Les vrais chrétiens

Les vrais chrétiens

Tous font profession d'être serviteurs de Dieu, mais en observant la vie d'un grand nombre, vous reconnaissez qu'au lieu d'être serviteurs de Dieu, en réalité ils s'efforcent de rendre Dieu leur serviteur.

« Qui est pour l’Éternel (Exode 32 v. 26) ». Cette question fut adressée par Moïse au peuple qui faisait profession d'être le peuple de Dieu ; elle le fut immédiatement après qu'il se fut empiétement détourné de Dieu pendant que Moïse était sur la montagne, alors que les enfants d'Israël adorèrent le veau d'or que leur fit Aaron. Après avoir fait des remontrances à la nation coupable, Moïse s'écria : « Qui est pour l’Éternel ? »

Je n'ai pas l'intention de m'arrêter sur ce cas particulier, j'en viens immédiatement au but que je me propose ce soir, savoir de vous montrer que l'on peut distinguer trois classes de chrétiens de profession :

I. Les vrais amis de Dieu et des hommes.

II (1). Ceux qui sont mus par l'espérance et la crainte, en d'autres termes par l'amour de soi-même ou par l'égoïsme.

III (2). Cieux qui sont mus par l'opinion publique.

(1) Pour le  II, voir le 6e discours

(2) Pour le n° III, voir le 7e discours.

Ces trois classes sont reconnaissables à différents caractères qui révèlent le motif principal de leur religion. Il est superflu de démontrer qu'en religion les gens sont conduits par des motifs très divers, les uns par un amour réel pour Dieu, les autres par d'autres motifs. Tous font profession d'être serviteurs de Dieu, mais en observant la vie d'un grand nombre, vous reconnaissez qu'au lieu d'être serviteurs de Dieu, en réalité ils s'efforcent de rendre Dieu leur serviteur. Leur but suprême est de faire leur propre salut ou d'obtenir quelqu'autre avantage pour eux-mêmes, et cela par le moyen des grâces de Dieu. Ils cherchent à faire de Dieu leur ami, afin de le faire servir ensuite à l'accomplissement de leurs desseins.

I. Il y a une classe de chrétiens qui sont de vrais amis de Dieu et des hommes.

Si vous considérez les faits qui trahissent le vrai mobile, le vrai but de leur religion, vous reconnaîtrez que ces chrétiens sont animés d'une affection sincère pour Dieu et pour les hommes.

1. Ils se reconnaissent au soin qu'ils mettent à éviter le péché.

Ils montrent qu'ils le haïssent en eux-mêmes et qu'ils le haïssent chez les autres. Ils ne le justifieront point en eux et ils ne le justifieront pas non plus chez les autres. Ils ne rechercheront pas à cacher leur propre péché, ni à déguiser celui d'autrui. En un mot, leur but est la parfaite sainteté. D'où ressort avec évidence qu'ils sont de vrais amis de Dieu. Je ne veux pas dire que tout vrai ami de Dieu soit parfait, pas plus que je ne voudrais dire que tout enfant vraiment affectueux et obéissant soit un enfant parfait, ne manquant jamais à son devoir.

Mais s'il est un enfant affectueux et obéissant, son but est d'obéir toujours, et s'il y manque à quelque égard, il ne se justifie nullement et ne cherche point à cacher sa faute ; au contraire, aussitôt qu'il y est rendu attentif, il est mécontent de lui-même et condamne sa conduite. De même, les vrais amis de Dieu et de l'homme sont toujours prêts à se plaindre d'eux-mêmes, et à se condamner pour tout ce qu'ils ont pu faire de mal. Vous ne les entendrez jamais s'excuser et jeter le blâme sur leur Créateur, en parlant de leur impuissance à obéir à Dieu ou en s'exprimant comme si Dieu exigeait l'impossible de ses créatures. En les entendant, on sent qu'ils comprennent combien ce que Dieu commande est juste et raisonnable, et qu'ils n'accusent qu'eux-mêmes de leurs désobéissances.

