misères, et que c'est précisément là que Dieu la veut. La compassion ne se décourage pas, ne se désespère pas, elle ne se laisse pas rebuter, car c'est l'amour dévoué de Christ qui l'inspire.
Le chrétien ne limite pas ses compassions à son propre petit cercle ; son cœur est plus large, car son Maître lui a assigné pour champ de travail tout le monde païen. Il cherche à se rendre compte des circonstances des païens, il porte leurs difficultés dans son cœur et contribue à les encourir : Qu’il soit près ou loin d'eux, qu'il soit lui-même témoin de leur dégradation ou qu’il en entende seulement parler, il se souvient qu'il vit uniquement pour accomplir la volonté de Dieu, en ayant pitié de ceux qui périssent et en cherchant à les sauver.
Comme Christ dans ses compassions ! Faisons de ces mots notre devise. Après avoir raconté la parabole du Samaritain qui, ému de pitié, secourut le pauvre blessé, le Seigneur ajoute : « Va, et fais de même (Luc 10 v. 37) ». - « Afin que vous fassiez comme je vous ai fait (Jean 13 v. 15) ». Nous qui devons tout à ses compassions, nous qui nous disons ses disciples, qui voulons suivre ses traces et porter son image, montrons aussi cette même compassion pour tous.
Nous le pouvons, il vit en nous et son Esprit agit en nous. Avec prière, avec une foi ferme, voyons dans l'exemple qu'il nous a donné, le gage de ce que nous pouvons être. Quelle joie pour Jésus quand il nous voit prêt non seulement à recevoir pour nous-même l'effet de sa compassion, mais aussi à la faire connaître à d'autres. Et pour nous, quelle joie inexprimable d'avoir un cœur comme celui de Christ, plein de compassion et de miséricorde.
Prière.
O mon Dieu, ma vocation devient presque trop élevée. C'est donc jusque dans tes compassions et ton amour que je dois te suivre, que je dois t'imiter et reproduire ce que fut ta vie. C'est par la compassion qui me portera à soulager toute misère physique et spirituelle, c'est par la douce et sympathique charité qui prouvera aux pécheurs mon désir de leur être en bénédiction, que le monde doit se former quelque idée de tes compassions à toi ! Miséricordieux Sauveur, pardonne-moi d'avoir si peu réalisé tout cela dans ma vie. Puissant Rédempteur, que ta compassion ne se borne pas à me sauver, mais qu'elle prenne si bien possession de moi, habitant si continuellement en moi, qu'elle devienne le souffle même et la joie de ma vie. Que la compassion que tu as eue de moi devienne en moi une source jaillissante de compassion pour les autres.
Seigneur Jésus ! Je sais que tu ne peux m'accorder cette grâce qu'à la condition que je renonce à moi-même, à tout effort de ma part pour diriger et sanctifier ma vie, et que je te laisse, toi, Seigneur, vivre en moi et devenir ma vie. O Dieu de miséricorde ! Je m'abandonne à toi. Tu as droit à me posséder, toi seul. Rien de plus nécessaire et de plus précieux pour moi que tes compassions ! Quoi de plus heureux pour moi que de te ressembler !
Seigneur ! Me voici. J'ai la confiance que tu m'apprendras toi-même à obéir à cette parole : « Ne te fallait-il pas avoir pitié comme j'avais eu pitié de toi ? » C'est avec cette confiance que je vais sortir aujourd'hui même pour trouver dans mes rapports avec les autres l'occasion de montrer combien tu m'as aimé. Avec cette confiance en toi, Seigneur, le grand but de ma vie sera de te gagner des âmes. Amen.
Un avec le Père.
« Père saint, garde en ton nom ceux que tu m'as donnés, afin qu'ils soient un comme nous... afin que tous soient un comme toi, ô Père, tu es en moi et moi en toi ; afin qu'ils soient aussi un en nous, pour que le monde croie que c'est toi qui m'as envoyé. Je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, afin qu'ils soient un comme nous sommes un, moi en eux et toi en moi, afin qu'ils soient parfaitement un et que le monde connaisse que tu m'as envoyé et que tu les aimes comme tu m'as aimé (Jean 17 v. 11 à 22) ».
