La marche au désert.2
Dans le livre des nombres, l’accent est mis sur la responsabilité du peuple, en marche dans le désert. Dieu a pourvu à tout ; mais comment le peuple va-t-il se comporter ?
L’offrande des personnes (Nombres 8 v. 1 à 14 ; 23 à 26).
Au début de notre chapitre, les sept lampes projettent leur lumière sur le chandelier lui-même, et, pour ainsi dire, sur les offrandes qui précèdent et qui suivent. L’Esprit de Dieu met en évidence les perfections de Christ (le chandelier), et le mouvement des cœurs qui ont été portés à présenter quelque chose à Dieu, plus encore, « à se donner premièrement eux-mêmes au Seigneur (2 Corinthiens 8 v. 5) ».
Les Lévites ont été dénombrés dès l’âge d’un mois (3 v. 39 ; Galates 1 v. 15). À vingt-cinq ans ils vont entrer en service (8 v. 24) et à trente ans s’employer à l’œuvre (4 v. 47). Mais avant tout service, ils devaient être « offerts en offrande tournoyée à l’Éternel (8 v. 13) ».
Un exercice spirituel profond doit précéder toute activité. Au verset 7, Moïse fait aspersion sur eux de l’eau de purification du péché. Nous retrouvons cette eau au chapitre 19, contenant les cendres de la génisse : Type du souvenir de l’œuvre accomplie par le Seigneur Jésus, que l’Esprit Saint rend tout particulièrement présente à la conscience et au cœur de celui qui est appelé à servir. Puis les Lévites doivent eux-mêmes faire passer le rasoir sur toute leur chair, laver leurs vêtements et se purifier (8 v. 7). Bien des choses sont à mettre de côté ; les manifestations charnelles doivent être abandonnées (Colossiens 3 v. 5 à 8), et la Parole avoir toute son action sur le témoignage extérieur (vêtements).
En présence de toute l’assemblée d’Israël, des sacrifices sont offerts ; le peuple pose ses mains sur les Lévites ; à leur tour, ceux-ci les posent sur la tête des taureaux ; les sacrifices sont alors offerts sur l’autel. « Après cela, les Lévites vinrent pour faire leur service à la tente d’assignation (8 v. 22) » : une plus profonde appréciation de l’œuvre de Christ doit précéder tout service.
Seigneur, toi qui pour nous t’offris en sacrifice,
Remplis-nous de ferveur pour mettre à ton service
Nos jours, nos biens, nos corps, nos cœurs.
La Pâque au désert (Nombres 9 v. 1 à 14).
Une année s’était écoulée depuis la nuit terrible où l’ange du jugement avait passé par l’Égypte, mettant à mort tous les premiers-nés. Les Israélites, à l’abri du sang de l’agneau, avaient en hâte quitté le pays et fait l’expérience de la grâce et de la puissance de l’Éternel. Dans le désert, ils vont maintenant se souvenir de cette nuit de la délivrance, point de départ de la marche en avant. L’Éternel lui-même demande au peuple (v. 2) de faire la Pâque, « au temps fixé, le quatorzième jour du mois, entre les deux soirs », selon tous ses statuts et selon toutes ses ordonnances. Rien n’était laissé au bon vouloir de chacun. On n’allait pas « simplifier » les choses parce qu’on était au désert.
La Pâque est appelée dans notre chapitre l’ « offrande de l’Éternel (v. 7 à 13) ». En Égypte, elle avait été instituée ; au désert, elle devenait le mémorial qui engageait le peuple à apporter quelque chose à Dieu. La fête était célébrée avant tout pour Lui. Les épreuves du désert n’atténuaient pas la jouissance du privilège de la rappeler. Moïse l’avait dit au Pharaon : « Laisse aller mon peuple pour qu’il me serve... nous irons avec nos jeunes gens et avec nos vieillards, nous irons avec nos fils et avec nos filles, avec notre menu bétail et avec notre gros bétail ; car nous avons à célébrer une fête à l’Éternel (Exode 10 v. 3 à 9) ». Pour la première fois ils allaient l’accomplir. Des siècles plus tard, sous Esdras (6 v. 19 à 22), le même soin sera apporté à respecter les ordonnances de l’Éternel à se purifier, à se séparer de l’impureté des nations pour rechercher l’Éternel ; quoi d’étonnant à ce que la joie remplisse les cœurs « car l’Éternel les avait rendus joyeux ».