2. Ils montrent toujours une grande horreur pour les péchés des autres.

Ils ne déguisent pas les péchés des autres, ils ne parlent point en faveur de ces péchés, ils n'en nient point la gravité. Vous ne les entendrez jamais faire l'apologie du péché. Comme ils sont indignés contre le péché quand ils le trouvent en eux-mêmes, ainsi le sont-ils, et dans la môme mesure, quand ils le rencontrent chez d'autres ; ils connaissent son caractère odieux et ils l'abhorrent toujours.

3. Ils sont pleins de zèle pour l'honneur et la gloire de Dieu.

Ils montrent la même ardeur pour l'honneur et les intérêts de Dieu que le patriote pour l'honneur et les intérêts de son pays. Si le patriote aime ardemment son pays, son gouvernement et les intérêts de son peuple, il se met de tout son cœur à leur service ; il n'est jamais si heureux que lorsqu'il peut faire quelque chose pour la gloire et la prospérité de sa patrie. De même pour un enfant qui aime véritablement son père ; il n'est jamais si heureux que lorsqu'il peut faire quelque chose qui l'honore et favorise ses intérêts ; et il n'est jamais si indigné que lorsqu'il le voit injurié ou lésé. S'il voit qu'il est désobéi ou outragé par ceux qui doivent lui obéir, l'aimer et l'honorer, son cœur éclate de douleur et d'indignation.

Il y a beaucoup de chrétiens de profession et même des pasteurs qui sont très zélés pour défendre leur propre honneur ; mais il n'y a que les chrétiens dont nous parlons, qui se sentent directement atteints, et de la façon la plus douloureuse, lorsque l'honneur de Dieu est compromis. Ils sont les véritables amis de Dieu et de l'homme.

4. Ils montrent qu'ils sympathisent arec Dieu dans ses sentiments à l'égard de l'homme.

Ils ressentent pour les âmes la même sorte d'affection que Dieu. Je ne dis pas que leur affection soit aussi grande que celle de Dieu, mais elle est de même nature.

C'est un fait que l'on peut aimer les âmes des hommes et haïr leur conduite ; cela se voit chez plusieurs. C'est un fait aussi que l'homme est fait de telle sorte qu'il ressent de la sympathie pour ceux qui sont dans la détresse ; il en est toujours ainsi à moins qu'il n'ait quelque raison égoïste d'être malveillant. Si vous voyez un meurtrier pendu, vous ressentirez de la compassion pour lui. Le méchant lui-même a cette sympathie naturelle pour ceux qui souffrent.

Il y a pareillement une espèce particulière de sympathie que le vrai enfant de Dieu ressent pour le pécheur et qu'il lui témoigne. C'est un mélange d'horreur et de compassion, d'indignation contre ses péchés et de pitié pour sa personne. Il est possible d'avoir une grande horreur pour le péché mélangée d'une profonde compassion pour l'âme capable d'un bonheur sans fin et cependant prête à tomber dans une éternelle misère.

Je m'explique. Il y a deux sortes d'amour, l'un qui est un amour de bienveillance ; un amour qui ne considère point le caractère de la personne aimée, mais qui ne voit en elle que l'être sensible et exposé au péril. C'est celui que Dieu ressent pour tous les hommes. L'autre est un amour qui renferme estime pour la personne et approbation de son caractère. Cet amour-ci, Dieu ne le ressent que pour le juste ; il ne le ressent jamais pour le pécheur.

Le pécheur, il l'abhorre infiniment. Il ressent pour lui, tout à la fois, une compassion infinie et une horreur sans bornes. Les chrétiens éprouvent les mêmes sentiments, ils les éprouvent à un degré moindre, mais ils les éprouvent en même temps. Il est probable qu'ils n'ont jamais les sentiments qu'ils doivent avoir tant qu'ils n'éprouvent pas ces deux sentiments en même temps. Aussi longtemps qu'il n'en est pas ainsi, leurs sentiments vis-à-vis des pécheurs ne sont en harmonie ni avec ceux de Dieu, ni avec le vrai caractère des pécheurs eux-mêmes.