Quel trésor inexprimable que cette prière sacerdotale ! Nous avons là le cœur de Jésus exposant à nos regards ce que son amour souhaite pour nous. Nous avons là le ciel ouvert, nous entendons là ce que notre Intercesseur demande sans cesse pour nous, ce qu’il obtient du Père pour nous. Dans cette prière, l'union mutuelle des croyants tient plus de place que tout le reste. C'est la principale requête de Jésus pour tous ceux qui croiront plus tard. (Versets 20 v. 26). Trois fois il demande qu'ils soient unis entre eux.
Le Seigneur nous dit clairement pourquoi il le désire autant : Parce que c'est là pour le monde la seule preuve convaincante que le Père l'a envoyé. Malgré tout son aveuglement, le monde voit bien que l'égoïsme est une malédiction qui vient du péché ; aussi les enfants de Dieu n'avancent guère à lui parler de leur nouvelle naissance, de leur bonheur et des merveilles opérées au nom de Jésus, ou à vouloir lui prouver la vérité des Écritures ; mais quand le monde voit une Église d'où l'égoïsme est banni, il y reconnaît la mission divine de Christ, car lui seul peut opérer le miracle qu'offre une communauté d'hommes s'aimant vraiment et cordialement entre eux.
Trois fois le Seigneur présente cette union comme le reflet de sa propre union avec son Père. Il savait que c'était là la perfection de la divinité : Le Père et le Fils, deux personnes séparées et pourtant parfaitement unies par le Saint-Esprit. Pour ses fidèles, il ne peut rien souhaiter de plus élevé, de plus excellent, que d'être avec lui et en lui, unis entre eux, comme lui et le Père le sont.
L'intercession du Seigneur Jésus est toute puissante. Ce qu'il demande, il le reçoit de son Père. Mais, hélas ! La grâce qui descend d'en haut ne trouve aucun accès dans les cœurs dont la porte n'est pas encore ouverte, et où il n'y a pas de place pour la recevoir. Combien de croyants n'ont pas même le désir d'être unis entre eux comme le sont le Père et le Fils ! Nous sommes si accoutumés à notre vie d'égoïsme, ou d'amour très limité, que souvent nous ne désirons pas cet amour plus parfait, et que nous l'ajournons au moment de notre réunion dans le ciel. Et pourtant c'était bien de notre vie terrestre que parlait le Seigneur lorsque deux fois il a dit : « Afin que le monde sache ».
« Afin qu'ils soient un comme nous sommes un ». Il faut que l'Eglise se réveille pour comprendre et apprécier cette prière à sa juste valeur. Quelques personnes veulent voir dans cette union le lien mystique qui réunit, malgré leurs divisions extérieures, tous les croyants animés de la même vie spirituelle, mais ce n'est pas là ce qu'entend le Seigneur.
Il parle de quelque chose que le monde puisse voir, de quelque chose de semblable à l'union qui existe entre Dieu le Père et Dieu le Fils. Il faut que cette vie mystique, commune à tous, se manifeste par leur amour mutuel. Ce n'est que lorsque les croyants, trop divisés en petits groupes restreints, ne se priveront plus de rapports fraternels avec tous les enfants de Dieu qui les entourent ; ce n'est que lorsqu'ils verront leur plus simple devoir à s'aimer les uns les autres comme Christ nous aime et comme il est aimé de son Père ; ce n'est que lorsqu'ils crieront à Dieu, demandant que le Saint-Esprit réalise en eux cette union de vie et d'amour, que l’on pourra espérer quelque changement.
Le feu se communiquera alors d'une congrégation à l'autre, jusqu'à ce que tous ceux qui veulent réellement faire la volonté de Dieu, se consacrent à une vie de charité mutuelle, s'aimant entre eux de l'amour de Dieu.