La Pâque était le type d’une œuvre future, du sacrifice de l’Agneau de Dieu. Pour nous, la cène, qui y correspond, est le mémorial d’une œuvre accomplie. Sans qu’il s’agisse d’obéissance à un commandement, mais bien plutôt de la réponse du cœur au dernier désir du Seigneur qu’il aime, il n’en reste pas moins que la célébration de la cène n’est pas laissée à notre propre volonté (« comme je pense... il me semble... j’estime que »), mais que nous sommes appelés à nous conformer aux enseignements du Nouveau Testament à cet égard.
Le désert, en rapport avec notre responsabilité, soulève deux points : La pureté pratique afin de participer à la Pâque, pour nous à la cène (v. 6 à 12) ; l’abstention (v. 13). Au premier mois, le quatorzième jour du mois, des hommes étaient impurs à cause d’un corps mort et ne pouvaient célébrer la Pâque. Ils n’ont pas celé leur impureté en se disant : C’est le désert, participons quand même. Ils n’étaient pas indifférents à leur faute, tout en désirant d’un cœur sincère avoir part à la fête du mémorial. Que faire ? Ils confessent leur état à Moïse, sans rien cacher (v. 7), et placent devant lui leur exercice.
Moïse ne fait pas parade de tout savoir ; il n’a pas honte de reconnaître son ignorance et de consulter l’Éternel. La réponse de grâce est claire : « Si un homme d’entre vous... est impur... il fera la Pâque à l’Éternel (v. 10) ». Un tel homme devrait passer par les exercices du chapitre 19 : La purification par l’eau contenant les cendres ; le second mois, le quatorzième jour du mois, il pourrait célébrer la Pâque. Il ne la ferait pas à moitié, mais complète, avec les pains sans levain, les herbes amères, selon tous ses statuts.
Cet enseignement correspond pour nous, en rapport avec la cène, à 1 Corinthiens 11 v. 28. Si nous avons manqué, il ne s’agit pas de nous abstenir, mais de reconnaître notre faute, de la confesser, et dans l’assurance de la grâce qui y répond à cause du sacrifice de Christ, de participer au pain et à la coupe : « ... et qu’ainsi il mange ». Prenons garde de ne pas laisser s’accumuler des fautes non confessées, qui interrompent la communion et entravent toute joie et croissance chrétiennes. Dans ce travail intérieur, on aura particulièrement présent à l’esprit et au cœur les souffrances de Christ pour ce péché que l’on vient de confesser. Ainsi on ne s’abstiendra pas de la cène, mais on y participera avec un sentiment d’autant plus profond de la grâce.
L’apôtre avertit les Corinthiens qu’ils seraient coupables s’ils participaient à la cène du Seigneur « indignement (1 Corinthiens 1 v. 27) ». Que faut-il entendre par là ? Deux choses différentes, semble-t-il. Le verset 29 complète le 27 en disant : « Car celui qui mange et qui boit, mange et boit un jugement contre lui-même, ne distinguant pas le corps ». Prendre la cène sans réaliser les paroles du Seigneur : « Ceci est mon corps... ceci est mon sang », y participer comme à un rite, par habitude, superficiellement, nous expose au châtiment du Seigneur. Par contraste, le verset 28 commence par un « mais ». En s’éprouvant soi-même, on sera appelé à reconnaître ses fautes et leur cause. Cela nous amènera au sentiment profond de la grâce de Dieu. On participera donc, non « parce qu’on se sent digne », mais parce que Lui a tout fait pour nous purifier, et nous amener dans Sa présence.