Un fait très frappant le démontre. Le chrétien reprendra, de la façon la plus catégorique et la plus fréquente précisément ceux pour lesquels il ressent la plus profonde compassion. N'avez-vous jamais remarqué cela ? N'avez-vous jamais vu un père ému de compassion envers son enfant, le reprendre avec larmes et cependant avec une sévérité propre à le dompter entièrement ? Jésus-Christ pleura sur Jérusalem tout en éprouvant une brûlante indignation contre la conduite de ses habitants : « Ô Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés ! (Matthieu 23 v. 37) » Ah ! Quelle vue profonde de leur méchanceté il avait, au moment même où, dans sa compassion, il pleurait à la pensée du jugement suspendu sur leurs tètes ! Il en est précisément de même de cette classe de chrétiens qui nous occupe. Vous n'entendrez aucun d'eux parler à un pécheur de manière à le faire pleurer parce qu'un autre pleure sur lui, par un effet de pure sensibilité. Car les plus tendres appels de ces chrétiens sont accompagnés de blâmes énergiques au sujet du péché.

Je désire que vous vous rappeliez ce point : Le vrai ami de Dieu et de l'homme ne prend jamais le parti du pécheur, parce qu'il n'agit jamais par pure et simple compassion. Il ne dénonce jamais non plus au pécheur la condamnation qui pèse sur lui, sans montrer en même temps de la compassion pour son âme, ainsi que le plus ardent désir de la sauver de la mort.

5. La grande affaire de ces chrétiens : Dans tous leurs rapports avec leurs semblables, c'est de faire de ceux-ci des amis de Dieu.

Qu'ils conversent, ou prient, ou accomplissent leurs devoirs journaliers, leur grand but est toujours de recommander la religion de Jésus-Christ et de conduire chacun à glorifier Dieu. Il est très naturel qu'on agisse ainsi, si l'on est un vrai ami de Dieu. Un vrai ami du gouvernement désire que chacun soit ami du gouvernement. Un vrai fils, rempli d'amour filial, désire que chacun aime et respecte son père ; si quelqu'un montre quelque inimitié à son égard, il s'efforcera constamment de le réconcilier avec lui, De même, le trait dominant chez tout vrai ami de Dieu, c'est qu'il fera toujours de la réconciliation des pécheurs avec Dieu la grande affaire de sa vie.

Maintenant, attention ! Je vous en supplie. Si la réconciliation des hommes avec Dieu n'est pas la pensée qui vous absorbe, si elle n'est pas le but constant de vos efforts, si la poursuite de cette réconciliation n'est pas le trait caractéristique de votre vie, vous n'avez « ni part, ni lot dans cette affaire », c'est la source même de la vie qui vous manque. Quelque apparence de religion que vous puissiez avoir, je le répète, c'est le trait caractéristique et la base même de toute vraie piété qui vous manque.

Ce qui fait le fond du caractère et le but de la vie chez Jésus-Christ, chez les apôtres et chez les prophètes, fait défaut en vous. Considérez ces hommes de Dieu, et vous verrez que ce qui vous manque ressort chez eux en un relief ineffaçable et d'une netteté incomparable ; c'est chez eux le trait dominant du caractère, le but suprême de la vie. Maintenant laissez-moi vous demander quel est le grand objet de votre vie, celui qui se montre dans tous les détails de votre conduite de chaque jour. Est-ce de soumettre à Dieu tous ses ennemis ? S'il n'est pas celui-là, arrière toutes vos prétentions en fait : de religion quoi que ce soit que vous puissiez posséder, vous n'avez pas l'amour de Dieu en vous.

6. Partout où vous trouverez des personnes de la catégorie qui nous occupe, vous verrez qu'elles évitent scrupuleusement tout ce qui leur semble aller à l'encontre de ce grand but.

Elles désirent toujours éviter toute chose propre à empêcher le salut des âmes, détourner leur attention et à les éloigner de la conversion. Quand l'on propose une chose dont la légitimité est douteuse, la question qui, pour elles, s'élève naturellement n'est pas : « Est-ce que Dieu le défend expressément ? » Non. La première question qui se pose pour elles est celle-ci : « Quel effet cela peut-il produire quant à l'avancement du règne de Dieu ? Cela tendra-t-il à empêcher la conversion des pécheurs, à ralentir les progrès les réveils, à rejeter les âmes dans le péché ? » S'il en est ainsi il n'y a pas besoin que les tonnerres du Sinaï retentissent à leurs oreilles pour leur défendre cette chose. Elles la voient contraire à l'esprit de sainteté, contraire au grand objet qu'elles ont en vue, cela suffit.