Et qu'avons-nous à faire pour hâter ce jour-là ? Que chacun de ceux qui prennent au sérieux ces mots du Maître : « Afin que vous fassiez comme je vous ai fait (Jean 13 v. 15) » ; se mette aussitôt à l’œuvre dans le milieu où il se trouve. Quelque faibles ou languissants, quelque pervers ou difficiles à supporter que puissent être autour de lui les membres du corps de Christ, que ses rapports avec eux soient ceux de la charité. Qu'ils le veuillent ou non, qu'il soit bien ou mal reçu par eux, n'importe, qu'il persévère, lui, à les aimer de l'amour de Christ. Oui, les aimer comme Christ les aime, tel doit être le but de sa vie ; et cet amour finira par trouver écho dans quelques cœurs, par éveiller en eux aussi le désir de plus d'union et de charité.
Mais ici quelle incapacité le croyant découvrira en lui. Il verra bientôt que ses efforts ne sauraient y suffire, qu'il ne saurait atteindre si haut sans une entière consécration de tout son être à Dieu. Il devra apprendre que, pour aimer comme Christ, il faut vivre de la vie de Christ, il devra apprendre aussi et tout de nouveau que Christ veut être, dans toute l'étendue du terme, la vie de ceux qui osent se confier en lui. Ceux qui ne peuvent pas se confier pleinement en lui ne peuvent pas non plus aimer pleinement.
Croyants, écoutez une fois de plus combien il est simple et facile de réaliser cette vie-là. Reconnaissez aussi que vous êtes incapables de le faire, même au moindre degré ; et croyez que Christ vous attend, que lui-même vous rendra capables de remplir cette vocation aussitôt que vous vous donnerez à lui sans réserve. Absolument incapables de rien faire par vos propres forces, livrez-vous entièrement au Seigneur pour qu'il « produise en vous et la volonté et l’exécution (Philippiens 2 v. 13) ». Comptez sur lui avec une foi implicite, comptez sur la puissance de son intercession pour réaliser en vous ce qu'il a demandé pour vous à son Père.
Oui, comptez sur celui qui a dit au Père : « Toi en moi et moi en eux, afin qu'ils soient un comme nous sommes un » ; comptez sur lui pour manifester sa vie même en vous par sa toute-puissance divine. Quand vous serez animés de sa vie, il vous sera possible d'aimer de son amour.
Amis chrétiens, l'union de Christ avec le Père est notre modèle ; comme le Père et le Fils, nous aussi, nous devons être un entre nous. Aimons-nous donc les uns les autres, servons-nous, supportons-nous, aidons-nous, vivons les uns pour les autres. Pour tout cela, notre amour est trop restreint, trop limité ; mais prions Christ de nous donner son amour, afin que nous puissions aimer nos semblables.
Cet amour divin répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit nous rapprochera si bien les uns des autres, qu'enfin le monde croira que le Père a envoyé Christ et que Christ nous a donné la véritable vie, le véritable amour du ciel. Père saint, nous savons à présent quelle est la prière que te présente continuellement celui qui est « toujours vivant pour intercéder pour nous (Hébreux 7 v. 25) ». Il te demande la parfaite union de ses disciples entre eux. Père, nous aussi, nous voudrions crier à toi pour implorer cette grâce.
Hélas ! Que ton Église est divisée ! Ce ne sont pas les divisions de langage ou de pays que nous déplorons, ni même les différences de doctrine et d'enseignement ; c'est, Seigneur, le manque d'union, de cette union d'esprit et de cœur par laquelle ton Église pourrait convaincre le monde qu'elle est du ciel.
Prière.
O Seigneur ! Avec une profonde humiliation nous te confessons la froideur, l'égoïsme, la défiance et l'amertume qui se voient encore parfois parmi tes enfants. Nous te confessons combien nous manquons, chacun de nous, de cet amour fervent et habituel auquel tu nous appelles ! Oh pardonne-nous selon ta miséricorde !
Seigneur Dieu, viens au secours de ton Église. C'est en ayant un même esprit que nous pourrons reconnaître et montrer notre union en un même Dieu. Que ton Saint-Esprit agisse puissamment au milieu des croyants pour les amener à être un entre eux. Que partout où se réunissent les enfants de Dieu, ils sentent l'indispensable nécessité d'une étroite union dans l'amour de Jésus.
Que mon cœur aussi soit délivré de son égoïsme et qu'il réalise dans une sincère communion avec tes enfants que tous ensemble nous sommes un comme toi, notre Père, et Jésus, ton Fils, vous êtes un.
Un message de Andrew Murray
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