L’abstention
« L’homme qui est pur et qui n’est pas en voyage, qui s’abstient de faire la Pâque... cet homme portera son péché (v. 13) ». Tout enfant de Dieu est appelé à participer à la cène du Seigneur, s’il n’y a pas toutefois un obstacle majeur dans sa marche défaillante ou dans son éloignement (voyage) de Dieu. Il importe de comprendre ce que l’on fait : « je parle comme à des personnes intelligentes (1 Corinthiens 10 v. 15) », et l’on ne saurait donner la cène à de jeunes enfants. Dans les autres cas, la Parole souligne la gravité pour un enfant de Dieu de rester indifférent au mémorial institué, Pâque ou cène du Seigneur. Celui-ci n’a-t-il pas droit à nos affections, quand il nous demande de « faire ceci en mémoire de Lui » ? On respecte le vœu sacré d’un mourant ; combien plus le dernier désir du Seigneur. Pourquoi ne pas participer ? Par indifférence peut-être ; par crainte de n’être pas assez pur, seule l’œuvre de Christ nous rend tels ; par peur de Le déshonorer dans notre marche, la grâce répondra à toute faute reconnue et confessée devant Lui. En prenant la cène, on rappelle la défaite de Satan, on annonce la mort du Seigneur, on relie la croix à Son prochain retour. L’ennemi ne peut supporter cela, et suscite tous les obstacles imaginables pour empêcher les croyants de « se souvenir » de leur Sauveur.
Il est donc bien sérieux de s’abstenir du mémorial du Seigneur par indifférence, ou légèreté, ou sous prétexte que d’autres ne marchent pas comme ils devraient, ou encore par crainte de s’exposer à la discipline de l’assemblée. Toutefois, Dieu connaît les circonstances de chacun des siens. Il apprécie à sa mesure et dans une parfaite grâce et miséricorde, tout ce qui peut peser sur le cœur ou sur l’esprit ; chaque chose demande un exercice confiant devant Lui. Rien ne doit être accompli à la légère et moins que tout, la participation à la cène du Seigneur ; mais à travers les âges résonne encore la voix qui, la nuit où Il fut livré, disait : « Prenez, mangez ; buvez-en tous ».
Même « l’étranger (v. 14) », qui désirait s’approcher, le pouvait. Ailleurs on voit qu’il devait être circoncis (Exode 12 v. 48) : Accepter le signe de la séparation pour Dieu ; en faisant la Pâque, il reconnaissait qui était l’Éternel. Rien n’était retranché de la règle divine : Il y avait « un même statut tant pour l’étranger que pour l’Israélite de naissance ». Les ressources de la grâce sont infinies, mais jamais elles n’affaibliront la pensée de Dieu révélée dans sa Parole. Ses bras pourtant s’ouvrent pour accueillir quiconque veut venir, même au milieu d’un peuple qui était si fermé, si peu enclin à accueillir l’étranger qui s’approche.
Sous Ézéchias « beaucoup de ceux d’Éphraïm et de Manassé et d’Issacar et de Zabulon », quiavaient répondu à l’invitation de participer à la Pâque, « ne s’étaient pas purifiés (2 Chroniques 30 v. 18) ». Une maladie s’ensuivit, car Dieu reste saint ; mais « Ézéchias pria pour eux... et l’Éternel écouta Ézéchias et guérit le peuple ». L’intercession de Christ répond à notre ignorance, à nos faiblesses, à nos fautes.
Le départ .
La nuée était le signe visible de la présence de Dieu au milieu de son peuple. Elle le protégeait (v. 15 ; Exode 14 v. 20) ; le guidait (v. 17 ; Exode 13 v. 21) ; remplissait le sanctuaire (Exode 40 v. 34) ; la gloire de l’Éternel s’y est manifestée en sept occasions différentes.
Quelle assurance pour Israël de savoir que Dieu allait à eux, campait avec eux, combattait avec eux. Partir, ou camper, sans la nuée, c’était perdre la présence divine. On n’était pas seulement conduit par un feu rouge ou un feu vert, comme dans nos rues, mais par une Présence, connue, aimée. Pas besoin de se soucier du lendemain, de la longueur ou des dangers de l’étape. Savoir aussi attendre le signal de la nuée, tant qu’elle ne s’était pas encore levée. Quelle joie lorsqu’à la fin d’une course, ou d’une étape de la route, en regardant en arrière, on peut dire : « L’Éternel seul l’a conduit (Deutéronome 32 v. 12) ».
Ésaïe 52 v. 12 nous dit : « Vous ne sortirez pas avec précipitation et vous n’irez pas comme des fugitifs ; car l’Éternel ira devant vous, et le Dieu d’Israël sera votre arrière-garde ». Pas de hâte inutile pour ceux qui s’attendent à Lui.
Cela impliquait une dépendance continuelle, bien peu du goût de la chair ; il fallait constamment regarder en haut. Jonas, parfaitement au clair sur le chemin où Dieu voulait le conduire, s’enfuit loin de sa face, et n’en récolte que misères. En Nombres 14 v. 40, le peuple veut monter sans l’Éternel et rencontre la défaite. En Deutéronome 25 v. 17, plusieurs se fatiguent, se traînent, et deviennent la proie de l’ennemi.