Comme exemple, prenons l’œuvre de la tempérance. Remarquons tout d'abord que ce sont les obstacles que l'intempérance apporte à la conversion des pécheurs qui ont déterminé à l'action les hommes excellents qui ont inauguré cette œuvre. Et ceux qui la continuent sont animés des mêmes sentiments. Vous ne verrez pas de tels hommes s'arrêter et discuter à chaque pas en disant : « Boire du rhum n'est nulle part défendu dans la Bible, et je ne me sens pas tenu d'y renoncer ».

Ils voient qu'il y a là un obstacle à la grande œuvre à laquelle ils ont voué leur vie ; cela leur suffit ; il va de soi qu'ils abandonnent le rhum. Ils évitent tout ce qui leur semble être contraire au réveil des âmes ; rien de plus naturel. Un négociant évite de même tout ce qui pourrait nuire à son crédit, tout ce qui pourrait, aller à l'encontre de son but, qui est de faire de l'argent. Supposez qu'un tel homme soit sur le point de faire une chose qui ruinera son crédit ; vous allez à lui amicalement et vous l'avertissez de ne pas faire cette chose, vous répliquera-t-il : « Montrez-moi dans la Bible le passage où Dieu le défend ? » Non certes ! il n'aura pas l'idée de vous faire une autre question que celle-ci : est-ce vraiment incompatible avec le but que je me propose ?

Prenez donc bien note de ceci, vous tous : celui qui désire ardemment la conversion des pécheurs n'a pas besoin d'une défense expresse pour ne pas faire ce qu'il voit être un obstacle à cette conversion. Il n'y a pas à craindre qu'il aille faire ce qui anéantirait l’œuvre à laquelle il a consacré toute sa vie.

7. Les chrétiens de cette classe sont toujours en détresse à moins qu'ils ne voient avancer l’œuvre de la conversion des pécheurs.

Quand les pécheurs ne se convertissent pas, ils disent que l'église est dans un état lamentable. Quels que soient d'ailleurs les avantages dont cette église jouit, sa situation financière, la popularité de son pasteur, le nombre de ses membres, etc., les cœurs de ces justes sont angoissés à moins qu'ils ne voient l’œuvre de conversion se poursuivre actuellement. Ils comprennent que, sans cela, les moyens de grâce eux-mêmes font plus de mal que de bien.

De tels chrétiens sont un grand sujet de trouble pour ceux qui sont religieux par d'autres motifs que l'amour pour Dieu et pour les âmes, et qui désirent conserver toutes choses calmes et tranquilles, marchant régulièrement selon la « bonne vieille méthode ».

Et remarquez cela, si une église renferme quelques esprits semblables, le pasteur sera mal à son aise à moins que sa prédication ne soit propre à convertir les pécheurs. Vous entendez parfois ces chrétiens reprendre l'église et répandra leurs lamentations et leurs blâmes au sujet de sa froideur et de sa mondanité, mais l'église réplique : « Nous n'allons pas mal du tout, ne voyez-vous pas combien nous prospérons ? Vos récriminations proviennent de ce que vous êtes des esprits inquiets ». En réalité, le cœur de ces chrétiens saigne et leur âme est comme en agonie, parce que les pécheurs ne sont pas convertis et que les âmes se précipitent dans l'enfer.

8. Vous trouverez en eux un esprit de prière et vous les -verrez priant non pour eux-mêmes, mais pour les pécheurs.

Si vous avez connaissance de la teneur habituelle des prières de quelqu'un, vous pourrez savoir par-là quel est le cours de ses sentiments. Si l'on est mu surtout par le désir d'être sauvé soi-même, l'on priera surtout pour soi-même, pour avoir ses péchés pardonnés, pour « jouir » davantage de l'Esprit de Dieu et ainsi de suite. Mais quant à celui qui est véritablement l'ami de Dieu et de l'homme, ses prières seront pour la gloire de Dieu dans le salut des pécheurs ; il ne sera jamais si abondant ni si puissant dans ses prières que lorsqu'il s'agira de ce sujet-là.