Pourtant la grâce demeure. Néhémie 9 v. 18 et 19 le rappelle : « Même quand ils se firent un veau de fonte... tu ne les abandonnas point dans le désert ; la colonne de nuée ne se retira point de dessus eux ». « Dieu est fidèle ! »
Il est intéressant de remarquer les diverses positions que prend la nuée. Habituellement elle « couvrait » le tabernacle (9 v. 15 ; même 16 v. 42). Une seule fois nous la voyons « sur le propitiatoire (Lévitique 16 v. 2) », lieu où Aaron une fois l’an, et Moïse aussi souvent qu’il le désirait, se rencontraient face à face avec l’Éternel. À trois reprises, nous la trouvons « à l’entrée » de la tente d’assignation : Lors du veau d’or (Exode 33 v. 9), comme si l’Éternel allait s’en aller et quitter son peuple ; l’intercession de Moïse Le retient au milieu d’eux. En Nombres 12 v. 5, l’Éternel comme juge vient châtier Marie à l’entrée de la tente, et va même jusqu’à se retirer ; l’intercession de Moïse assure la guérison de sa sœur.
En Deutéronome 31 v. 15, nous avons la dernière occasion où Moïse entre dans le tabernacle : « Tu vas dormir avec tes pères », dit la voix connue ; en ce même jour, l’Éternel ajoute : « Monte sur le mont Nébo (32 v. 49) » ; la nuée semble venir à l’entrée de la tente comme pour accompagner Moïse dans ce dernier voyage. Inspiré par l’Esprit de Dieu, il compose le cantique qui retentira en témoignage aux oreilles d’Israël à travers les âges. Puis seul, il gravit la montagne ; et là s’approche l’Ami fidèle qui a été avec lui depuis les jours du buisson ardent, pour lui faire éprouver, une dernière fois ici-bas, Sa grâce et Sa communion.
Les trompettes d’argent, sonnées par les sacrificateurs, guidaient directement les mouvements du peuple : Pour le rassemblement (v. 3 et 4) ; la marche (v. 5 et 6) ; le combat (v. 9) ; dans les jours de joie et d’adoration (v. 10).
N’est-ce pas un type de la Parole de Dieu telle que le ministère la présente aux siens, afin qu’ils sachent comment se comporter, tout spécialement dans leurs mouvements collectifs à travers le désert : Rassemblement, adoration, marche ou combat ?
La seconde année, au second mois, le vingtième jour du mois, la nuée se lève. Pour la première fois, les fils d’Israël partent selon le commandement de l’Éternel par Moïse. Tout le camp s’ébranle, et, sous la conduite de la nuée, marche en avant. Il n’est pas facile, à première vue, de discerner les vrais motifs qui poussèrent à ce moment-là Moïse à proposer à son beau-frère, Hobab, de les accompagner.
D’un côté, il dit : « Viens avec nous et nous te ferons du bien... le bien que l’Éternel veut nous faire, nous te le ferons », invitation qu’il est bon d’adresser à tous ceux auxquels nous pouvons le dire dans la conscience de partager avec eux ce que le Seigneur nous donne. Pourquoi Moïse ajoute-t-il : « Tu nous serviras d’yeux dans le désert » ? Était-ce une expression encourageante pour amener Hobab à se décider à se joindre au peuple ? (cf. Juges 4 v. 11). Était-ce au contraire le motif profond qui faisait désirer à Moïse que ce connaisseur du désert les accompagne ? Dans le paragraphe suivant, l’arche va devant le peuple pour leur chercher un lieu de repos ; par ce fait, l’Esprit de Dieu ne veut-il pas signifier que Moïse a risqué de mettre indûment sa confiance en son beau-frère plutôt qu’en l’Éternel ?
« Dieu sort de la place qu’Il avait prise au milieu des tribus pour qu’elles prennent soin de lui et veillent à son honneur, et se fait en quelque sorte leur serviteur, cherchant un lieu où elles puissent se reposer dans ce chemin qui leur était inconnu... Beau tableau de la grâce tendre et précieuse du Seigneur, qui ne manque pas, s’Il nous fait traverser le désert pour notre bien, de s’y trouver avec nous, et qui a soin, en menant ses brebis dehors, de marcher devant elles et de les soulager par Son amour » (Darby).
Ainsi, l’arche quittant en grâce sa place normale au centre du peuple, va en avant sur la route, le chemin de trois jours. Ces trois jours nous parlent de la mort et de la résurrection du Seigneur Jésus. Matthieu 28 v. 7 nous dit : « Ressuscité... il s’en va devant vous... vous le verrez ». Suivre Jésus dans la conscience qu’il est mort et ressuscité pour nous, que, Berger fidèle, « il va devant (Jean 10 v. 4) », n’est-ce pas trouver le repos au désert, en attendant le repos de la gloire ?
À chaque nouvelle étape, Moïse prie (v. 35 et 36), dans l’assurance que la présence de l’Éternel les accompagne.
2. Les murmures et les pièges.
Deutéronome 8 v. 2 explique le pourquoi du désert : « L’Éternel ton Dieu, t’a fait marcher ces quarante ans, dans le désert, afin de t’humilier, et de t’éprouver, pour connaître ce qui était dans ton cœur ». Le peuple va ainsi être mis à l’épreuve, afin de se connaître lui-même et d’en venir à l’inéluctable conclusion qu’il ne pourra entrer dans le pays promis que sur le pied de la grâce. En effet, comme nous l’avons vu, le but suprême du désert, s’il est « afin de t’humilier et afin de t’éprouver », est surtout « pour te faire du bien à la fin (Deutéronome 8 v. 16) ».
Dieu avait pourvu à tout : Le peuple était rassemblé autour d’un centre, l’arche, qui marchait devant eux dans le désert ; la nuée était là pour les conduire, les trompettes pour les avertir (cf. Psaume 32 v. 8) ; chaque jour la providence divine leur envoyait la manne ; ils buvaient d’un « rocher spirituel » qui les suivait. Onze journées (Deutéronome 1 v. 2) auraient suffi pour les amener à la frontière du pays.
Pourquoi tant d’années perdues dont Nombres 33 nous donne les innombrables étapes ? De celles-ci, la Parole ne retient que le nom : Il n’en restait rien pour Dieu ; elles n’étaient que le châtiment de leur incrédulité. Les chapitres qui suivent vont nous donner les motifs de cette tragédie. Les plaintes (Nombres 11 v. 1 à 3).
« Le peuple se plaignait ». Aucune raison ne nous en est donnée, aucun détail, mais ne reconnaissons- nous pas là un fait si fréquent parmi nous ? Après avoir tant reçu, y a-t-il même raison de se plaindre ? « Un homme se plaindrait-il à cause de la peine de ses péchés ? (Lamentations 3 v. 39) ». Si la difficulté rencontrée n’est que la conséquence de nos fautes, ne convient-il pas de l’accepter avec humilité ? Mais il y a plus encore : « Qui est-ce qui dit une chose et elle arrive, quand le Seigneur ne l’a point commandée ? » (Lamentations 3 v. 37) ». Notre Dieu ne dirige-t-il pas chaque événement de la vie des siens, ayant en vue leur vrai bien ? « Nous savons que toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu (Romains 8 v. 38) ».
Pourquoi si souvent ces plaintes, ces murmures ? C’est le temps qui ne nous plaît pas, ou la nourriture, ou les circonstances ! On prend l’habitude de se plaindre de tout, et la vie s’assombrit. Cet esprit de plaintes détruit le témoignage et déshonore le Seigneur. « Réjouissez-vous toujours », dit l’apôtre, mais il ajoute immédiatement : « Priez sans cesse. En toutes choses rendez grâces (1 Thessaloniciens 5 v. 16 à 18). Ces trois attitudes sont liées : Sans la prière, sans l’action de grâces, pas de joie. Dans le secret du cœur, la source de la joie est dans le Seigneur : « Le cœur heureux est un festin continuel (Proverbes 15 v. 15) ».
Mais cela demande tout un exercice. Même l’apôtre Paul pouvait écrire : « J’ai appris à être content en moi-même dans les circonstances où je me trouve (Philippiens 4 v. 11) ». À Timothée il dira : « La piété avec le contentement est un grand gain (1 Timothée 6 v. 6) ». L’épître aux Hébreux le souligne : « Étant contents de ce que vous avez présentement ; car lui-même a dit : « Je ne te laisserai point, et je ne t’abandonnerai point (Hébreux 13 v. 5) ».