Allez dans les réunions de prières formées par de semblables chrétiens, et vous verrez qu'au lieu de s'enfermer tous dans l'étroite sphère de leurs propres intérêts, dépensant toutes leurs prières pour eux-mêmes et terminant par quelques mots concernant le royaume de Christ, comme en guise d'ornement, ils répandent, au contraire, leurs âmes en prières pour le salut des pécheurs. Je crois qu'Il y a eu des cas où de tels chrétiens ont été tellement possédés du désir de voir les pécheurs sauvés, tellement absorbés par cette pensée, qu'ils ont été pendant des semaines successives sans prier pour leur propre salut. Et si ces chrétiens prient quelque peu pour eux-mêmes, c'est pour être revêtus du Saint-Esprit, afin d'aller à la recherche des âmes et, par la puissance de Dieu, de les arracher du feu.

Vous qui êtes ici, vous pouvez dire ce qui en est de vos prières ; vous pouvez dire si c'est pour vous-mêmes que vous êtes le plus émus et que vous priez le plus ; ou si c'est pour les pécheurs.

Si vous ne connaissez rien de l'esprit de prière en faveur des pécheurs, vous n'êtes pas de vrais amis de Dieu et de l'homme. Quoi ! Le cœur insensible quand, à côté de vous, les pécheurs s'en vont en enfer ! Aucune sympathie pour le Fils de Dieu qui donna sa vie pour les sauver ! Arrière toutes vos professions de foi et toutes vos apparences de religion ! « Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, il n'est pas à Lui (Romains 8 v. 9) ». Qu'on ne me dise pas que des hommes sont véritablement pieux quand leurs prières s'élèvent paresseusement et comme au hasard ! Affaire de forme tout autant que les prières du papiste qui défile son chapelet. De telles gens se séduisent eux-mêmes, s'ils pensent être de vrais amis de Dieu et de l'homme.

9. Ces chrétiens n'ont pas besoin de demander quelles sont les choses « qu'il leur est commandé de faire » pour conversion des pécheurs.

Quand on leur présente un moyen qui promet du succès dans l’œuvre de la conversion des pécheurs, ils n'ont pas besoin, pour l'employer, que cela leur soit commandé sous peine d'encourir quelque pénalité. Il leur suffit de connaître que ce moyen est fait pour avancer l’œuvre à laquelle ils ont mis leur cœur ; en ce cas, ils l'adoptent aussitôt et le mettent en œuvre de tout leur pouvoir. Pour eux, la question qui se pose n'est pas tout le temps : « Qu'est-ce qui m'est expressément commandé ? » Mais bien « de quelle façon pourrais-je faire davantage pour le salut des âmes, pour la conversion du monde à Dieu ? » Ils n'attendent pas d'avoir un commandement exprès de la Bible pour s'engager dans l’œuvre des missions, ou des écoles du dimanche ou dans toute autre entreprise qui a en vue le salut des âmes ; ils sont toujours prêts pour toute bonne parole et toute bonne œuvre.

10. Un autre trait caractéristique de ces chrétiens est la disposition à renoncer à soi-même pour faire du bien aux autres.

Donner est une loi que Dieu a établie d'un bout à l'autre de l'univers. Même dans le monde de la nature ; les rivières, l'océan, les nuages, le soleil, tout donne. Il en est ainsi partout dans le royaume de la grâce. Donner est le véritable esprit de Jésus-Christ. Jésus-Christ n'a pas cherché sa propre satisfaction, mais le bien des autres. De même en est-il de cette classe de personnes qui nous occupe maintenant, elles sont toujours prêtes à renoncer à elles-mêmes, à leurs joies, leur confort et même à des choses nécessaires, dès qu'elles voient que par-là elles peuvent faire plus de bien.

11. Ces chrétiens sont continuellement à l'affût de nouveaux moyens et de nouvelles mesures pour faire du bien.

C'est un effet naturel de leur continuel désir de faire du bien. Au lieu d'être satisfaits de ce qui ne donne aucun succès, ils inventent continuellement de nouvelles méthodes et de nouveaux moyens pour atteindre leur but. Ils ne ressemblent pas à ceux qui sont satisfaits parce qu'ils font ce qu'ils appellent leur devoir. Quand un homme a en vue surtout son propre salut, il se dit que pourvu qu'il fasse son devoir, il est déchargé de toute responsabilité. Cela fait il est content ; il se persuade qu'il est à l'abri de la colère à venir, et qu'il a gagné le ciel en faisant ce que Dieu requérait de lui.