« L’Éternel l’entendit (Nombres 11.1, cf. 12.2) ». Nous n’avions attaché que peu d’importance à ces récriminations, mais le Seigneur l’entend et sa colère s’embrase ; dans son gouvernement, son jugement atteint le peuple : Le feu de l’Éternel brûla parmi eux. Le peuple crie ; Moïse intercède pour lui ; l’incendie s’arrête ; mais il n’y a aucun jugement de soi, pas de regrets, pas de repentir. Faut- il s’étonner que dans les versets suivants les murmures reprennent et s’accentuent ?
« Un grand amas de gens (Exode 12 v. 38) » était monté d’Égypte avec Israël. Comme toujours en pareil cas, lorsque au sein du peuple de Dieu se trouvent mélangés des éléments hétéroclites, leur influence ne manque pas de se faire sentir. « Le ramassis de peuple qui était au milieu d’eux s’éprit de convoitise ». Les Israélites n’avaient rien affaire avec de telles gens et n’auraient pas dû les accueillir ; de fait, ils en subissent l’influence et se mettent eux- mêmes encore à pleurer, et disent : « Qui nous fera manger de la chair ? Il nous souvient de ce que nous mangions en Égypte pour rien... (v. 2 et 3) ».
Pas des plaintes seulement cette fois, mais des pleurs (v. 10, 13, 18). Était-on donc si bien en Égypte ? (Exode 5 v. 13). On y trouvait, du moins le peuple le prétend, six nourritures (v. 5), comme en Assyrie (2 Rois 18 v. 32), tandis que dans « le pays » il y en a sept (Deutéronome 8 v. 8), chiffre de la plénitude divine par opposition à l’insuffisance de l’homme (six). Mais il faut des arguments pour justifier ses murmures, même s’ils sont sans valeur ou erronés. Combien facilement, lorsque le goût de la Parole de Dieu se perd (« Il n’y a rien, si ce n’est cette manne devant nos yeux »), on cherche des prétextes pour justifier son absence des réunions et le trop peu de temps dont on dispose pour écouter la voix du Seigneur. Le désir du cœur s’en retourne au monde, aux choses du monde : « Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui (1 Jean 2 v. 15) ».
La convoitise amène à désirer ce que l’on n’a pas, ce que Dieu n’a pas donné dans les circonstances où l’on se trouve. Elle conduit aussi à mépriser ce que Dieu donne : La manne, qui avait un goût de miel, n’a plus que la saveur d’un gâteau à l’huile, et plus tard elle ne sera qu’un pain misérable (Exode 16 v. 31 ; Nombres 11 v. 8 ; 21 v. 5).
Si nous constatons que notre intérêt pour la Parole a baissé, ne laissons pas les choses ainsi. Notre communion avec le Seigneur est en cause ; elle a été peut-être interrompue. Recherchons-Le. Prenons le temps, à l’écart s’il le faut, quelques heures ou quelques jours, de prier et d’examiner nos voies devant lui, afin qu’il nous restaure, et nous fasse retrouver à sa Parole cette saveur qu’elle a perdue.
Veillons aussi à tout ce dont nous nourrissons notre esprit. Sans doute bien des choses sont-elles utiles et profitables à leur place ; mais si nous remarquons, dans ce que nous lisons, entendons ou voyons, des choses qui gagnent le cœur et prennent la place du Seigneur et de sa Parole, ayons l’énergie d’y renoncer. « Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie... selon l’enseignement des hommes, selon les éléments du monde (Colossiens 2 v. 8) ». Que de jeunes gens et de jeunes filles, qui paraissaient pourtant zélés pour le Seigneur, se sont laissés détourner des choses de Dieu, soit par le doute intellectuel qu’ont insinué petit à petit en eux lectures et autres enseignements des hommes, soit par les convoitises de la chair qui ont été développées par tout ce que l’on a vu et entendu, et que l’on aurait dû « fuir (2 Timothée 2 v. 22) ». Tout cela n’a pas procuré au cœur la satisfaction profonde que seule peut donner la communion avec le Seigneur qui a dit : « Celui qui vient à moi n’aura jamais faim, et celui qui croit en moi n’aura jamais soif ».
Malgré les murmures et le mépris de son peuple, Dieu restait fidèle : « Quand la rosée descendait la nuit sur le camp, la manne descendait dessus (v. 9) ». Moralement c’était la nuit, mais la rosée descendait quand même et la manne aussi. Chaque jour de cette longue pérégrination, chaque matin, elle était là à disposition ; elle n’a cessé que le lendemain de leur entrée au pays de Canaan (Josué 5 v. 12), pour être remplacée par le blé du pays.
Finalement Dieu donne à son peuple ce que la chair exige, et manifeste ainsi Sa puissance, mais le résultat n’en est que dégoût : « Il leur donna ce qu’ils avaient demandé, mais il envoya la consomption dans leurs âmes (Psaume 106 v. 15) ». Avec quel zèle farouche, ces gens amoncellent des cailles : « Le peuple se leva tout ce jour-là, et toute la nuit, et tout le jour du lendemain, et amassa des cailles : Celui qui en avait amassé le moins, en avait amassé dix khomers (environ deux tonnes ) ». « Celui qui sème pour sa propre chair moissonnera de la chair la corruption (Galates 6 v. 8) ». Que devint-il au bout de peu de jours de ces amas de cailles sous la chaleur brûlante du désert ? « Et on appela le nom de ce lieu-là Kibroth-Hattaava : Les sépulcres de la convoitise ».
« Si tu voulais remercier Dieu pour toutes les joies qu’Il te donne,
tu n’aurais plus le temps de te plaindre ».
La jalousie et la médisance (Nombres 12).
Du trio des frères et sœur, Marie était l’aînée. Jeune fille, elle avait veillé sur le petit Moïse (Exode 2 v. 4 à 7). Elle était prophétesse (Exode 15 v. 20). Se crut-elle évincée de son influence par le retour de Séphora ? (cf. Exode 18.5 et Nombres 12 :, 1). Quoi qu’il en soit, elle gagne Aaron à son mécontentement et tous deux parlent contre Moïse : « L’Éternel n’a-t-il parlé que par Moïse seulement ? N’a-t-il pas parlé aussi par nous ? (v. 2) ». La « femme éthiopienne » formait prétexte, le motif profond n’était-il pas la jalousie ? Finalement, Moïse était seulement le cadet ; ses frère et sœur voulaient bien croire que Dieu avait parlé par lui, mais aussi par eux. Ils avaient peine à accepter l’influence grandissante que Dieu conférait à son serviteur, alors qu’ils auraient dû reconnaître la place d’autorité qu’il lui avait confiée.
N’en est-il pas ainsi souvent parmi nous ? Par jalousie, par dépit, on se met à parler en mal de tel ou tel frère, même d’un serviteur du Seigneur. Sans aller si loin, on se complaît à la médisance, à rapporter un mal réel, dans le but de déprécier aux yeux de son interlocuteur celui qui l’a commis. On va même jusqu’à la calomnie, en racontant ce qui est faux, ou fortement exagéré.
Le mal fait est irréparable. Après s’être humilié devant le Seigneur, on pourra bien s’excuser auprès de son interlocuteur (bien sûr, à moins qu’il le sache, pas auprès de celui dont on a médit ou qu’on a calomnié, ce qui le peinerait encore plus) et le prier d’oublier, mais entre-temps le mal se sera sans doute déjà répandu et aura fait son œuvre. Trois choses dit le proverbe arabe, ne peuvent être retenues : La flèche qui vole, la parole dite, le temps passé. Jacques avertit : « Si quelqu’un... ne tient pas sa langue en bride... le service religieux de cet homme est vain (1 v. 26) ». Pensons aussi à l’effet produit sur nos enfants, qui trop souvent entendent au foyer médisances et critiques.
Lévitique 19 v. 16 l’avait précisé : « Tu n’iras point çà et là, médisant parmi ton peuple ». L’apôtre Pierre en souligne toute la gravité : « Rejetant... toutes médisances, désirez ardemment... le pur lait intellectuel... si toutefois vous avez goûté que le Seigneur est bon (1 Pierre 2 v. 1 à 3) ». Ce « si toutefois » ne semble-t-il pas mettre en doute que l’on ait pu goûter la bonté du Seigneur si on se livre à la médisance ? Elle est d’abord conçue dans le cœur, dans ces griefs que l’on nourrit contre tel ou tel, ou dans cette importance que l’on s’attribue à soi-même ; puis l’ennemi sait si bien susciter l’occasion propice où la parole mauvaise sera prononcée. On voudra faire parade de « savoir ce qui en est ».