Après cela, que les pécheurs soient sauvés ou perdus, ce n'est pas son affaire, il n'y peut rien. Mais pour le vrai chrétien, il ne s'agit pas tant d'éviter la colère à venir et de gagner le ciel que de sauver les âmes pour la gloire de Dieu ; et si ce dernier but n'est pas atteint, il est dans l'angoisse. Un tel homme recherche, invente, essaie toujours quelque nouveau moyen, quelque généreuse entreprise, et si cela ne réussit pas, il essaie autre chose, puis autre chose encore ; il ne peut rester tranquille jusqu'à qu'il ait trouvé quelque chose qui ait du succès dans l’œuvre du salut des pécheurs.

12. Ces chrétiens manifestent toujours une grande douleur quand ils voient l'église endormie et ne faisant rien pour le salut des pécheurs.

Ils connaissent la difficulté, l'impossibilité de faire quelque chose de considérable pour le salut des pécheurs tant que l'église est endormie. Allez dans une église où la plupart ne font rien pour la conversion des pécheurs et se laissent emporter par le courant du monde, vous verrez que les vrais amis de Dieu et de l'homme y sont navrés d'un tel état de choses. Ceux qui sont religieux d'une autre façon, trouveront que tout va très bien et ne seront point affligés quand ils verront ceux qui prétendent être le peuple de Dieu courir après la vanité et la folie. Mais les chrétiens de la classe qui nous occupe auront le cœur rempli de douleur et de détresse en voyant l'église dans un pareil état.

13. Ils souffrent quand ils voient leur pasteur se comporter lâchement et ne point reprendre l'église sévèrement et fidèlement à cause de ses péchés.

Les autres chrétiens de profession veulent être bercés afin le bien dormir, ils veulent que leur pasteur prêche des sermons pleins de douceurs, fleuris, éloquents, des sermons qui les flattent, sans rien d'incisif et sans puissance. Mais les chrétiens dont nous parlons ne sont point, satisfaits à moins que le pasteur ne prêche avec puissance et d'une manière incisive, hardiment, « reprenant, censurant, exhortant, avec toute patience et en instruisant (2 Timothée 4 v. 2) ». Leurs âmes ne sont point nourries, ni édifiées, ni satisfaites de ce qui ne saisit pas et n'opère pas l’œuvre pour laquelle le ministère a été institué par Jésus-Christ.

14. Ils soutiendront toujours un pasteur fidèle qui prêche la vérité hardiment et d'une manière incisive.

Alors même que la vérité qu'il prêche les atteint, personnellement, loin de s'en plaindre, ils disent avec le Psalmiste : « Que le juste me frappe, ce sera de l'huile sur ma tête (Psaumes 141 v. 5) ». Quand la vérité est proclamée avec puissance, leurs âmes sont nourries et se fortifient dans la grâce. Ils prient pour leur pasteur, ils se répandent en larmes et en supplications dans leur cabinet pour que l'Esprit de Dieu soit toujours avec lui. Pendant que d'autres murmurent, disputent contre lui et l'accusent d'extravagance, ils le soutiendront ; oui, certes ! ils monteraient même sur le bûcher avec lui pour le témoignage de Jésus. Et ce qu'ils font est basé sur la meilleure de toutes les raisons : la prédication de leur pasteur va droit au but auquel ils ont voué toute leur vie.

15. Ils sont particulièrement angoissés quand les pasteurs prêchent des sermons qui ne sont pas propres à convertir les pécheurs.

Je veux dire quand le sermon n'est pas spécialement adressé à l'église de manière à la réveiller. D'autres peuvent approuver le sermon, le louer, ils peuvent dire : Quel beau sermon nous avons eu ! qu'il était éloquent, lucide, magnifique, sublime ! Cependant il ne leur était pas approprié puisqu'il ne tendait pas à convertir les pécheurs. Il y a des gens qui sont grands partisans de la doctrine de l'élection et qui ne veulent pas croire qu'un sermon soit évangélique à moins qu'il ne contienne cette doctrine ; et si cette doctrine y est, les voilà contents, que le sermon soit propre ou non à convertir le pécheur. Mais quand un homme a mis son cœur à la conversion des pécheurs, s'il entend un sermon qui n'est point fait pour la produire, il a l'impression qu'il y manque la « grande chose » qui fait le sermon évangélique. Si au contraire il entend un sermon propre à sauver les âmes, il est alors nourri et son âme se réjouit.

Nous trouvons ici la raison de la différence étonnante qu'il y a souvent entre les divers jugements que l'on porte sur la prédication ; et c'est ici encore que l'état spirituel de chacun se révèle admirablement. Il est aisé, en effet, de voir, selon le jugement que l'on porte sur la prédication, quels sont ceux qui sont remplis de l'amour de Dieu et des âmes. Les vrais amis de Dieu et de l'homme ne voudront pas d'un sermon qui ne sera pas particulièrement propre à sonder, à réveiller l'église et à la porter à l'action, et qui, par conséquent, sera impuissant à humilier et à convertir celui qui pèche.

16. Vous entendrez toujours les chrétiens de cette classe se reprocher de ne point faire assez pour le salut des pécheurs.

Quoi qu'ils fassent en réalité dans ce but, il semble que plus ils font, plus ils désirent faire encore. Ils ne sont jamais satisfaits ; il n'y a jamais de bornes à leur désir de convertir les pécheurs. Je me rappelle un homme excellent qui avait coutume de prier pour les individus, pour les localités, pour la conversion du monde, jusqu'à ce qu'il fût à bout de forces. Il s'écriait un jour, complètement épuisé par la prière : « Oh ! Quel feu, quelle douleur dans mon cœur ! Rien ne peut apaiser ce désir insatiable de sauver les pécheurs ; mon âme défaille de douleur ». Bien qu'il eût été plus utile que presque tous ceux de son âge, cet homme voyait tant à faire encore, et son désir de voir les pécheurs sauvés était si ardent, que sa constitution physique ne le pouvait supporter. « Je me trouve, disait-il un jour, mourant du désir de posséder plus de force pour faire davantage pour le salut des âmes ».

17. Si vous désirez émouvoir les chrétiens de cette sorte ; vous devez leur présenter des considérations qui touchent à la gloire de Dieu dans le salut des pécheurs.

Si vous voulez les émouvoir, présentez-leur la situation des pécheurs et montrez-leur combien ils déshonorent Dieu ; vous verrez que cela les touchera et les enflammera bien plus que tous les appels que vous pourriez faire à leurs craintes et à leurs espérances. Pressez ce sujet sur leurs cœurs ; montrez-leur comment ils peuvent convertir les pécheurs : émus et palpitants ils lutteront avec Dieu dans la prière ; ils seront en travail pour les âmes jusqu'à ce qu'ils voient converties et que Christ « l'espérance de la gloire » soit formé en elles.

Si le temps et les forces me le permettaient, je pourrais mentionner beaucoup d'autres traits qui caractérisent cette classe de chrétiens, les vrais amis de Dieu et de l'homme. Mais je dois m'arrêter ici. Nous remettrons l'examen des deux autres classes vendredi prochain, si nous sommes conservés jusque-là et si le Seigneur le permet.

Maintenant, appartenez-vous à cette classe des vrais amis de Dieu et de l'homme, ou ne lui appartenez-vous pas ? J'ai mentionné certains faits considérables et fondamentaux qui indiquent le vrai caractère de ces chrétiens en montrant quelle est l'affaire capitale et le but suprême de leur vie. Chacun de vous peut juger s'il se reconnaît ou non à ces traits.

Quand j'aborderai l'autre partie de mon sujet, j'entreprendrai de décrire les chrétiens de profession dont le zèle religieux, les prières et les efforts ont un autre but ; je montrerai leur vrai caractère et comment se révèlent leurs vrais motifs.

Et maintenant, mes bien-aimés, je vous le demande devant Dieu, avez-vous les caractères de l'enfant de Dieu ? Est-ce que vous savez que ces caractères sont les vôtres ? Pouvez-vous dire « Seigneur, tu sais toutes choses, tu sais que je t'aime, tu sais que je suis un de ces chrétiens-là ? »

 

Arthur KatzUn message de Charles Finney
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