Trop souvent, parce qu’on manque de sujets de conversation, on médit d’autrui. Et de telles « révélations » sont comme des « friandises (Proverbes 26 v. 22) » pour ceux qui les écoutent : « La langue est un petit membre, dit Jacques... un petit feu, quelle grande forêt allume-t-il (Jacques 3 v. 5) ». Une promesse est faite au Psaume 15 à celui qui ne médit pas de sa langue : Il « séjournera dans la tente » de l’Éternel : Communion bénie avec son Seigneur de celui qui a veillé sur ses lèvres. David suppliait : « Que les paroles de ma bouche et la méditation de mon cœur soient agréables devant toi (Psaume 19 v. 14) ». Les résolutions et les contraintes extérieures ne seront pas un secours suffisant : La langue ne peut se dompter. C’est l’être intérieur qui doit être changé, renouvelé, transformé. Il faut juger les pensées mauvaises qui nous poussent à médire de notre frère ou même à le calomnier, quand elles sont encore en nous.
Objet de la médisance de ses frère et sœur, Moïse se tait ! Mais « l’Éternel l’entendit ». Il les convoque, les trois, à la tente d’assignation ; puis il fait se tenir devant lui, tout seuls, Aaron et Marie. Il prend la défense de son serviteur, fidèle dans toute Sa maison, avec lequel il parle bouche à bouche, et qui voit la ressemblance de l’Éternel : « Pourquoi n’avez-vous pas craint de parler contre mon serviteur ? Et la colère de l’Éternel s’embrasa contre eux... et voici Marie était lépreuse comme la neige ; et Aaron se tourna vers Marie, et voici, elle était lépreuse ». La prophétesse, qui avait chanté les louanges de l’Éternel, devrait être dorénavant exclue hors du camp, et consumer sa vie jusqu’à ce que la mort la délivre de son affreuse maladie.
Quelle tragédie ! Dieu ne prend pas ces choses à la légère. La conscience d’Aaron et de Marie parle. Ils se repentent. Ils reconnaissent leur péché, par lequel ils ont agi follement. Aaron, quoique sacrificateur, n’est plus à même de prier pour sa sœur. À sa demande instante, Moïse, qui pour la première fois, dans notre texte, ouvre la bouche, sans aucun ressentiment, crie à l’Éternel : Ô Dieu ! Je te prie, guéris-la, je te prie. Mais la discipline doit suivre son cours. Marie sera restaurée, quoique d’abord, elle demeure « sept jours dans la honte », exclue, hors du camp. Tout le peuple en souffre avec elle : Il ne part pas jusqu’à ce que Marie soit recueillie.
« Pourquoi n’avez-vous pas craint de parler contre mon serviteur ? » : Cette parole ne résonne-t-elle pas aussi aux oreilles de notre conscience ? Sans doute, chaque serviteur du Seigneur a-t-il ses manquements et ses déficiences (Jacques 3 v. 1) ; ce n’est pas une raison pour les relever, les « monter en épingle » et s’en servir contre eux. Au contraire, l’amour couvre les fautes d’autrui ; il en parle au Seigneur pour que Lui corrige et guérisse ; et, directement à l’intéressé, si, dans des cas particuliers, il y est conduit. Médire des serviteurs de Dieu ou de nos frères, quels qu’ils soient, ne peut qu’attirer la discipline du Seigneur sur nous-mêmes, entravant la communion avec lui, rendant « vain » notre service, produisant le dessèchement dans l’âme, et des fruits souvent bien amers.
Ne devrions-nous pas prendre beaucoup plus à cœur ce péché de médisance que nous commettons si légèrement ? Ne pas accueillir non plus les commentaires défavorables qu’autrui nous fait, ou répondre comme tel frère devant qui on en critiquait un autre : « Je vais lui en parler ». Et l’interlocuteur aussitôt de le prier de n’en rien faire ! Dans le jugement de nous-mêmes, chercher les causes qui nous ont amenés à médire, les juger vraiment devant Dieu, et en accepter, s’il le faut, la honte et la correction nécessaire.
Un message de Georges André
© Reproduction gratuite autorisée en indiquant l'auteur et la source bible-foi.com